Par

Antoine Grotteria

Publié le

23 août 2025 à 6h46

La montagne à Paris. Ou Paris s’approprie la montagne. On ne sait plus très bien. À des centaines de kilomètres des reliefs hexagonaux, une kyrielle de coureurs exaltés s’enquille des allers-retours dans les marches menant vers le Sacré-Cœur à Montmartre, quartier canonique du 18e arrondissement. Le langage converge vers des mots habituellement prononcés sur les crêtes, comme le dénivelé. Sauf qu’au niveau de la rue Foyatier, l’horizon est obstrué par des immeubles inquantifiables à l’oeil. La beauté peut être subjective, mais l’environnement urbain maltraite les puristes du trail. Qu’importe, le sport dépasse désormais son berceau. Dans la capitale, les places Saint-Pierre et Suzanne-Valadon concentrent ce phénomène accentué par le Covid-19. Décryptage.

Plus de 200 marches

Tous les mercredis, les membres de l’association Team Trail Paris se réunissent près du funiculaire pour une séance d’une heure et demie dans les 200 marches de la rue Foyatier, précise leur site. Au programme, un échauffement, du fractionné et un travail de postures. Ce rituel peut sembler surréaliste tant le quartier est soumis à une pression touristique importante. Aux côtés des visiteurs, les coureurs enchaînent les montées et les descentes.

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Une pratique qui s’inscrit dans la psyché collective sportive autour de Montmartre. Creusé de ruelles pavées en pente, le quartier représente un endroit idéal pour s’entraîner. Les cyclistes, ragaillardis par le passage du Tour de France, grimpent la rue Lepic. Plus vulnérables, les coureurs ont choisi d’emprunter les escaliers. Cette appropriation de l’espace public est autant un choix qu’une contrainte.

Avec son importante densité et son faible taux d’espaces verts, Paris demeure une ville aride à la pratique du trail. Les pratiquants doivent ainsi prendre de la hauteur à d’autres endroits, comme à Fontainebleau (Seine-et-Marne), dans le parc de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) ou encore dans la vallée de la Chevreuse (Yvelines et Essonne).

Une fine sélection qui n’offre pas le même cadre ni la notoriété de Montmartre. Si bien que des courses sont organisées chaque année sur les pentes sur la butte. Parmi elles, l’Ultra-trail Montmartre (UTMM). Lancée en 2017 par l’influenceur parisien « Casquette verte », de son identité Alexandre Boucheix, suivi par près de 200 000 personnes sur le réseau social Instagram, la compétition mêle défis loufoques et chronométrés.

Un sport de plus en plus populaire

Vingt participants, tirés au sort, doivent effectuer 11 600 mètres de dénivelé en montant puis en descendant un maximum de fois les marches de la rue Foyatier. En 2024, le premier a mis 21h07, loin du record établi en 2019, avec 16h10. Pour embrasser l’esprit festif souhaité par « Casquette verte », les participants sont enjoints à se déguiser et à « faire remonter et descendre le saumon ». Sur le site, les organisateurs demandent même une « présence obligatoire au Corcoran’s Irish Pub (un bar dans le 2e arrondissement, NDLR) à la fin de l’épreuve ».

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Une manière ludique d’appréhender ce sport. Pourtant, si la course emprunte le terme d’Ultra-trail, la définition s’insère dans un cadre délimité. D’après la Fédération française d’athlétisme (FFA), l’instance qui encadre la discipline, le cahier des charges fourni aux organisateurs des courses définit le format comme « une course pédestre avec classement et/ou prise de temps se déroulant en milieu naturel sur un parcours matérialisé formé notamment de chemins ou de sentiers supérieurs à 80 km et dont la totalité des surfaces goudronnées n’excèdent pas 15 % […].» 

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En prenant quelques distances avec cette définition, les organisateurs souhaitent se différencier. Court-circuiter les médiums institutionnels peut susciter l’intérêt d’un plus élargi. Un enjeu tout sauf anodin. Car avec plus d’un million de participants à des courses de trail en 2024 – d’après des chiffres communiqués par la FFA -, la pratique connaît un essor substantiel. La tendance devrait se maintenir dans les prochaines années. À Montmartre, les touristes n’ont pas fini de côtoyer les traileurs.

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