26 août 1995, boulevard Haussmann, Paris. Bernard Lapasset s’avance dans un salon étriqué du petit hôtel Ambassador, les traits tirés par trois jours de négociations. En face de lui, une poignée de journalistes, pris au dépourvu par l’estivale convocation de l’International Rugby Board (IRB), ancêtre de World Rugby. « Le conseil vient de décider de modifier les règles de participation à notre jeu de rugby. Les règles que l’on appelait autrefois les “règles de l’amateurisme” » ne font plus loi, annonce le président français de l’organisation internationale.
Bernard Lapasset vient de signer l’acte de décès de 172 années d’amateurisme dans le rugby. Cette règle qui interdisait formellement de rémunérer les joueurs ; ces derniers étaient juste défrayés, ou touchaient des primes de match pas toujours déclarées. Débute alors dans le monde du ballon ovale, « l’ère open ». Désormais, les fédérations devront choisir entre circuit professionnel et circuit amateur.
En France, le professionnalisme n’arrive qu’en 1998, après des mois de forcing de certains joueurs souhaitant être rémunérés, et après « un coup de boomerang dans la gueule en 1997 », un match catastrophique contre l’Afrique du Sud (10-52), qui fait comprendre à tous qu’ils n’ont plus vraiment le choix, se souvient Philippe Saint-André, légende du XV de France et fer de lance du professionnalisme chez les joueurs. Ce jour d’août 1995, Bernard Lapasset met fin à deux mois houleux, au cours desquels le rugby a été le théâtre d’un jeu d’échecs entre deux milliardaires australiens, où fédérations et joueurs n’ont été que des pions.
Ancienne rivalité
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