Gildaa, chanteuse franco-brésilienne, se produit à Rock en Seine samedi 23 août à 21h15, faisant partie des jeunes talents sélectionnés dans le cadre du dispositif Club Avant Seine. Ce programme annexe met en lumière quinze artistes émergents, français et internationaux, issus de la scène indépendante.
“C’est trop bien ! Je me sens un peu vieille là-dedans, mais c’est cool”, sourit-elle lorsqu’on la rencontre quelques jours avant sa prestation, aux abords du Grand Palais.
Née en 1994 à Paris, l’artiste, de son vrai nom Camille Constantin Da Silva, baigne dans la musique depuis son plus jeune âge. À la maison, on parle, on pense et on vit musique : sa mère est une chanteuse brésilienne et son père, un percussionniste français.
“Petite, ma mère organisait de grandes fêtes où elle invitait plein de Brésiliens qui font tous de la musique ou qui sont tous des gens spirituels ou des fous. Moi j’ai toujours été là, à écouter cette musique populaire brésilienne. C’est des textes très simples qui racontent des choses de la vie avec une grande mélancolie mais avec une harmonie et des arrangements qui donnent envie d’être joyeux”, se remémore celle qui joua du violon pendant dix années à partir de ses six ans, avant de se mettre aux percussions afro-brésiliennes.
Son éveil musical l’a conduite à découvrir des artistes d’horizons différents, de Ella Fitzgerald à Michael Jackson, en passant par Jacques Brel et Etta James. Ce mélange de sonorités, de styles et de genres a créé, quelques années plus tard, son style unique, à la croisée de l’électro, du R&B, du jazz, de la soul brésilienne et de la pop. Ses titres, chantés en français et en portugais, mélangent joie et tristesse.
Sur scène, seule ou avec des musiciens, elle se transforme et hypnotise. Une aisance sans doute due à son autre parcours, le théâtre. Après son bac en 2012, elle met de côté la musique et intègre la classe libre des Cours Florent, avant d’être admise au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris en 2015. Les planches d’un théâtre, une scène d’un festival ou d’une salle de concert : peu lui importe, Camille Constantin Da Silva s’exprime partout, pour tout le monde, et touche l’intime des spectateurs.
“Quand on est trois, avec un guitariste et une percussionniste, moi je suis avec les gens, avec le public, décrit-elle. Et quand je suis toute seule sur scène, c’est comme si je reproduisais le petit salon de mon enfance : chaque instrument joue le rôle d’un invité.” Les violons, trombones, koras et udus créent une symphonie mise en boucle par une loop station (appareil électronique permettant d’enregistrer des boucles musicales en direct).
Mais tout ça, ses inspirations, le théâtre, les fêtes familiales durant son enfance, c’est la vie de Camille Constantin Da Silva. Pourtant, celle que nous rencontrons au Grand Palais, c’est un double, un alter-ego : le clown mélancolique Gildaa.
Gildaa est née à la fin du XVIIIe siècle, mais elle ne fait pas son âge. Dans une quête perpétuelle à la recherche de sa mémoire et de ses origines, elle est un kaléidoscope qui chante pour se souvenir. “Je suis déjà venue plein de fois dans la vie, à chaque fois lors d’une époque différente et plus ou moins au même âge, raconte la diva, d’une voix douce et hypnotique. Je reviens toujours parce que j’ai oublié quelque chose et à chaque fois je ne sais plus ce que c’est ; alors la musique, c’est juste pour passer le temps, pour me souvenir de ce que j’ai oublié.”
Elle atterrit dans la vie de Camille un jour où cette dernière, souffrant d’une douleur au ventre incurable, se désole d’un énième rendez-vous chez le médecin. “Elle était très triste et je suis arrivée comme ça, tout à coup dans sa tête, avec des flashs de toute notre histoire depuis trois siècles”, relate Gildaa. Une apparition qui a eu lieu lorsque Camille étudiait la discipline du clown. “C’est une discipline très difficile parce que ça demande d’aller dans les profondeurs de son âme avec un abandon presque total et d’être en grande confiance avec celui ou celle qui nous y amène. Et c’est là, tout au fond, que je suis arrivée et qu’on s’est rencontré avec Camille. J’ai crié mon nom, sans raison, comme ça, à travers sa bouche.”
Si la cohabitation se passe bien, la scène est l’occasion pour Gildaa de prendre le dessus, de pouvoir s’exprimer à plein poumon sans que Camille ne lui “foute un coup de pied au cul. C’est un moment où on se permet d’écouter différemment, d’écouter malgré le monde et la distance avec l’artiste. D’écouter vraiment avec le fond de son cœur.” Même lorsqu’elle joue sur de grandes scènes, comme à Rock en Seine cette année, son style intimiste touche les spectateurs. “C’est un vrai challenge d’aller chercher l’intimité. Une fois, lors d’un concert avec plein de monde dehors, j’ai alpagué une femme très très loin qui s’est tournée vers moi et qui a traversé toute la foule. Elle est restée devant et par la suite, on s’est écrit. Nous avons été attirées, sans raison.”
Entre septembre et janvier prochain devrait sortir son premier album, sur lequel elle travaille depuis plus de quatre ans, notamment avec sa sœur, Yndi Da Silva, également compositrice et chanteuse. “Dans cet album, il y a les indices de tous les prochains.” Gildaa a déjà en tête tout le squelette de sa carrière. Chaque album sera une nouvelle pièce de l’énigme, qui apportera des réponses à la quête incessante de vérité et de libération. Un voyage guidé par son mantra “c’est pas grave”, qu’elle répète à tout bout de “chant”.