Anaco Albatros, migrant camerounais, réfugié dans la Manche et compagnon d’Emmaüs à Saint-Pairs-sur mer raconte son parcours dans un livre » la honte d’un migrant »
C’est une parole qu’on entend rarement. Celle des migrants, des sans-papiers, de leur combat pour arriver en France, de leur quotidien
Dans le sud Manche,l’un d’eux a pris sa plume. Anaco Albatros -son nom d’auteur – compagnon d’Emmaus à Saint-Pair-sur-mer, 44 ans, vient de publier » La honte du migrant » aux éditions Le Lys bleu. Plus de 700 pages pour raconter son parcours : de son enfance difficile à l’engagement politique puis à l’exil vers la Turquie puis l’Europe.
Il est arrivé il y a 3 ans en France, jusqu’à Granville où il a été pris en charge notamment par l’association Port d’attache. C’est tout un réseau de solidarité qui l’a aidé et qui lui a permis de publier son livre. « J’ai un peu sympathisé avec les bénévoles d’Emmaüs. C’était tout nouveau en France pour moi. Ça me paraissait tellement étrange. Mais après, j’ai été pris en charge par l’association Port d’attache. C’est Port d’attache qui s’est occupé de ma démarche administrative. C’est Port d’Attache qui m’a logé. Ils ont presque tout fait pour moi. C’est quand je suis arrivé là que j’ai présenté le premier manuscrit que j’avais, écrit à la main. Mais on m’a dit que si j’espérais un jour me faire éditer, il faudrait que je tape tout ça à la machine. J’ai rencontré des gens de très bonne volonté, qui m’ont fait rencontrer d’autres personnes, qui ont mis à ma disposition un ordinateur. Et c’est comme ça que j’ai commencé à taper mon texte. «
Ce texte, le camerounais l’a écrit avec un nom d’auteur Anaco Albatros, tout un symbole » Quand j’étais dans la migration, que les conditions devenaient de plus en plus difficiles, je m’imaginais que si j’avais les pouvoirs magiques, je me transformerai en albatros et j’irais jusqu’à ma destination . » L’albatros infatigable et résistant qui peut parcourir des milliers de kilomètres sans s’arrêter. Ce qu’a fait Anaco quand il n’a plus eu le choix, après son engagement dans un parti d’opposition en 2012 : « J’ai milité dans ce parti politique, espérant pouvoir un jour voir le changement. Sauf qu’à un certain moment, j’ai été attaqué et accusée d’être porteur d’un projet insurrectionnel, j’ai été agressé violemment et j’ai failli perdre la vie. La vie est devenue trop compliquée. Je me suis retrouvé à l’hôpital. Je suis un peu devenu comme un clandestin dans mon propre pays. Du coup, j’ai compris qu’il fallait que je sorte du pays. »
Un exil à travers l’Europe
Il obtient d’abord un visa pour la Turquie, tente ensuite 4 fois la traversée vers la Grèce. De là il traverse l’Europe pour arriver en France où il est depuis près de 3 ans compagnon d’Emmaüs, à Saint-Pair-sur-mer. Lui qui au Cameroun avait le niveau pour rentrer à l’ENA ne peut aujourd’hui pas faire d’études, faute de papiers
Au Cameroun, c est la corruption qui l’a empêché de poursuivre ses études. Une injustice qu’aujourd’hui encore il n’a pas digéré, mais la parution de son livre lui redonne espoir . 720 pages rédigées grâce à l’appui de l’association granvillaise Port d’Attache et aux personnes qu’il a rencontré à Emmaüs. » Je vais toujours être confronté à la difficulté des papiers. Mais néanmoins, le fait pour moi d’avoir produit ce livre ici, c’est quand même quelque chose qui prouve qu’ici, en France, si on a la volonté, on peut oser. «
De l’espoir donc, de la fierté aussi pour combattre cette honte qui dit il colle à la peau de tous les camerounais, la honte d’un régime impitoyable dit il.
» La honte d’un migrant » aux éditions Le Lys Bleu. 25 euros. Sur commande.