Sans capes bigarrées mais avec des brassards tricolores, privés de pouvoirs surnaturels mais une mitrailleuse Sten à la main, les résistants n’ont rien à envier à « Batman et Superman », dixit Jean-Marc Giaume. Ce lundi 25 août 2025, à l’école Rothschild, à Nice, l’adjoint au maire délégué à la Culture scientifique donnait le coup d’envoi du tout premier centre aéré niçois consacré à l’histoire locale (1) de la Seconde Guerre mondiale. Durant une semaine, une vingtaine de bambins âgés de six à onze ans vont multiplier les ateliers mémoriels: lectures de textes, analyses de cartes et de photos, excursion sur la plage du débarquement au Dramont… De quoi être fin prêts pour la grande cérémonie patriotique du jeudi 28 août, où seront célébrés les 81 ans de la libération de Nice.
« À Nice, ce sont les habitants qui se sont libérés tout seuls »
« En chantant la Marseillaise et le Chant des Partisans, ces futurs citoyens se souviendront toute leur vie du sacrifice des 35héros tombés sous les balles de l’occupant, acquiesce gravement l’élu. À l’heure où s’éteignent les derniers témoins et acteurs de cette sombre période, il nous faut passer le flambeau. »
Mais comment s’y prendre sans blesser ces jeunes consciences? À plusieurs reprises, l’adjoint marque un silence, cherche les mots justes pour expliquer le livre illustré Nice dans la tourmente 1939-1945, (gratuit, édité par la Ville en 2024), principal support de travail pour la petite troupe. « Des crimes ont été commis par les nazis pour effrayer la population, entame l’élu. Mais pensez-vous que cela a fonctionné? » Brève hésitation. Tom, neuf ans, lève timidement le doigt: « Non, ça n’a pas du tout marché. Parce que les gens en ont eu marre d’être arrêtés et tués, ils se sont rassemblés pour chasser les Allemands. » Son camarade tique: « Mais ça n’est pas les militaires américains qui se sont bagarrés? »
« À Nice, ce sont les habitants qui se sont libérés tout seuls. Les Américains sont arrivés le lendemain de cette victoire. Ils ont fait la fête ensemble. Mais si c’était la fin de la guerre sur le littoral, il fallait encore délivrer nos montagnes », rappelle Marie-Christine Fix, conseillère municipale déléguée au Monde combattant et au lien Armée-Nation. Les visages juvéniles hochent attentivement. Pour beaucoup, c’est la première fois qu’ils entendent parler de la guerre avec autant de précisions. Le concept abstrait s’incarne dans des photos surannées de lieux familiers: la place Masséna, la Prom’, l’avenue Jean-Médecin (alors avenue de la Victoire)… Tour à tour barricadées, camouflées ou délabrées par les affrontements. « J’avais jamais vu la ville comme ça. Ça fait bizarre mais c’est intéressant. Ça rappelle qu’on a de la chance de vivre dans un pays en paix », confie Ozan, neuf ans. À ses côtés, Daniel, même âge, oscille: « Ma mère est partie d’Ukraine. En France on est à l’abri. » Des mots d’adultes. Puis sonne la récrée, signant le retour de l’insouciance, la marmaille se dispersant entre trappe-trappe et jeux de ballons. Après tout, aussi studieuses soient-elles, l’enfance et les vacances ne sont pas finies.
1. Durant l’été, le centre aéré s’est aussi intéressé à la préhistoire, au Moyen Âge et à la Belle Époque.