Android perd un morceau de son âme. Google vient d’annoncer qu’il bloquera dès 2026 l’installation d’applications non vérifiées sur les smartphones Android. Un changement sécuritaire qui rapproche dangereusement la plateforme du modèle fermé d’Apple.
Android perd un peu plus de son ADN ouvert. Dès 2026, Google bloquera l’installation manuelle d’applications non vérifiées sur la quasi-totalité des smartphones Android.
Google compare sa nouvelle mesure à un « contrôle d’identité à l’aéroport« . À partir de l’année prochaine, tous les développeurs d’applications Android devront vérifier leur identité auprès de Google, même s’ils ne distribuent pas leurs apps sur le Play Store. Les applications non vérifiées ne pourront plus être installées sur les appareils Android certifiés.
Cela annonce un tournant important dans l’histoire d’Android. Depuis près de 20 ans, l’installation manuelle d’applications (appelée « sideloading » en anglais) constituait l’un des principaux avantages de la plateforme face à l’écosystème fermé d’Apple. Cette liberté pourrait bientôt appartenir au passé.
L’ouverture d’Android sacrifiée sur l’autel de la sécurité
Google justifie cette mesure radicale par des statistiques alarmantes : les applications téléchargées en dehors du Play Store seraient 50 fois plus susceptibles de contenir des logiciels malveillants. Un chiffre qui interpelle, mais qui soulève aussi des questions sur la méthode de calcul.
« Depuis que tous les développeurs d’applications Google Play ont été obligés de vérifier leur identité en 2023, Google a constaté une chute vertigineuse des logiciels malveillants et de la fraude« , explique l’entreprise. Fort de ce succès, Google veut étendre le principe à l’ensemble de l’écosystème Android.
La mécanique est simple : Google créera une « console de développement Android simplifiée » où les développeurs devront s’enregistrer et faire vérifier leur identité. Ils devront ensuite déclarer le nom du package et les clés de signature de leurs applications. Google ne vérifiera pas le contenu des apps, seulement l’identité de leurs créateurs.
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Mais cette simplicité apparente cache une complexité redoutable. Car derrière cette mesure se profile une question fondamentale : Google a-t-il le droit de contrôler l’installation d’applications sur l’ensemble de l’écosystème Android ?
Cette mesure risque de frapper particulièrement les petits développeurs et les projets open source. Créer une application expérimentale, un outil personnel ou contribuer à un projet communautaire nécessitera désormais une validation préalable de Google.
La documentation disponible ne précise pas ce qui se passera concrètement lors de la tentative d’installation d’une application non vérifiée. Google devra probablement diffuser une « liste blanche » via ses services Play.
Google assure que les exigences resteront « minimales ». Mais rien ne garantit que cette politique ne durcira pas à l’avenir. L’histoire montre que les mesures présentées comme temporaires ou limitées ont tendance à s’étendre et se renforcer.
Un calendrier de déploiement en plusieurs étapes
Google ne compte pas brusquer cette transition. Le déploiement s’étalera sur près de trois ans, avec plusieurs phases de test et d’acclimatation.
Octobre 2025 marquera le début des tests en accès anticipé. Les développeurs volontaires pourront découvrir la nouvelle console et se familiariser avec les procédures de vérification.
Mars 2026 ouvrira l’accès à tous les développeurs. Ils auront six mois pour s’adapter avant le lancement effectif de la mesure.
Septembre 2026 verra le déploiement dans quatre pays pilotes : Brésil, Indonésie, Singapour et Thaïlande. Un choix géographique qui n’est pas anodin, ces marchés émergents étant particulièrement touchés par les applications malveillantes.
2027 devrait marquer l’extension mondiale de cette politique. Tous les appareils Android certifiés – soit la quasi-totalité des smartphones Android en dehors de Chine – seront concernés.
Cela intervient dans un contexte juridique explosif. Google vient de perdre son procès antitrust contre Epic Games, créateur de Fortnite. Le tribunal a ordonné à Google d’ouvrir son écosystème d’applications, notamment en distribuant des boutiques tierces et en autorisant le téléchargement du contenu Play Store sur d’autres plateformes.
Cette décision judiciaire pourrait paradoxalement servir les intérêts de Google. En imposant la vérification des développeurs, l’entreprise conserve un contrôle indirect sur l’ensemble du marché des applications Android, même si elle doit théoriquement l’ouvrir à la concurrence.
Android devient-il un iPhone bis ?
Cette annonce signe peut-être la fin de l’Android tel qu’on l’a connu. La plateforme de Google se rapproche dangereusement du modèle fermé d’Apple, où chaque application doit passer sous les contrôles du constructeur.
Certes, Google ne vérifie pas le contenu des applications, contrairement à Apple. Mais contrôler qui peut distribuer des apps revient à contrôler indirectement ce qui peut être distribué. Une distinction subtile qui pourrait s’estomper avec le temps.
Les utilisateurs Android perdront progressivement l’un des derniers avantages de leur plateforme : la liberté d’installer ce qu’ils veulent, d’où ils veulent. Cette évolution satisfera peut-être les entreprises et les utilisateurs soucieux de sécurité, mais frustrera les technophiles attachés à la philosophie originelle d’Android.