Sur l’île de Wight, un fossile longtemps ignoré révèle aujourd’hui une nouvelle espèce de dinosaure herbivore au profil spectaculaire.

Fossile d’Istiorachis macarthurae, dinosaure du Crétacé inférieur doté d’une voile dorsale spectaculaire, découvert sur l’île de Wight.Fossile d’Istiorachis macarthurae, un dinosaure herbivore du Crétacé inférieur doté d’une voile dorsale exagérée. © Papers in Palaeontology / Jeremy Lockwood

Baptisé Istiorachis macarthurae, ce spécimen du Crétacé inférieur, doté d’une voile dorsale démesurée, offre un aperçu fascinant des stratégies de séduction visuelle au sein des dinosaures. Sa découverte remet en cause certaines hypothèses classiques sur l’évolution morphologique des herbivores anciens.

Un fossile méconnu, une silhouette spectaculaire et une nouvelle espèce mise au jour

Pendant des années, une série de vertèbres fossilisées reposait dans un musée de l’île de Wight. Personne ne s’y était vraiment intéressé.

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Jusqu’à ce que Jeremy Lockwood, paléontologue affilié à l’université de Portsmouth et au Natural History Museum de Londres, décide d’en réexaminer les fragments. En recollant ces pièces, il a identifié une espèce totalement nouvelle : Istiorachis macarthurae.

Le fossile provient de la formation géologique de Wessex. Il présente des vertèbres dorsales et caudales exceptionnellement hautes.

Certaines montrent un rapport de plus de 4 entre la hauteur de l’épine neurale et celle du corps vertébral. Selon une étude parue dans Papers in Palaeontology, ces proportions dépassent celles de tous les autres iguanodontes connus.

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Ce dinosaure, haut de deux mètres et pesant environ une tonne, devait porter une voile dorsale proéminente courant le long de son dos et de sa queue. Son nom rend hommage à la navigatrice britannique Ellen MacArthur, originaire de l’île. Longtemps confondu avec un iguanodon classique, ce fossile enrichit la diversité paléontologique de la région.

Une voile dorsale exagérée qui servait à séduire, pas à survivre

Reconstitution artistique d’Istiorachis macarthurae, un dinosaure herbivore du Crétacé inférieur avec une voile dorsale démesurée.Représentation artistique d’Istiorachis macarthurae, un dinosaure herbivore à voile dorsale découvert sur l’île de Wight. © University of Portsmouth / Papers in Palaeontology

Les longues épines neurales d’Istiorachis macarthurae posent de nombreuses questions. À quoi pouvait bien servir une telle structure ? Plusieurs hypothèses ont été envisagées. Mais selon Jeremy Lockwood et ses collègues, il est peu probable que la voile ait eu une fonction thermorégulatrice ou musculaire.

En effet, une voile richement vascularisée aurait été trop vulnérable face aux prédateurs. L’exagération de certaines épines, parfois longues de plus de 30 centimètres, semble aussi incompatible avec une fonction purement fonctionnelle. L’hypothèse sexuelle apparaît donc la plus plausible.

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Des comparaisons avec des espèces vivantes comme le basilic vert, les iguanes Hydrosaurus ou certains caméléons montrent que des structures semblables existent chez les mâles. Elles servent souvent à séduire un partenaire ou à intimider un rival. Ces parures, bien qu’énergétiquement coûteuses, jouent un rôle central dans la sélection sexuelle.

Selon une étude du Natural History Museum publiée en parallèle, l’hyperélongation des épines neurales a émergé à plusieurs reprises dans l’histoire des tétrapodes. Mais rarement avec une telle ampleur. Ce trait morphologique aurait alors fonctionné comme un signal honnête de vigueur, un marqueur de bonne santé affiché au grand jour dans les plaines du Crétacé.

Une découverte qui redéfinit notre perception de l’évolution comportementale

Istiorachis macarthurae n’est pas qu’un fossile impressionnant. Il est aussi un témoin précieux des comportements sociaux anciens. Sa morphologie inhabituelle ne répond pas à un besoin strict de survie, mais à une stratégie de communication. Et cela change tout.

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Ce dinosaure suggère que les signaux visuels complexes existaient déjà chez des herbivores du Crétacé inférieur. Il rejoint d’autres espèces fossiles chez qui l’on soupçonne des fonctions similaires. Mais ici, le niveau d’exagération morphologique est tel qu’il devient impossible de ne pas y voir un message adressé aux autres.

Grâce à cette découverte, les paléontologues affinent leur compréhension des mécanismes de sélection sexuelle dans l’histoire évolutive. Et nous rappellent que, même il y a 125 millions d’années, l’apparence pouvait déjà être une arme de séduction massive.