Dans le monde des entreprises, les patrons se lancent la plupart du temps dans le business en créant leur propre structure ou en reprenant une société existante. Le Rennais Pascal Martin, lui, a choisi une troisième voie : celle du « détourage » (« carve-out », en anglais), c’est-à-dire le rachat d’une des branches d’une entreprise. De deux, dans le cas de Pascal Martin, qui a repris, en janvier 2024, les filiales Énergie et Exploitation d’espaces du groupe rennais Legendre.
Un vrai « défi », car « quand on fait une reprise d’entreprise classique, on reprend tout : la tête, les mains, les jambes… », explique Pascal Martin. « Mais avec un carve-out, c’est différent. On reprend une structure sans les fonctions supports, donc sans la tête. À vous de la recréer. Or dans le même temps, la société doit continuer de fonctionner », ajoute celui qui s’était rapproché de Legendre en 2008 afin de créer le spécialiste de l’électricité verte Armorgreen.
Salariés, fournisseurs, clients, projets en cours… Il faut continuer à être présents. « C’est un vrai TGV, on prend les choses en cours de route et tout continuer à avancer, le train ne ralentit pas une seule seconde. C’est même pire parce que tout l’écosystème – clients, salariés, fournisseurs – est dans une situation de doute, car ils savent ce qu’ils quittent mais pas ce qu’ils retrouvent », note le chef d’entreprise, qui fêtera ses 50 ans en mai prochain.
« Beaucoup de points d’interrogation »
Pour continuer à faire tourner la machine, Nexhos – le nom de la nouvelle société créée à partir des deux ex-activités de Legendre – a dû faire vite. « Dans ce genre de moment, on n’a pas le temps de recruter comme on le ferait normalement. » Des contrats sont donc signés avec des prestataires pour recréer des fonctions supports « opérationnelles très rapidement » : marketing, communication, finances, RH, informatique…
Côté salariés, il a fallu se relever les manches. En quittant le giron de Legendre, « on a dû faire plus en étant moins et on y est arrivé. Et ce, essentiellement grâce à deux ressorts : la confiance et la responsabilisation. Tout le monde s’est mobilisé, tout le monde a eu envie. C’est une vraie leçon en termes d’efficience et économiques », estime Pascal Martin, qui tient à « tirer [s]on chapeau » aux salariés (ils sont plus de 80 aujourd’hui). « Quand on quitte un groupe établi, ce n’est pas évident. Il y a beaucoup de points d’interrogation, de l’inquiétude, mais tout le monde a suivi. » Idem pour les fournisseurs et certains clients.
Je n’aurais jamais espéré être là où nous en sommes aussi rapidement. Je pensais que tout mettre en place serait plus douloureux plus longtemps.
Un « DG » recruté
Le bilan est donc positif pour Nexhos. « Nous avons eu beaucoup de chance […] Je n’aurais jamais espéré être là où nous en sommes aussi rapidement. Je pensais que tout mettre en place serait plus douloureux plus longtemps », confie Pascal Martin, qui, au fil du temps, a remplacé certains de ses prestataires par des salariés « maison ». En avril, il a aussi recruté un pro de l’immobilier, Marc Richter, sur un poste de directeur général, afin de continuer à structurer l’entreprise et lui donner les moyens de continuer à grandir.
En 2024 – son premier exercice financier en tant qu’entité indépendante -, la PME affiche un chiffre d’affaires de 31,1 M€ et un résultat brut d’exploitation (Ebitda) de 2,3 M€. Deux tiers provient de l’activité énergie, recentrée sur la production d’électricité solaire, et le reste de
l’exploitation d’espaces (bureaux, coworking, résidences étudiantes, coliving et auberges de jeunesse, sous les marques Whoo et Whoorks). À l’avenir, « on va vers un rééquilibrage du poids de ces deux activités, qui sont complémentaires et vont rester les deux poumons de l’entreprise. Il y a encore beaucoup à faire », indique Pascal Martin.
Une acquisition en projet dans l’hôtellerie
Pour l’avenir, le chef d’entreprise a plusieurs projets dans sa besace. Notamment se renforcer dans la maintenance des installations photovoltaïques, avec de possibles acquisitions. Par ailleurs, « on ne s’empêche pas de regarder d’autres énergies ». Sur la partie espaces, l’objectif est d’investir dans les établissements de coworking actuels (Rennes, Nantes et Bordeaux) pour rester attractifs et « pourquoi pas les racheter » (ils sont aujourd’hui détenus par des foncières).
En parallèle, un projet d’acquisition est dans les tuyaux pour septembre dans le domaine de l’hôtellerie. « On se spécialise plutôt sur les hostels (les auberges, NDLR). Nous en avons déjà une à Bordeaux, qui partage les mêmes services avec notre résidence étudiante », rappelle Pascal Martin, qui ajoute que la future opération permettra à Nexhos de se renforcer substantiellement dans le sud-est de la France. Il vise un chiffre d’affaires de 30 à 35 M€ en 2025 et de 35 à 40 M€ en 2026.