Un chef-d’œuvre, volé à un marchand d’art juif d’Amsterdam pendant la Seconde Guerre mondiale, a ressurgi en Argentine, totalement par hasard, relate le média Gizmodo. Il y a quatre-vingt-cinq ans, le tableau Portrait d’une dame du peintre italien Giuseppe Ghislandi, dit Fra’ Galgario, avait été confisqué à Jacques Goudstikker, célèbre galeriste contraint de fuir les Pays-Bas lors de l’invasion allemande.
Le tableau représentant la comtesse Colleoni fut spolié par Friedrich Kadgien, en même temps que près de mille autres œuvres. Haut fonctionnaire nazi, il était considéré, selon Le Monde, comme l’un des «grands pilleurs de biens juifs». Jusqu’à très récemment, nul ne savait ce qu’était devenu ce chef-d’œuvre.
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Cette semaine, le tableau a été repéré sur les photos d’une annonce immobilière pour une maison à vendre en Argentine. Nombre d’observateurs se sont demandés comment le tableau avait pu voyager aussi loin, certains affirmant qu’il s’agissait sans doute d’une copie. Pourtant, pour qui connait l’histoire de l’Argentine, il n’est pas si surprenant d’y retrouver ce genre de trésors.
Gizmodo explique que l’officier SS Friedrich Kadgien y a fini sa vie, après avoir fui l’Allemagne au moment de la Libération. La maison en question lui appartenait bien, mise en vente par une de ses filles. Le mystère semblait résolu, jusqu’à un nouveau rebondissement: la toile a de nouveau disparu.
« Old master painting looted by Nazis spotted in Argentinian property listing »
https://t.co/NnT0IifTcG— David Perreault (@DavidPerreault) August 28, 2025
Aussitôt retrouvé, aussitôt disparu
«Lorsque la police argentine s’est présentée à la maison pour rechercher le tableau, celui-ci avait disparu», indique Gizmodo. Selon le journal argentin La Capital, les officiers ont trouvé une grande tapisserie représentant un paysage et des chevaux à la place de l’œuvre d’art volée. L’annonce immobilière a, elle aussi, été rapidement retirée par l’agence qui assurait la vente de la maison. La fille de Friedrich Kadgien a quant à elle supprimé ses comptes sur les réseaux sociaux.
Le journaliste Peter Schouten, correspondant en Argentine pour le média néerlandais Algemeen Dagblad, aurait alors tenté de contacter la femme. Elle lui a répondu ne pas savoir de quel tableau il s’agissait, avant de mettre fin à la conversation en prétextant être «trop occupée». L’homme précise toutefois avoir obtenu des photos et des vidéos de l’intérieur de la maison, datant du début du mois, où l’on peut voir distinctement la peinture.
Aucune charge n’a été retenue contre la famille, mais elle pourrait un jour être inculpée pour recel de biens illicites. La belle-fille de Jacques Goudstikker poursuit sans relâche la recherche des œuvres d’art volées à sa famille pendant la guerre. En 2006, après huit ans de procédures judiciaires, le gouvernement néerlandais avait accepté de lui restituer 200 tableaux.
Une victoire symbolique, mais bien insuffisante pour compenser l’ensemble des dommages subis par le marchand Jacques Goudstikker, décédé accidentellement en glissant dans la cale du paquebot à bord duquel il fuyait l’Europe.