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En Angleterre, les manifestations contre les migrants se multiplient. Selon un récent sondage, 45 % des Britanniques soutiennent en effet l’idée d’un renvoi d’un large nombre de migrants. Reportage à Horley, petite ville du Sud, où un rassemblement s’est déroulé devant un hôtel hébergeant des migrants.

Horley est une petite ville calme du sud de l’Angleterre, juste à côté de l’aéroport de Gatwick. Difficile de croire que le 23 août, quelque 200 manifestants anti-immigration se sont rassemblés devant l’hôtel Four Points By Sheraton, à un quart d’heure à pied du centre. Comme dans plus d’une vingtaine de villes du pays, ils sont venus exprimer leur mécontentement face à l’hébergement de demandeurs d’asile en situation irrégulière. Certains habitants en restent encore abasourdis. « Horley est une ville tellement tranquille, il n’y a pas de problème, raconte John Rankin, un volontaire dans un magasin caritatif. J’ai vraiment été surpris d’apprendre qu’une manifestation avait été organisée ici. Je ne savais même pas qu’il y avait des migrants dans l’hôtel ! »

À l’instar des manifestations qui ont eu lieu à Epping (nord-est de Londres) à partir de juillet, la colère des protestataires d’Horley est liée à la condamnation pour agression sexuelle d’un des migrants hébergés sur place. Si certains manifestants ont profité de l’occasion pour soutenir l’activiste d’extrême droite Tommy Robinson et brandir les drapeaux britanniques et anglais, des habitants de la ville ont voulu faire part de leurs craintes.

Glenda a participé à la manifestation du 23 août.

Glenda a participé à la manifestation du 23 août.
DDM – Ch. G.

« J’habite à côté de l’hôtel et je me sens vraiment intimidée par la présence de ces hommes, explique Glenda Macfarlane, une septuagénaire qui a manifesté. J’ai peur de marcher dans la rue. Je prends désormais ma voiture pour aller voir ma fille qui n’habite qu’à 15 minutes de chez moi. On ne sait pas ce que ces hommes manigancent, c’est effrayant… »

« Les jeunes finiront par voter pour Farage »

Ce qui dérange Eileen Cartwright*, venue en ville pour faire ses courses, ce sont surtout les sommes dépensées pour héberger ces demandeurs d’asile. « Je comprends la situation désespérée de ces personnes, mais je suis retraitée et je vais sûrement perdre certaines des aides sociales qui me sont attribuées. Je n’ai rien contre les gens, mais je m’oppose au principe. » Cette Anglaise estime ne pas être la seule à penser de cette manière et s’inquiète de la montée de la xénophobie au Royaume-Uni, alimentée par la crise des migrants. « Nigel Farage, le leader de Reform UK, fait tout ce qui est en son pouvoir pour renforcer ce sentiment, indique-t-elle. Je le déteste ! Mais les jeunes finiront sûrement par voter pour lui et c’est effrayant. »

Ellie Smith, pro-immigration, qui a grandi à 20 minutes de la ville

Ellie Smith, pro-immigration, qui a grandi à 20 minutes de la ville
DDM – Ch.G.

Galvanisé par ces manifestations anti-immigration, le leader du parti d’extrême droite britannique a présenté mardi 26 août un programme d’expulsion massive des demandeurs d’asile entrés de façon illégale dans le pays. Or, selon un sondage de l’institut Yougov paru début août, 45 % des Britanniques soutiennent en effet l’idée d’un renvoi d’un large nombre de migrants arrivés ces dernières années au Royaume-Uni.

« Ces histoires négatives prennent beaucoup trop de place »

Anti-Farage et pro-immigration, Ellie Smith est pour sa part choquée par ces manifestations. Si elle vit à Brighton, cette jeune adulte est venue à Horley pour passer son code et a grandi à 20 minutes de la ville. « Je ne comprends pas qu’on puisse autant être contre les autres, indique-t-elle. Avec la montée de Reform UK, ces histoires négatives prennent beaucoup trop de place dans les médias, ce qui influence énormément l’opinion des gens sur les demandeurs d’asile. Certains commencent même à peindre des croix de St George, le drapeau anglais, sur les ronds-points… C’est ridicule ! »

La jeune femme conteste aussi l’idée que les aides mises en place pour les migrants privent les Britanniques de leurs services publics. « Les demandeurs d’asile ne représentent qu’une petite fraction de la population, indique-t-elle. Le NHS, le service de santé publique, est un champ de ruines indépendamment de l’immigration. C’est ça le vrai problème que le gouvernement devrait régler. »

 

* L’interlocutrice a demandé à changer son nom.