On a connu des timings plus inspirés. Alors qu’il est lancé en pleine croisade contre l’endettement de la France et qu’il a promis de s’attaquer aux avantages indus des élus, François Bayrou va retaper son bureau de maire à Pau. Le chantier, autorisé le 28 juillet par arrêté municipal, sera réalisé grâce à une enveloppe de 40 800 euros de fonds publics, selon une information de Mediapart confirmée par Libération ce vendredi 29 août.

De quoi se poser la question : le locataire de Matignon s’attend-il à regagner plus vite que prévu ses pénates béarnaises ? Depuis qu’il a annoncé vouloir solliciter un vote de confiance le 8 septembre sur son projet de budget 2026, le Premier ministre semble en tout cas bien parti pour réduire le nombre de ses vols Paris-Pau en Falcon de la République.

Auprès de Libé, la mairie de Pau souligne que les travaux n’ont pas encore commencé. Le programme s’annonce chargé dans ce bâtiment datant du milieu du XIXe siècle, à l’origine un lieu de spectacles : il s’agira de déposer le sol pour retrouver le parquet d’origine, réaliser un enduit à la chaux «pour retrouver l’esprit d’antan», remplacer les luminaires… Les ouvriers devront en outre effacer «les ajouts successifs des dernières décennies», tels que les câbles d’électricité, les prises, les interrupteurs, les réseaux basse tension ainsi qu’un climatiseur.

De quoi donner un coup de neuf à l’espace de travail de l’élu centriste, qu’il décrivait en 2021 à Sud Ouest comme «le plus beau de la République». Lustre au plafond, angelot sur la cheminée, vue imprenable sur les Pyrénées… A sa prise de fonction, François Bayrou avait toutefois tiqué sur un détail : la hauteur du bureau en bois d’André Labarrère, de 78 centimètres. «La bonne hauteur d’un bureau est de 73 centimètres, jugeait-il. J’ai demandé aux services de la ville de le remettre à la bonne dimension. Personne ne s’en est rendu compte.»

A l’époque, il rapportait avoir par ailleurs fait refaire toute la mairie, sauf cette pièce. «Je ne voulais pas qu’on dise que je m’occupais de moi avant de m’occuper des autres», soulignait-il.

Auprès de Libé, la municipalité précise que la rénovation de la salle était prévue «de longue date». Il s’agit de la dernière étape d’un projet de restauration de l’hôtel de ville lancé en 2017 et entamé à la suite de l’inscription de l’édifice aux monuments historiques. «On a commencé par les façades, puis l’intérieur avec les accueils du public et les bureaux de l’administration», détaille-t-elle. Un report de ces travaux dans le bureau du maire aurait néanmoins sans doute pu permettre d’éviter le télescopage avec la dramatisation de Bayrou sur les finances publiques françaises.

Concernant l’aspect financier, ces aménagements à 40 000 euros sont qualifiés de «réfection mineure» par la mairie paloise. C’est vrai qu’on est loin des 100 000 euros pour la rénovation du bureau de Mathieu Gallet à Radio France. Pour la municipalité du Sud-Ouest, cette somme représente «0‚88 % du total des travaux réalisés au sein de l’hôtel de ville entre 2017 et 2024». Le budget final s’élevant à plus de 4 millions d’euros. «La Ville de Pau assure un suivi rigoureux de l’entretien et de la mise en valeur du patrimoine protégé dont elle est propriétaire», assure cette même source.

Mais dans son article, Mediapart observe que la commune est globalement «gourmande en travaux». A titre d’exemple, le média relève que son budget de rénovation des bâtiments communaux est passé de 11,2 millions d’euros en 2023, à 19,2 millions en 2025. Plutôt ironique pour la ville d’un Premier ministre qui, en juillet, appelait en particulier l’Etat et les collectivités locales à «montrer l’exemple» en réduisant leur «train de vie».

De même, remarquait le Figaro fin 2024, «l’encours de la dette de la ville de Pau est passé de 60,2 millions d’euros fin 2014 – l’année où François Bayrou a pris le fauteuil de maire – à 110,9 millions d’euros en 2023, soit une dette de 1 440 euros par habitant pour cette commune». La municipalité assure toutefois que la trajectoire est désormais «descendante» avec un encours par habitant «quasi identique» à la moyenne nationale des villes de la même taille. Alors si l’on en croit son propre maire… il va falloir poursuivre les efforts.