Par
Thomas Blanc
Publié le
30 août 2025 à 8h38
La vie quotidienne des personnes handicapées à Marseille demeure « un parcours semé d’embûches », malgré des dispositifs légaux censés garantir leur inclusion, raconte à actu Marseille Kylian, atteint d’une déficience visuelle. C’est même un combat de tous les jours auxquels ils doivent se livrer et cela concerne aussi les parents d’enfants atteints de handicaps, quels qu’ils soient. Entre manque d’accompagnement, d’équipement et d’écoute à l’échelle politique, une association est sur le point d’être créée par Salim Benhaddi, pour défendre les intérêts de ce public. Pour actu Marseille, ils témoignent et veulent faire entendre leurs voix à l’approche des élections municipales qui se tiendront les 15 et 22 mars 2026.
« Marseille n’est pas la pire ville mais ce n’est pas la meilleure »
L’expérience de Kylian, malvoyant depuis quatre ans et récemment revenu dans la cité phocéenne, illustre l’ampleur et les nuances de ses difficultés. « Il faudrait plus de bandes passantes c’est un vrai problème pour se repérer », explique-t-il, impuissant.
Son exemple le plus criant est celui du trajet entre l’intérieur de la gare Saint-Charles et ses fameux escaliers, dépourvu d’un tel équipement alors que « beaucoup de personnes empruntent ce circuit en sortant de leur train », sermonne-t-il.
Kylian évoque aussi, avec tristesse, le déficit d’annonces audios des arrêts dans le tramway et le métro marseillais, « cela se fait dans d’autres villes mais pas à Marseille, c’est dommage. » Malgré des progrès sur certains aspects, il ne saurait qualifier sa ville de naissance de modèle, « Marseille n’est pas la pire ville où j’ai vécu niveau accessibilité mais ce n’est pas la meilleure » admet le jeune homme.
Son choix de revenir s’explique notamment par le tissu social local, il y trouve que « les gens m’aident beaucoup plus ici qu’à Bordeaux où je suis allé habiter, ils sont beaucoup plus solidaires. » Cette entraide compense partiellement les lacunes matérielles et organisationnelles selon lui.
Le patrimoine inaccessible
Plusieurs personnes handicapées interrogées dénoncent l’inaccessibilité des monuments historiques de Marseille qui, pourtant, devraient répondre à l’obligation légale de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits.
L’exemple phare reste la cathédrale de La Major, récemment rénovée, où aucun accès pour les personnes à mobilité réduite n’a été installé et le seul moyen d’accéder au bâtiment reste un escalier d’une dizaine de marches… Les personnes en fauteuil doivent donc rester à l’extérieur.
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Pourtant, d’après Pierre, employé dans l’édifice, « il était bien prévu une rampe de 80 mètres de long sur le côté est de la cathédrale lors de la rénovation » mais l’État, qui gère le bâtiment car monument historique, l’aurait refusé. Une décision qui entérine l’exclusion de certains publics.
Faiblesse du suivi et formations
Les difficultés ne se limitent pas à la mobilité. Lilia, mère de trois enfants porteurs de troubles du spectre autistique, relate son expérience.
Dans la région, il n’y a pas de professionnels suffisamment formés à ce genre de handicap
Lilia
Contrainte de se former par elle-même, au prix fort et souvent à l’étranger — en Pologne notamment — elle estime s’être « battue » mais que malheureusement « beaucoup baissent les bras et n’offrent plus de suivi à leurs enfants faute de professionnels disponibles et formés. »
Ce manque d’accompagnement conduit certains à quitter Marseille. Nadjib, a d’ailleurs vu un membre de sa famille plier bagage. « Mon frère est père de deux enfants autistes, il a préféré partir de Marseille. » Valentin partage une situation similaire, sa tante, hémiplégique, est repartie en Guadeloupe pour trouver un accompagnement et une acceptation du handicap supérieurs à ceux offerts dans la ville.
Ces récits démontrent une forme d’exil imposé, révélatrice d’un écosystème local inadapté.
La peur d’un logement inadapté
La crise du logement social aggrave encore la situation et Marseille particulièrement touché enregistre un retard de 40 000 places en HLM. Selon, Salim Benhaddi, en fauteuil roulant depuis 30 ans et multiple champion handisport, « la conséquence directe de cela pour nous est que si l’on demande une place en logement social en rez-de-chaussée, ce dont on a besoin, on a peu de chance de l’obtenir. »
Les personnes handicapées qui vivent en étage s’en trouvent confinées chez elles, coupées du reste du monde. Il ajoute, « il faudrait plus de logements proches du centre-ville et non dans des quartiers exilés, puisque l’on a de grosses difficultés d’accessibilité dans les transports à Marseille. »
En somme, quel que soit le handicap en question, les personnes concernées ne demandent que le renforcement de l’application de la loi de 2005 censé leur éviter un isolement social.
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