Depuis près d’un siècle, les physiciens tentaient de concilier l’amortissement des oscillations avec le flou fondamental imposé par le monde quantique. Deux chercheurs américains viennent enfin d’y parvenir.

Tableau noir rempli d’équations complexes de physique et de mathématiques, dont E=mc², graphiques, intégrales et symboles atomiques.Un tableau noir saturé d’équations et de schémas illustrant les mystères mathématiques de la physique quantique.

L’oscillateur quantique amorti : un casse-tête né il y a un siècle

Il y a plus d’un siècle, Horace Lamb, physicien britannique, s’est intéressé à un phénomène physique bien connu : la perte d’énergie d’une particule vibrante dans un milieu solide.

Il a alors conçu un modèle toujours utilisé aujourd’hui, dans lequel les ondes générées par une particule freinent son mouvement, à l’image d’une corde de guitare ou d’une balançoire. Ce modèle, appelé oscillateur harmonique amorti, a servi de base à de nombreuses études.

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Cependant, dès que l’on passe à l’échelle atomique, les règles classiques ne tiennent plus. La physique quantique s’impose avec ses propres lois. Notamment, le principe d’incertitude d’Heisenberg interdit de connaître simultanément la position et la quantité de mouvement d’une particule avec précision.

Pendant près de 90 ans, les physiciens ont essayé sans succès de transposer le modèle de Lamb à l’univers quantique sans enfreindre ces lois fondamentales.

Une percée rend enfin possible le modèle quantique de l’oscillateur amorti

Ce blocage historique a été levé par Dennis Clougherty et son ancien étudiant Nam Dinh, affiliés à l’Université du Vermont.

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Le 7 juillet 2025, ils ont publié dans Physical Review Research une solution exacte au problème de l’oscillateur quantique amorti. Cette avancée représente un bond théorique majeur dans notre compréhension du comportement dissipatif à l’échelle atomique.

Pour parvenir à ce résultat, ils ont appliqué une technique mathématique sophistiquée : la transformation de Bogoliubov multimode. Cette méthode permet de représenter les oscillations comme une combinaison d’excitations quantiques, appelées bogoliubons.

Grâce à ce formalisme, ils ont démontré que l’état fondamental du système est un “vide comprimé multimode”, un état quantique où l’incertitude sur la position est réduite, tandis que celle sur la quantité de mouvement augmente.

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Ils ont également mis en évidence que ce modèle quantique respecte les résultats observés dans les systèmes dissipatifs expérimentaux.

Ce lien solide entre la théorie et les observations expérimentales renforce la pertinence de leur découverte. De plus, cette solution exacte ouvre la voie à des simulations plus fiables des systèmes quantiques complexes.

Une avancée prometteuse pour les technologies de mesure ultra-précises

Cet état quantique particulier n’est pas qu’un concept théorique. Les scientifiques l’exploitent déjà dans des instruments de métrologie de haute précision, comme les détecteurs d’ondes gravitationnelles LIGO. Ces dispositifs mesurent des variations de distance mille fois plus petites que le noyau d’un atome.

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Ainsi, la compréhension plus fine de ces états ouvre des perspectives pour améliorer encore la sensibilité des mesures physiques.

En outre, cette percée fournit une nouvelle base théorique pour étudier la dissipation d’énergie en mécanique quantique, un phénomène central dans de nombreuses branches de la physique, allant de l’optique quantique à la chimie moléculaire. Elle pourrait aussi influencer la conception de futurs capteurs quantiques, plus stables et performants.

Ce saut historique en physique quantique marque une étape clé vers une meilleure compréhension du monde microscopique, en établissant un pont solide entre la mécanique classique et les lois de l’infiniment petit.

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