Il y en a pour une décennie sans cependant que cela n’oblige, même temporairement, à le fermer. Sécurité des bâtiments, donc du public et de sa circulation en premier lieu, esthétique et, aussi, une muséographie profondément revisitée en direction de « l’immersif » : la Ville de Saint-Etienne a donné à la presse locale fin mars une vue d’ensemble quant aux lourds travaux engagés au sein de son emblématique musée de la Mine. Cela va coûter – à la Municipalité et ses partenaires publics – environ 11 M€.
Couloir de circulation des visiteurs en début de parcours dont l’enjeu est avant tout la sécurisation. ©If Saint-Etienne / XA
Ils n’étaient pas fait pour durer. Notre époque et nos canons patrimoniaux exigent à l’évidence de les conserver. Un château n’est pas facile – c’est un moindre mot – à maintenir, ne serait que plus ou moins, en bon état. Mais au moins pour les plus solides d’entre eux, leurs pierres de taille n’avaient pas cette vocation seulement utilitaire, par nature temporaire, d’autant plus favorisée par l’irruption du béton moderne il y a 160 ans. Matière devenue quelque peu friable au fil du temps dans un cas symptomatique comme les bâtiments du site Puits Couriot, aujourd’hui « Parc Musée de la Mine ».
« Quand cet ensemble a été conçu (au début XXe siècle pour la plupart du visible actuel même si le début d’exploitation du site est plus précoce, Ndlr), c’était seulement pour la durée d’exploitation estimée à 50 à 70 ans, pas 100, ni 150 ans, encore moins davantage », souligne le maire Gaël Perdriau. Pas de déplacement de la colline, c’est déjà ça, à l’issue des diagnostics effectués en 2021 et 2023 pour expliquer, même en partie, les désordres constatés. Ils tiennent davantage au choix originel des matériaux et à l’usure du temps allié à un sous-investissement chronique dans l’entretien courant des lieux, argue, plus politiquement la majorité municipale à l’adresse des précédentes. Si du neuf a été réalisé juste avant elle, elle estime que cette dégradation n’a pas été suffisamment palliée jusque-là. Il faudra selon elle, penser à mettre plusieurs centaines de milliers par an au rayon budget fonctionnement, parallèlement aux investissements actuels pour éviter un futur bilan analogue issu des diagnostics.
Durant les travaux, le musée est resté et restera ouvert. ©If Saint-Etienne / XA
Une préparation très tatillonne
Sécurité des bâtiments, donc du public et de sa circulation avant tout, esthétique, rénovation des salles visitées et, aussi, une muséographie en grande partie profondément revisitée : la Ville de Saint-Etienne à l’issue de cet état des lieux a lancé en septembre 2024 un long cycle – il devrait s’étaler sur près d’une décennie – de travaux d’une ampleur « jamais vue », assure Marc Chassaubéné, adjoint à la culture. Son coût total est estimé à environ 11 M€. L’ensemble du site a été classé monument historique en janvier 2011. Ce qui implique une préparation et des avancée tatillonnes, sous la supervision de la Drac (Direction des affaires culturelles) ayant impliqué une année 2023 dite « 0 », car seulement consacrée à cette préparation. Mais aussi du coup, des aides conséquentes de l’Etat, voire du Feder (fonds européen) et, en fonction des types d’aménagements qui les concernent, des collectivités locales comme le Département ou la Région. Ces dernières ont respectivement accordé 200 000 € et 40 000 € sur cette première tranche de travaux actée. Elle, qui totalise 5,55 M€ HT dont moins de 50 % à la charge directe de la Ville (l’Etat a accordé sur celle-ci 1,2 M€ de subventions) visée par cette dernière.
Vue fin mars sur le parc Sanguedolce depuis la passrelle d’accès au chevalet qui témoigne en suface des travaux menés sur la galerie souterraine. ©If Saint-Etienne / XA
« Il y a eu des recherches scientifiques pour retrouver certains matériaux afin que la rénovation soit fidèle à l’originel, souligne Marc Chassaubéné. Je pense, par exemple, au carrelage de la salle des Pendus dont le sol se soulève et du coup le craquèle. » Recherche dans ce cas qui a été jusqu’à la bonne colle à utiliser. Idem quand il a fallu faire retrouver la bonne couleur du portail d’entrée, tel qu’il la présentait à la veille de la Première Guerre Mondiale. Architecte engagé par la Ville sur le projet, Laurent Volay de l’agence lyonnaise spécialisée Archipat abonde en soulignant que l’exigence patrimoniale de la Drac encadre jusqu’au moindre coup de pinceau effectué. Ce qui explique, entre autres, au-delà de l’ampleur des surfaces à traiter (environ 6 000 m2 planchers cumulés, même si certaines zones ne sont pas concernées) la longueur de la mise en place.
Plusieurs phases successives
Si le diagnostic a donc heureusement établi qu’un déplacement de colline n’était pas leur responsable, il a pointé des désordres conséquents en particulier dans les zones de parcours du public, y compris le clou de la visite, la fameuse galerie souterraine simulant à quelques mètres sous terre des galeries de mine profondes. Dilatation des armatures métalliques, béton en déliquescence et infiltrations d’eau menaçaient toujours en peu plus la solidité des structures et toitures, donc la sécurité. Il est fait appel à des entreprises locales pour y remédier : pour les principales, à ce stade, les Foréziens spécialisés dans le patrimoine de la société Comte ou encore les Stéphanois de Beaufils couverture.
Laurent Volay de l’agence lyonnaise spécialisée Archipat dans la salle des Pendus. ©If Saint-Etienne / XA
L’ensemble fait l’objet de plusieurs phases successives : la première, entamée il y a donc 7 mois, présentait fin mars des éléments visibles dès l’entrée avec cette intervention en cours sur le fameux portail dont le linteau menaçait de tomber ou encore la galerie souterraine avec ces « stigmates » des interventions alors encore observables en surface (l’engazonnement devait se dérouler dès ce printemps) dans le parc Sanguedolce qui s’étale aux pieds des bâtiments et de l’emblématique chevalet du puits Couriot. Durant cette première phase, d’autres interventions ont eu lieu, ont lieu, ou vont prochainement avoir lieu sur les soutènements en bois de la galerie, les zones de circulation du public, des cuves en béton, le chevalet, les toitures… Ce sera ensuite au tour de la salle des Pendus, de la lampisterie et de la salle des machines…
Côté muséographie, une évolution très notable annoncée
Plus tard encore, la cour d’honneur, de toitures, verrières et de quelques salles inaccessibles au grand public. Côté muséographie, c’est une évolution très notable, élaborée, dit la mairie, en lien avec les associations au premier rang desquelles Les Amis du Musée de la Mine, qui doit entrer en scène à partir de 2026 pour se mettre progressivement en place. Depuis décembre dernier, le parcours de visite compte déjà un nouvel élément introductif modernisé qui s’organise en trois espaces. Intitulé « Le charbon, une épopée du territoire », il retrace l’histoire de la roche de l’ère carbonifère à son exploitation par l’homme. Avec ces nouvelles salles, c’est aussi le numérique et « l’expérience immersive » qui ont pu faire un peu plus leur trou au musée. Cette expérience immersive va continuer à s’enrichir en prenant place au milieu de la galerie souterraine avec l’installation d’une simulation d’une catastrophe minière – un « Coup de grisou » bien sûr – en réalité augmentée inspirée par la présentation d’une exposition préalable.
Ce ne sera pas du sensationnalisme à tout prix aux dépens des explications scientifiques et de l’authenticité de ce qui doit être transmis.
Marc Chassaubéné, adjoint à la culture de Saint-Etienne
De quoi proposer une offre phare et renouvelée espérée concrète pour les visiteurs dès la fin 2026. Quant au parcours dans les galeries reproduites dans une logique chronologique, il restera mais forcément, les silhouettes en carton ont fait leur temps. Là aussi, la scénographie sera revue en essayant de coller aux dernières technologies qui évoluent très vite dans ce milieu sans pour autant tomber dans « le sensationnalisme à tout prix aux dépens des explications scientifiques et de l’authenticité de ce qui doit être transmis », promet Marc Chassaubéné. Pas de fermeture à prévoir durant cette longue phase de mise à jour pour ce qui reste un de sites touristiques les plus visités de la Loire. Peut-être, aussi, matériellement le plus symbolique de l’identité stéphanoise.