C’est la série évènement de la rentrée à la télévision. À partir du 1er septembre, France 2 diffuse six épisodes de « Surface », d’après le livre d’Olivier Norek. L’auteur, aveyronnais de cœur, revient sur la genèse de ce polar avec le thème de la résilience en toile de fond et son adaptation à la télévision. Il a adoré.

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« Lorsqu’elle se fit enfin face, elle ne reconnut rien. Personne. » (Extrait de Surface d’Olivier Norek, éditions Michel Lafon). La capitaine de police Noémie Chastain, brillante enquêtrice de la PJ parisienne, voit sa vie basculer lors d’une intervention qui tourne mal. Une balle reçue en plein visage la défigure à jamais.

Sa hiérarchie la met au placard, ses blessures physiques et psychologiques dérangent, en l’envoyant dans l’Aveyron, dans un village sans histoire. Une mission sans éclat, observer un commissariat bien peu débordé dans le but de le fermer.

Lorsqu’elle se fit enfin face, elle ne reconnut rien. Personne.

Extrait de Surface d’Olivier Norek, éditions Michel Lafon

Elle peine à trouver sa place face à des habitants méfiants. Pourtant, tout va changer brutalement quand, à l’occasion de la vidange d’un lac artificiel, un fût contenant des ossements humains refait surface. L’affaire remonte à plusieurs années : la disparition mystérieuse d’un enfant du village, jamais élucidée. Noémie va mener l’enquête, se heurtant aux silences et secrets des habitants. Parallèlement, elle va entamer sa propre reconstruction…

Sorti en 2019 (500 000 exemplaires vendus et réédité à l’occasion), Surface est le premier livre d’Olivier Norek adapté à la télévision. La série évènement de la rentrée est déjà disponible sur France.tv et sera diffusée sur France 2 à partir du lundi 1er septembre à 21h10 (deux épisodes chaque lundi jusqu’au 15 septembre).

Une héroïne singulière, une solide et passionnante intrigue policière, de la puissance émotionnelle.

Iris Bucher et Roman Turlure, les producteurs pour France Télévisions

« Le best-seller Surface d’Olivier Norek avait tout pour séduire un producteur de séries : une héroïne singulière, une solide et passionnante intrigue policière, de la puissance émotionnelle, » assurent iris Bucher et Roman Turlure, les producteurs pour France Télévisions.

Laura Smet joue Noémie, sombre et teigneuse, à la moitié du visage ravagée. Pas besoin de forcer le trait : « la faille est apparente », soulignait l’actrice lors d’une conférence de presse en juin. Elle est entourée notamment de Théo Costa-Marini dans le rôle du collègue bousculé par son arrivée, et de Tomer Sisley dans celui du plongeur de la brigade fluviale, obstiné et sensible.

Les co-scénaristes Marie Deshaires et Catherine Touzet ont dû opérer des choix radicaux pour faire tenir l’intrigue en six fois 52 minutes, et captiver le téléspectateur. La série a été tournée dans une piscine géante à Bruxelles et entre les départements du Tarn et de l’Hérault.

C’est votre premier livre qui est porté à l’écran. Quelle est votre réaction ? 

Ça s’est fait en plusieurs parties. D’abord, on a les rushs, on voit à peu près ce que va être la série, donc on a beaucoup d’espoir. Le casting est formidable. La réalisation : j’ai l’impression que c’est vraiment du cinéma à la télévision. Les images sont magnifiques. Et puis après, j’ai regardé les six premiers épisodes en une seule fois. C’est le moment où l’auteur regarde les libertés qui ont été prises avec son roman. Et puis on voit que ça marche.

Ensuite, on regarde encore une fois les six épisodes pour être sûr et certain que tout est bien. J’’ai profité d’un passage dans l’Aveyron où je suis venu voir mes parents. On a regardé les six épisodes ensemble sur le streaming de France Télévisions. Et là, c’est la validation de la famille.

Si on avait voulu faire le livre en entier avec exactement tout ce qui se passe, il aurait fallu entre douze et quinze épisodes. Donc évidemment, il doit y avoir des raccourcis, il doit y avoir des changements.

Maintenant, j’attends avec impatience la diffusion à la télévision à partir du 1er septembre. Mais déjà, je suis totalement conquis par cette adaptation. J’ai reçu près de mille messages sur les réseaux sociaux qui disent que oui, effectivement, parfois, des libertés ont été prises, mais c’est pour le mieux parce que ça s’intègre parfaitement dans la narration en six épisodes. Si on avait voulu faire le livre en entier avec exactement tout ce qui se passe, il aurait fallu entre douze et quinze épisodes. Donc évidemment, il doit y avoir des raccourcis, il doit y avoir des changements. Mais là visiblement, tout le monde est content et moi le premier.

Est-ce que vous vous sentez un peu dépossédé de votre œuvre ?

Pas du tout. C’est comme le concept de l’héritage à un moment donné. C’est une décision qu’on prend. Je ne me sens pas dépossédé parce que j’ai été contacté à toutes les étapes de la création. Cette histoire ne m’appartient pas. C’est une histoire que j’ai inventée et de toute façon et j’en suis déjà dépossédé dès le moment où le roman arrive dans les librairies.

J’ai beau écrire ce roman avec mes images, mes ambiances et mes musiques et bien chaque lecteur et chaque lectrice devient son propre réalisateur. Chaque lecteur et chaque lectrice se fait une idée des personnages, du lieu, avec sa propre banque d’images personnelles. C’est-à-dire que vous et moi, on a beau partager les mêmes livres dans notre bibliothèque, ce sont des livres différents parce que le lecteur est obligé de devenir réalisateur quand il lit, qu’il est obligé d’inventer des images.

Olivier Norek a publié "Surface" en 2019.

Olivier Norek a publié « Surface » en 2019.

© Delphine Blast / www.delphineblast.com

Sliman-Baptiste Berhoun, qui est le réalisateur, explique : « Porter Surface à l’écran représentait une trahison obligatoire, mais assumée ». C’est un petit peu ce que vous dites : faire des choix obligatoires et ne pas pouvoir raconter tout le livre ?

Tout à fait. C’est une manière de célébrer une histoire qui a plu et d’en donner différentes versions. Donc ce n’est pas une trahison, c’est une autre version. Ce n’est pas une trahison, c’est la vision de Baptiste Sliman-Berhoun. C’est comme si un lecteur me disait : « Moi, cette héroïne, Noémie Chastain, je ne la voyais pas rousse, je la voyais brune ». Ce n’est pas une trahison pour moi, c’est l’adaptation de chacun des lecteurs et des lectrices. En fait, on rebondit sur ce vieux dicton qui dit : Une adaptation, c’est une trahison. C’est une trahison quand c’est très mal fait. Là, pour le coup, ce n’est pas une trahison.

Il faut proposer deux spectacles différents. Le spectacle de la littérature est beaucoup plus en introspection. On est vraiment à l’intérieur des personnages. Le spectacle de la télévision ou du cinéma, lui, est en images.

Olivier Norek, auteur du livre « Surface »

Vous avez déjà été scénariste, notamment sur Engrenages. Auriez-vous pu écrire vous-même cette adaptation?

Tout à fait, évidemment, mais je n’aurais été capable que de donner l’exacte même version du roman. Est-ce que c’est ce qu’on cherche quand on va voir un film qui vient d’un bouquin ou quand on va voir une série qui vient d’un bouquin ? Moi, je pense qu’il faut proposer deux spectacles différents. Le spectacle de la littérature est beaucoup plus en introspection. On est vraiment à l’intérieur des personnages. Le spectacle de la télévision ou du cinéma, lui, est en images.

Surface est votre premier ouvrage porté à l’écran, mais il va y en avoir d’autres …

Oui, « Dans les brumes de Capelan » est déjà bien lancé avec Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte, qui sont quand même les deux scénaristes et réalisateurs du Comte de Monte-Cristo, donc ce n’est pas rien. Le tournage va commencer en janvier.

Puis le producteur du Comte de Monte-Cristo a obtenu les droits de mon dernier livre « Les Guerriers de l’hiver ». C’est une production qui, d’après Dimitri Rassam, serait équivalente au double du Comte de Monte-Cristo. Donc, vous imaginez bien que, quand un producteur décide de faire un film comme ça, c’est sa boîte de production en entier qu’il met en danger. Je lui en suis très reconnaissant parce qu’il faut énormément de courage pour se lancer dans des choses aussi grandes. Mais aujourd’hui, Dimitri Rassam est un des seuls à être capable de faire un film pareil avec une production aussi gigantesque. J’ai toute confiance.

Pour en revenir au livre « Surface », c’est une histoire imaginée en hommage à une collègue blessée en intervention ?

Oui, un jour, une amie, une collègue policière est tombée dans un guet-apens en plein milieu d’une cité. Ils étaient une poignée de policiers en face d’une soixantaine de gamins de cité et ils se sont fait accueillir avec des battes de baseball et barres de fer. Elle a été lourdement blessée. Elle a cru qu’elle y restait et son visage a été abîmé, défiguré, c’est le mot. C’est toujours dur d’utiliser ce mot quand je pense à elle.

Tout le monde autour d’elle, ses amis comme sa famille, se disait : Mais mon Dieu, elle ne remontera jamais à la surface. Et pourtant, moi, j’ai assisté à son courage et à sa détermination. À peine, disons, réparée, elle a été intégrée dans un autre service qui est le service de la canine. Pourquoi ? Parce que les chiens ne jugent pas, les chiens ne regardent pas, les chiens, ils aiment.

Là, elle a pu se reconstruire. Et puis après, elle a intégré un service de crime, qui est, disons-le clairement, un des services d’élite de la police judiciaire. En à peine trois ans. J’étais tellement intimidé, éberlué, stupéfait de sa force que je me suis dit : Mais un jour, si je pouvais créer un personnage aussi fort qu’elle, ce serait fabuleux.

Et puis un jour, j’étais dans l’Aveyron en balade au barrage de Sarrans avec mes parents. Et je me retrouve comme ça devant ce village anciennement englouti dont on voyait encore les ruines et parfois les routes. On avait donc la possibilité de marcher dans ce village parce que le lac avait été vidé avec ce sentiment, comme ça, de marcher dans le passé. On voit les gens sortir et rentrer des maisons comme si c’était des fantômes. On les imagine, on imagine la vie à l’intérieur.

Je me suis dit : Tiens, ça pourrait être intéressant d’écrire un bouquin avec un lac qui enferme un village sous l’eau et parallèlement, un village jumeau qui a été construit à côté. Et je me suis dit : mais il faudrait que j’aie un personnage qui lui aussi, ou elle aussi, ait quelque chose en dessous de la surface et au-dessus de la surface. Et c’est là que ma collègue est revenue à mon esprit et j’ai mélangé les deux.

Et puis je me suis dit : Mais ce serait tellement formidable que de l’écrire à Decazeville. Ce serait tellement formidable de pouvoir aussi faire une révérence à ce département qui n’est pas mon département de naissance, mais qui est mon département de cœur, l’Aveyron.

C’était l’occasion de faire une enquête de police sous des millions de litres d’eau, c’était quelque chose qui n’avait pas été écrit. Et donc, voilà que nos policiers font des perquisitions sous l’eau, des recherches de traces et indices sous l’eau. En fait, ils enquêtent comme dans une enquête normale, mais sous trente mètres d’eau.

Couverture de la nouvelle édition de "Surface" d'Olivier Norek. Editions Michel lafon

Couverture de la nouvelle édition de « Surface » d’Olivier Norek. Editions Michel lafon

© Editions Michel Lafon

Surface est un polar, mais c’est aussi peut-être et surtout un récit sur la résilience ?

Oui, tout à fait. Mes polars ont toujours été des alibis. Oui, c’est évidemment l’histoire de la recherche sur un cold case. Mais le cold case, c’est quoi ? C’est une enquête sur laquelle on n’a pas de trace, pas d’indices. Donc, il faut aller dans la mémoire des gens.

Et ce qui est formidable, c’est que mon personnage principal, Noémie, elle est défigurée. Donc elle, la seule chose qu’elle veut, c’est se cacher, cacher son visage. Et pourtant, l’enquête va la forcer à aller vers les gens. Elle comprend rapidement que pour résoudre cette enquête, il va falloir qu’elle s’accepte, qu’elle se répare et qu’elle se reconstruise. Donc en fait, l’intime, le personnel est mélangé à l’enquête policière.

Olivier Norek, sur quoi travaillez-vous actuellement ?

Alors actuellement, je suis toujours dans la promotion des Guerriers de l’hiver. Je vais commencer la promotion internationale. Je pars en Finlande le 3 septembre. Je vais retrouver là-bas les descendants de mon personnage principal, les derniers combattants de la guerre d’Hiver. Alors, vous imaginez, Ils sont tous centenaires. Je vais avoir cette chance-là de poursuivre cette aventure, mais cette fois-ci dans le pays d’où vient l’histoire.

Je marche dans la campagne et j’essaie de trouver ce que pourrait être mon avenir artistique et littéraire.

J’imagine, avec tout ce programme, vous n’avez pas trop le temps pour l’instant d’écrire votre prochain livre ?

Voilà, c’est exactement ça. Vous avez mis le doigt sur ce qui me hante jour et nuit, c’est réussir à trouver une demi-heure, une heure pour essayer de réfléchir à ce que je vais pouvoir écrire après.

Mais c’est vrai que, quand on vient de terminer un livre aussi gigantesque que Les Guerriers de l’hiver, je ne parle pas de mon livre, ni de ma qualité d’écriture, ni rien, je parle de cette histoire que j’ai eu la chance de découvrir. Quand on a la chance d’avoir entre ses mains une histoire aussi grande, les histoires d’après deviennent un peu fades et donc j’essaye de retomber amoureux d’une histoire aussi grande.

Et c’est vrai que pour l’instant, le polar ne me séduit pas assez. J’imagine que ça doit arriver à tous les auteurs et à toutes les autrices. À un moment donné, on est un peu flottant, on ne sait pas trop vers quoi on va se tourner. Donc, quand je suis dans ces moments-là de doute et de perplexité, je monte dans le train Gare d’Austerlitz et en sept heures, je suis dans l’Aveyron, je passe du temps avec mes parents, je marche dans la campagne et j’essaie de trouver ce que pourrait être mon avenir artistique et littéraire.