En défiant les Irlandaises dimanche, les Leonas ont une carte à jouer pour mettre la lumière sur le rugby espagnol.
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France Télévisions – Rédaction Sport
Publié le 31/08/2025 07:00
Temps de lecture : 7min
L’Espagnole Claudia Pena Hidalgo contre la Nouvelle-Zélande à York (Royaume-Uni), le 24 août 2025. (ADRIAN DENNIS / AFP)
Moins de 10 000 pratiquantes en Espagne, 7 663 exactement selon les chiffres de la fédé de 2023. Le rugby se cherche encore une place de l’autre côté des Pyrénées. Alors que Laura Delgado Dueñas et ses coéquipières affrontent l’Irlande, dimanche 31 août, à York, la fédération espagnole de rugby multiplie les plans de développement pour imposer l’ovalie sur son territoire et intégrer le cercle très fermé des meilleures nations, hommes et femmes confondus. Une victoire dans cette Coupe du monde en Angleterre serait une étape cruciale pour les Leonas, qui ont franchi une première marche en inscrivant un essai contre les championnes du monde néo-zélandaises dimanche dernier (8-54).
Les joueuses de rugby espagnoles sont encore bien loin de pouvoir tutoyer les cadors de leur sport, malgré une septième participation en Coupe du monde cette année, depuis 1991. « C’est un sport assez confidentiel, explique à franceinfo: sport Marie Sempéré, ancienne internationale et consultante pour TF1. Les Espagnoles évoluent sur le tournoi B ou C (le WXV3 actuellement) et celles qui jouent dans leur pays sont toutes amatrices. Elles ont un métier ou sont étudiantes ». Ce qui ne les a pas empêchées de remporter le Rugby Women’s Europe championship, la compétition B en Europe, cette année, avec un groupe largement reconduit en Angleterre.
« Elles vont faire souffrir du monde : les Irlandaises, les Japonaises…, analyse Eric Lamarque, ancien cadre technique à la FFR et entraîneur adjoint de la sélection masculine espagnole entre 2010 et 2012. Ce sont des bonnes joueuses, c’est juste que l’Angleterre et la Nouvelle-Zélande sont intouchables« , note-t-il.
En effet, nos cousins ibères, où le ballon ovale a débarqué il y a une centaine d’années, n’ont pas encore misé sur ce sport pourtant typique dans les régions du sud-ouest de la France, limitrophes de l’Espagne. Mais les choses pourraient rapidement changer. En montant un dossier de candidature pour l’organisation du Mondial masculin en 2035 et féminin en 2037, la fédération espagnole a marqué des points de crédibilité auprès de World Rugby, et a déjà lancé plusieurs plans pour installer durablement le rugby espagnol sur la scène mondiale. « Si World Rugby confie à l’Espagne l’organisation de ces deux compétitions, nous sommes certains d’offrir, avec passion, une Coupe du monde incroyable », a promis le vice-président de la Fédération espagnole de rugby, Gabriel Sanchez à Rugby Confidential.
C’est notamment le cas du côté des femmes avec le plan « Mujeres en Rugby 2024-2027 » qui vise à faire grossir rapidement le vivier espagnol et à accompagner les clubs pour ouvrir des sections féminines. « Pour l’instant, les Espagnoles sont à des années-lumière de ce que propose la France, ou même l’Italie ou le pays de Galles, analyse Marie Sempéré. Elles doivent encore être au stade où quand tu pars sur des compétitions comme la Coupe du monde, tu dois prendre des congés sans solde ». Une exposition mondiale, notamment médiatique, comme peut l’apporter une Coupe du monde, pourrait permettre une avancée majuscule.
« Il y a déjà un petit public de rugby en Espagne, mais pour l’heure, les matchs ne sont pas télévisés, ou alors sur des canaux confidentiels, sur les réseaux sociaux ou en ligne »
Eric Lamarque
à franceinfo: sport
Les quelques têtes d’affiche qui jouent à l’étranger sont aussi un atout, à l’instar de la capitaine Laura Delgado Dueñas, qui joue dans le championnat anglais depuis 2020, avec une pige du côté de la Nouvelle-Zélande en 2022. « Quand tu vas sur la Premiership, c’est quand même que tu as un bon niveau », concède Marie Sempéré, elle-même ancienne internationale française.
L’Espagnole Laura Delgado plaque la Néo-zélandaise Ayesha Leti-Iiga à York, le 24 août 2025. (ANNA GOWTHORPE/SHUTTERSTOCK/SIPA / SIPA)
Mais l’ancienne pensionnaire de Tarbes (2016-2017) fait figure d’exception dans le collectif des Leonas et, à 35 ans, elle a d’ailleurs annoncé qu’elle mettrait un terme à sa carrière internationale après la Coupe du monde en Angleterre. « Avec leurs moyens, elles restent une équipe intéressante à jouer », complète Marie Sempéré, qui a eu l’occasion de les affronter à VII comme à XV.
La néo-retraitée française Caroline Drouin, qui a eu l’occasion d’affronter les Espagnoles à VII, se remémore pour franceinfo: sport ces oppositions. « Jusqu’à Tokyo, c’était une équipe très ‘challengeante’. On gagnait mais on savait que ça pouvait être des matchs piège. Elles ne lâchaient rien, avaient beaucoup d’appuis ». La vice-championne olympique de Tokyo ajoute que, depuis, un changement générationnel est en cours, ce qui fait que l’équipe espagnole n’a plus le même niveau. « Mais il y a du talent, assure-t-elle. Et elles pourraient de nouveau être très compétitives dans les années à venir ».
La buteuse espagnole Amalia Argudo, le 24 août 2025. (DANNY LAWSON / MAXPPP)
L’arrivée du rugby dans le giron olympique y est pour quelque chose d’après Eric Lamarque. « En 2007, le rugby à VII entre aux JO, et là, les autorités de gouvernance espagnoles ont mis de l’argent pour des contrats fédéraux ». C’est le début de la professionnalisation du rugby en Espagne, qui n’a pas vraiment ricoché sur le XV, même si les Espagnoles peuvent également s’appuyer sur des jeunes pousses, à l’image d’Amalia Argudo, 25 ans, pensionnaire du Stade Toulousain depuis 2016, et sur les équipes de jeunes. « Ce sont des joueuses qui font grandir le rugby espagnol », note Marie Sempéré. Un rugby espagnol qui frappe de nouveau à la porte du tournoi des Six nations.
« Quand j’ai commencé en France A, l’équivalent des U20 aujourd’hui, j’ai joué contre l’équipe d’Espagne », se souvient Marie Sempéré. A l’époque, les Leonas avaient été sorties du Six Nations en 2006, remplacées par les Italiennes et comme il n’y avait pas de circuit européen B, elles jouaient contre les moins de 20 ans françaises et anglaises, et les Pays-Bas. « Ça a été un gros coup d’arrêt pour le rugby féminin en Espagne », concède Eric Lamarque.
Comme les hommes qui plaident pour une intégration au Tournoi, peut-être avec la Géorgie pour un « Eight nations », les femmes aimeraient profiter de l’aubaine pour réintégrer le tournoi 20 ans plus tard. Pour l’heure, elles doivent ferrailler avec les Irlandaises et les Japonaises pour espérer croiser le groupe de la France en quarts de finale. Une possibilité ? Pour Eric Lamarque, « elles seront un peu faibles sur le paquet d’avant et sur la vitesse de jeu, car elles n’ont pas l’habitude, mais contre les Japonaises comme contre les Irlandaises, elles vont exister ».