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Pour « éponger une dette », elle a décidé de passer à la vitesse supérieure. Une jeune femme et son frère étaient jugés à Toulouse pour trafic de drogue.

Dans l’imaginaire collectif, les trafiquants de stupéfiants sont souvent des hommes. À Toulouse, c’est une femme de 25 ans, Nora, qui a pourtant pris les commandes. Elle comparait devant le tribunal correctionnel pour avoir dirigé un réseau de revente de résine de cannabis, épaulée par son frère Hicham.

Tout débute le 16 novembre 2023. Les enquêteurs reçoivent un renseignement anonyme signalant une « Nora » qui, via Telegram, organiserait des livraisons de cannabis dans la Ville rose et jusqu’au parking d’un McDonald’s de Blagnac.

La surveillance confirme rapidement l’information. Au-delà, les policiers repèrent une vieille caravane à Saint-Jory, louée par la jeune femme, utilisée comme entrepôt clandestin. Ils observent des allées et venues suspectes, sacs blancs à la main, remis à des conducteurs.

« J’avais une dette à rembourser »

Le 1er décembre 2023, l’opération est déclenchée. Nora et Hicham sont arrêtés en sortant de la caravane avec 4,5 kg de résine. À l’intérieur, les policiers découvrent 28 kg supplémentaires, du matériel de conditionnement, une arme de poing, 35 g de cocaïne et des munitions. Les perquisitions permettent aussi de mettre la main sur de nombreuses cartes SIM et 1 400 € en liquide.

Quatre autres personnes sont mises en cause : deux jeunes livreurs recrutés via Snapchat, le propriétaire de la caravane – déjà condamné à 17 reprises – et un individu dont l’ADN est retrouvé sur l’arme et des emballages.

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À l’audience, Nora assume face à la présidente du tribunal correctionnel, Gonca Murat : « En principe j’avais entre 3 et 5 kg. Mais j’avais une dette et j’ai décidé pour la rembourser plus vite d’acheter en gros et de revendre à prix cassé ».

Fragilisé par une consommation excessive de protoxyde d’azote, Hicham explique avoir suivi les directives de sa sœur durant une quinzaine de jours. Endetté, il dit avoir subi des violences de la part de ses créanciers, qui l’ont passé à tabac et plongé dans un coma de plusieurs semaines.

« Chef de qui, chef de quoi ? »

Les livreurs, eux, minimisent : « On a vu une annonce sur Snapchat, 100 € la journée de livraison », racontent-ils. Quant au propriétaire de la caravane, il admet détenir la cocaïne et les munitions mais nie toute implication dans le trafic. « Je suis consommateur, pas vendeur », clame-t-il, malgré des messages retrouvés dans son téléphone faisant état de « livraisons plus rigoureuses ».

Le procureur insiste sur « des quantités considérables » et requiert : quatre mois sous bracelet pour les livreurs, douze mois aménageables pour Hicham, deux ans dont un ferme pour Nora, trois ans ferme pour le propriétaire de la caravane.

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En défense, les avocats contre-attaquent. Me Sarah Nabet-Claverie, qui
représente la fratrie, évoque d’abord le “syndrome du sauveur” : sa cliente aurait voulu assumer les dettes de son frère. “Dès la garde à vue, elle prend tout sur elle, même ce qui semble impossible”, insiste-t-elle, avant de relativiser son rôle : « Chef de qui, chef de quoi ? ».

Prison ferme

Vient ensuite Me Sébastien Delorge, conseil d’un prévenu plus en retrait. Son client, originaire d’une autre région, n’est impliqué qu’en raison d’une trace ADN retrouvée sur une arme. Pour lui, la relaxe s’impose : « On n’a jamais eu de démonstration, seulement des poussières d’éléments. C’est l’illusion confortable de la certitude. »

Enfin, Me Marjolaine Grouteau prend la parole pour le propriétaire de la caravane. Elle dénonce des réquisitions fondées sur le casier judiciaire de son client plutôt que sur des preuves tangibles : « On part d’une présomption de culpabilité pour requérir trois ans de détention. »

Après délibéré, le tribunal tranche. L’un des livreurs écope de quatre mois ferme, l’autre de 105 heures de travail d’intérêt général. Nora est condamnée à 18 mois ferme (et 6 avec sursis), son frère à un an ferme. Le propriétaire de la caravane quant à lui écope de neuf mois de prison. Tous ressortent libres, leurs détentions provisoires couvrant les peines prononcées.