L’expérimentation a commencé la rentrée dernière dans cinq écoles niçoises, cinq collèges du département et deux lycées de la région. Comme convenu, elle se poursuit cette année dans les mêmes établissements. Mais avec un avis mitigé des élèves et parents. Elle est présentée comme une des solutions au mal-être à l’école par la rectrice de l’académie de Nice. « La tenue unique peut créer un sentiment d’appartenance à un groupe et faire disparaître certaines différences qui peuvent parfois être à l’origine de harcèlement », a déclaré Natacha Chicot, lors d’une conférence de presse, vendredi dernier.
« C’est rapide pour s’habiller le matin »
À Nice, l’école primaire Ronchèse fait partie des écoles test pour ces tenues communes: tee-shirts, polos et pulls sont fournis à chaque élève. Lundi 1er septembre, jour de rentrée, les parents des nouveaux arrivants ne semblaient pas informés et les uniformes n’étaient pas distribués. Un petit couac technique, explique la Ville, rapidement réglé. Devant l’école, l’avis sur le dispositif est plutôt positif. « Ce n’est pas un mal que les enfants soient habillés de la même façon, Pour les marginalisés, ça crée un sentiment d’intégration », estime Sarra. Même si elle reconnaît que ce sera plus dur pour sa fille, qui entre au CP. « Elle aime être élégante et va sûrement râler parce que ça va cacher son beau tee-shirt », craint-elle.
D’autres parents vantent les repères que peut permettre de créer l’uniforme pour les enfants anxieux. « Et puis c’est rapide pour s’habiller le matin! J’ai toujours envié les écoles privées qui avaient ça, c’est élégant. La majorité est contre. Pourtant, ma fille a été harcelée en maternelle parce qu’elle ne portait pas de marque: elle n’aurait pas eu ce problème avec l’uniforme », estime Gratienne. Sa fille Letizia est entrée en CM2, portant son t-shirt fourni l’année dernière. « C’est bien, sauf quand il fait chaud! », lance-t-elle. Car les tenues bleu foncé logotées « Académie de Nice » ont tendance à attirer le soleil.
« Tu viens en cours, t’es fade! »
Au lycée professionnel Les Palmiers de Nice, c’était lundi la prérentrée des élèves de seconde. L’établissement leur a remis polos ou pulls qu’ils doivent porter dès ce mardi, avec un pantalon personnel bleu, gris ou noir. Si la qualité du textile a l’air au rendez-vous, l’avis des élèves est mitigé. « C’est chiant qu’on ne puisse pas s’habiller comme on veut. Avec ces uniformes, c’est compliqué de laisser s’exprimer notre personnalité », déplore Selena. « D’autant qu’on dit que c’est pour qu’il n’y ait pas de discrimination, mais on est assez grands pour savoir qu’il y a des gens sans moyens et ne pas se moquer. Et la marque des chaussures peut jouer aussi », renchérit Israa, son amie.
Noémie, elle, vient d’un collège qui imposait déjà l’uniforme et s’y est facilement accommodée. « Ça évite que certaines personnes viennent avec des tenues vulgaires », observe-t-elle. Sasha, inscrite en CAP Mode, de longs cheveux rose bonbon et t-shirt très court, ne voit pas l’intérêt. « On se ressemble tous! Tu viens en cours, t’es fade, il n’y a pas de couleurs, aucune différence », tacle-t-elle. « Justement, ça fait un établissement uni et on voit qu’on est tous égaux », lui rétorque religieusement Claudia. Vaste débat…
« Ça n’a rien changé »
En revanche, pour la FCPE, une des associations de parents d’élèves, l’uniforme à l’école, c’est non. « Certains enfants grandissent et leurs uniformes deviennent trop petits dans l’année. De toute façon, les différences sociales se retrouvent ailleurs. Après un an, ça n’a rien résolu du tout. C’est juste de l’argent public gaspillé, car rien ne remplacera la présence de personnel formé », critique Khadija El Ouahabi, la présidente de la fédération dans les Alpes-Maritimes.
La tenue ne coûte rien aux familles car tout est pris en charge par l’État (à hauteur de 100 euros par élève) et les collectivités. Dans les collèges, le montant total pour l’année écoulée s’élève à 474.000 euros, pour un coût par élève de 242 euros et un « bilan très positif », selon le Département.
Dans les lycées, l’État donne « 220.000 euros sur un total de 500.000 euros engagés par la Région « , chiffre Véronique Borré, vice-présidente de la Région. En début d’année, plusieurs collectivités avaient menacé de cesser l’expérimentation, faute de perspective de financements. L’État s’était alors engagé à accorder des crédits pour la poursuite de l’expérimentation. « Si les résultats sont concluants, elle pourra conduire à une généralisation dans tous les établissements scolaires en 2026 », précise le ministère.