En apparence anodins, le paracétamol et l’ibuprofène, largement utilisés à travers le monde, pourraient contribuer à une crise sanitaire mondiale liée à la résistance antibiotique.

Boîtes et plaquettes de Doliprane 500 mg posées sur une table en bois.Le Doliprane, largement utilisé en France, est au cœur des préoccupations concernant les effets de la surconsommation d’antalgiques – DailyGeekShow.com

Une nouvelle étude publiée dans Nature remet en cause notre consommation banalisée de ces antidouleurs. Elle révèle des interactions inquiétantes entre ces médicaments et certains antibiotiques, avec des conséquences potentiellement dramatiques pour la santé publique.

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Comment les antidouleurs banalisés renforcent la résistance des bactéries

En cas de maux de tête, fièvre ou douleurs musculaires, le réflexe est souvent le même : prendre du Doliprane ou de l’Advil.

Ces médicaments, accessibles en pharmacie sans ordonnance, sont devenus des incontournables. Pourtant, une équipe de chercheurs de l’University of South Australia alerte sur les effets collatéraux méconnus de leur usage combiné avec des antibiotiques.

Pour leurs travaux, les scientifiques ont exposé la bactérie Escherichia coli à deux substances : un antidouleur courant et la ciprofloxacine, un antibiotique. Résultat ? La bactérie a développé une résistance accrue, non seulement à la ciprofloxacine, mais également à d’autres antibiotiques. La présence de l’antidouleur a amplifié cet effet, rendant les traitements bien moins efficaces.

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Pourquoi l’association antidouleurs-antibiotiques devient problématique

Ce phénomène n’est pas anodin. Il démontre que l’usage simultané de certains médicaments peut accélérer l’adaptation des bactéries, jusqu’à les rendre insensibles aux traitements classiques.

Selon l’étude, ce cocktail médicamenteux est de plus en plus courant, notamment chez les personnes âgées ou atteintes de pathologies chroniques.

La professeure Henrietta Venter, coautrice de l’étude, précise : « Nous devons être plus attentifs à l’interaction des antidouleurs avec les antibiotiques. Cela implique d’élargir notre vision au-delà de simples combinaisons binaires. »

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Cette mise en garde vise à encourager un usage plus raisonné de ces médicaments, surtout dans un contexte de santé déjà fragile.

Une crise sanitaire mondiale en accélération, selon l’OMS

La résistance antibiotique est déjà considérée par l’OMS comme l’une des plus grandes menaces pour la santé mondiale. En 2019, elle aurait été responsable de 1,27 million de décès.

Si la tendance se poursuit, de nombreuses infections aujourd’hui traitables pourraient redevenir mortelles.

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L’étude souligne aussi l’importance de l’éducation thérapeutique. Il ne s’agit pas d’interdire les antidouleurs, mais de mieux encadrer leur usage, notamment en cas de prescription d’antibiotiques. La sensibilisation des professionnels de santé comme du grand public devient une priorité.

Vers un usage repensé et encadré des médicaments quotidiens

Face à cette situation, les chercheurs plaident pour une approche globale : développer de nouvelles générations d’antibiotiques, surveiller les pratiques de prescription et adapter les traitements aux profils individuels. Car la banalisation des antidouleurs masque des risques bien réels lorsqu’ils sont mal associés.

Cette découverte rappelle que même les médicaments les plus familiers peuvent avoir des effets systémiques inattendus. Dans un monde où les infections résistantes se multiplient, chaque geste compte pour préserver l’efficacité des traitements existants.

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Alors que la recherche se poursuit, une chose est sûre : notre rapport aux antidouleurs doit évoluer. Plus que jamais, l’usage raisonné des médicaments est une arme essentielle dans la lutte contre la résistance antibiotique.

Source – SciTech Daily