Les plaisanciers habitués à évoluer en grande rade de Toulon ont peut-être déjà aperçu sa silhouette. Ils se sont alors sans doute étonnés de ne voir aucun marin sur le pont. Rien d’anormal à cela! S’il peut bien sûr être téléopéré, le Seaquest-S, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est en effet la première embarcation en France à avoir obtenu l’autorisation de naviguer de façon autonome.
Éprouvé à la mer
Développé par la société Sirehna, filiale du géant Naval Group, le Seaquest-S, drone de surface d’à peine 9,30m de long (ce qui lui permet d’être embarqué à bord des navires actuels de la Marine nationale), n’est pas l’un de ces énièmes prototypes sans lendemain. « Il s’agit du premier de série. Le Seaquest-S est d’ores et déjà commercialisé et fait l’objet de nombreuses marques d’intérêt. Aussi bien de la part de marines de guerre que de clients civils. Avec le chantier naval Couach, notre partenaire, on est prêt à lancer la production en série dès que l’un de nos prospects aboutira », confie Vincent Vivarès, le président de Sirehna.
La performance est notable. Le Seaquest-S a en effet été mis à l’eau pour la première fois il y a tout juste un an. Mais le drone de surface français a pu profiter des exercices de l’Otan auxquels la Marine nationale participe régulièrement. « Pour l’heure, la Marine nationale peaufine encore sa doctrine d’utilisation des drones. On l’accompagne. Et à sa demande, on a embarqué le Seaquest-S à bord du bâtiment de soutien et d’assistance métropolitain Rhône qui participait à l’exercice Baltic Sentry au Danemark en juin dernier. À cette occasion, notre drone s’est fait notamment remarquer pour sa capacité à évoluer dans une mer formée (mer 5). Et on repart début septembre pour l’exercice Repmus, au Portugal cette fois », détaille Vincent Vivarès.
Un drone polyvalent
Si pour les manœuvres portuaires à Saint-Mandrier le Seaquest-S est encore télécommandé, ce drone de surface peut bien évidemment évoluer de façon complètement autonome une fois en pleine mer. (Photo Valérie Le Parc / Var-matin). LE PARC VALÉRIE / Nice Matin.
Construit en matériaux composites, le Seaquest-S, qui peut évoluer à plus de 30 nœuds (+55km/h), est modulable à l’envi. « On l’a pensé pour être un drone multimissions. En fonction du client, il peut très bien assurer la surveillance d’un champ éolien en mer, effectuer des missions d’Intelligence, surveillance et reconnaissance (ISR) dans le cadre de l’action de l’État en mer. Mais aussi, dans la mesure où l’utilisation de drones létaux ne fait plus débat dans les armées françaises, être configuré pour la lutte anti-surface, anti-sous-marine ou antiaérienne », glisse encore Vincent Vivarès.
Mais si le Seaquest-S, qui bénéficie avec la rade de Toulon d’un « très bon laboratoire, au plus près d’autres dronistes », pour tester en permanence de nouvelles capacités, a pu être déployé de façon opérationnelle en si peu de temps, il le doit aussi au Steeris Mission System, un logiciel développé par Naval Group pour la préparation et la supervision des missions confiées aux drones.
Le drone de surface Seaquest-S (ici en grande rade de Toulon) a fait ses preuves, même par mer formée, lors d’un exercice de l’Otan au Danemark en juin dernier. LE PARC VALÉRIE / Nice Matin.
La gestion des drones « made in » Naval Group
Informatique Depuis le début des années 2000, Naval Group s’attache à développer des solutions pour toujours mieux intégrer les drones à bord des navires de guerre.
Qu’ils soient aériens, de surface ou sous-marins, les drones seront à l’avenir de plus en plus souvent déployés en opération sur les navires de guerre. « Comme une extension de ces derniers », commente Cyril Lévy, le directeur des programmes drones et systèmes autonomes et collaboratifs chez Naval Group. Si cette « élongation », pouvant aller jusqu’à 200 nautiques, est appréciable, encore faut-il être en mesure d’intégrer au système de gestion de combat (CMS) les informations fournies par les drones.
Pour intégrer les contributions des drones à la situation tactique d’un théâtre d’opérations, Naval Group, et tout particulièrement sa Direction Drones, Systèmes autonomes et Armes sous-marines (DSA), a mis au point le Steeris Mission System, un logiciel qui fait l’interface en temps réel avec le système de gestion de combat (CMS).
Pour développer ce logiciel, Naval Group s’est appuyé sur plus de douze années d’expérience. « Il faut se rappeler que l’on avait intégré le drone aérien Camcopter S-100 à bord du patrouilleur Adroit au début des années 2010 », glisse Cyril Lévy. Aujourd’hui, le logiciel Steeris Mission System n’a bien entendu plus grand-chose à voir avec son lointain ancêtre. Cyril Lévy détaille: « Notre logiciel gère tous types de drones, téléopérés ou autonomes. Il permet non seulement de préparer et de superviser leurs missions.
Mais aussi de récupérer les informations des capteurs installés sur les drones, puis d’envoyer ces dernières au bon format dans le système de gestion de combat du bateau mère. Enfin, il est capable de rejouer la mission ». Un point capital surtout pour les drones sous-marins développés par Naval Group, doués d’autonomie décisionnelle contrôlée.