Stefano Domenicali a peut-être trop pris au sens propre le fait d’être « à la tête » de la Formule 1. L’Italien ancien Team Principal de la Scuderia Ferrari officie en tant que président du Formula One Group depuis 2020. Depuis son arrivée et dans la foulée du rachat des droits commerciaux de la F1 par Liberty Media, la catégorie reine du sport automobile a connu de nombreuses nouveautés, toutes accueillies avec une aversion relative de la part des spectateurs, pour la plupart attaché à (cette année) trois quarts de siècle d’histoire.
Exemple concret de l’évolution de la Formule 1 sous l’égide de Stefano Domenicali : l’apparition au calendrier de nouveaux circuits modernes au détriment de pistes plus historiques. D’autres épreuves ont connu un retour, avec comme dernier exemple en date les Pays-Bas et Zandvoort, dont le champion du monde en titre Max Verstappen est local de l’étape. Après 31 ans d’absence, le circuit quittera de nouveau le calendrier de la F1 à l’issue de sa sixième édition en 2026 depuis son retour en 2021.
[La décision de ne pas renouveler le contrat de Zandvoort] « s’est fait d’un commun accord. Ce qu’ils ont accompli ces dernières années est incroyable, en dépit de toutes les contraintes, car c’est un énorme défi logistique ici, se justifie Stefano Domenicali auprès du quotidien néerlandais De Telegraaf. Je serai éternellement reconnaissant à Zandvoort pour l’incroyable impulsion qu’ils ont insufflée. »
« Toutefois, si l’on considère la situation dans son ensemble, ils ne bénéficient d’aucun soutien financier de la part du gouvernement. Pour un promoteur qui ne compte que des partenaires privés, il est impossible aujourd’hui d’investir pleinement à l’avenir et de dire : ‘Nous allons certainement continuer pendant cinq ans’, contrebalance le patron de la F1. Nous ne devons pas nous lamenter car il y a dix ans, personne n’aurait imaginé que la Formule 1 viendrait aux Pays-Bas. En 2026, je veux vraiment faire quelque chose de spécial, car ils le méritent. »
« Si [le circuit d’Assen] souhaite nous parler, nous serons toujours disponibles. Il ne faut jamais dire jamais, mais je ne veux pas leur donner de faux espoirs : à court terme, il y a peu de place au calendrier. La liste des pays qui souhaitent accueillir une course est plutôt longue, et l’intérêt est considérable, prévient Stefano Domenicali. Barcelone souhaite rester au calendrier après l’année prochaine, dans un système de rotation. La Turquie et le Portugal sont également intéressés, ainsi que le Rwanda en Afrique, entre autres. Certains prétendent qu’on ne court plus en Europe, c’est absurde. Il suffit de voir ce qui se passe en Hongrie et les récentes rénovations apportées au circuit. »
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« En fin de compte, c’est mon travail de prendre les décisions qui sont les meilleures pour la F1 »
En plus des visites sur des circuits urbains, dans des pays aux enveloppes plus lourdes que leur héritage en sport automobile, Stefano Domenicali a aussi en partie contribué à l’évolution intrinsèque de la F1. Instaurées en 2021 mais promptement et largement décriées par la communauté, les courses Sprint mettent en exergue l’intérêt économique, au détriment du sportif, des prises de décisions de Stefano Domenicali. L’Italien, campant sur ces positions vis-à-vis de l’apport de ces courses de 100km en marge du Grand Prix du dimanche, s’ouvre même au projet des grilles inversées à l’avenir.
« Quand nous avons commencé avec les courses Sprint, les premiers fans ont été très critiques. Comment osions-nous toucher à l’ADN même de la F1 ? Mais si la Formule 1, ou n’importe quel autre sport d’ailleurs, n’ose pas adapter sa philosophie, elle perd l’attention du grand public. Les promoteurs veulent des courses Sprint parce qu’elles attirent plus de monde, admet Stefano Domenicali. Ils veulent voir de l’action, voir les pilotes se battre. Ceux qui viennent le vendredi assistent ainsi à une séance de qualification Sprint, et pas seulement à deux séances d’essais libres. Les grilles inversées sont certainement une option pour l’avenir. Nous devons continuer à évoluer en tant que sport, sans aliéner les fans, bien sûr. Mais ne pas écouter la nouvelle génération n’est pas une bonne chose non plus. »
« C’est une bonne chose que du sang neuf arrive dans le système, avec de nouvelles idées qui rendront ce sport encore plus grandiose. En fin de compte, c’est mon travail de prendre les décisions qui sont les meilleures pour la Formule 1, qui doit vivre avec son temps, acte le patron de la F1. J’ai d’excellentes relations avec tous les pilotes du championnat. Je comprends certaines positions et opinions, et nous en discutons toujours. »
S’il y a bien un pilote qui aimerait discuter plus souvent de ces évolutions, ce n’est nul autre que le champion du monde en titre Max Verstappen. Le Néerlandais, déjà attiré vers la sortie devant la baisse drastique des performances de Red Bull, s’est à plusieurs reprises montré réticent aux nouveautés apportés à la Formule 1 dans une logique de spectacle plus que sportive. Toujours épris de la même passion pour le sport automobile, le quadruple champion du monde a laissé entendre qu’il pourrait envisager de mettre un terme à sa carrière en F1 si le championnat maintenait cette direction, ce qui n’inquiète pas Stefano Domenicali.
« Max est le meilleur, il est incroyable. Il comprend également qu’il ne peut pas être le plus rapide chaque année. Max s’est montré très fidèle à Red Bull, mais il est également logique qu’à un moment donné, il commence à regarder ailleurs. Il est devenu papa et doit voir les choses différemment, estime le patron de la F1. C’est clair qu’il veut courir dans d’autres séries, et ça me va. S’il est content, je suis content , je ne veux pas le perdre. Cela dit, je ne pense pas que ce jour n’arrive d’aussitôt. C’est à lui de décider, et j’espère qu’il restera, mais la Formule 1 restera la Formule 1. Si ça ne tenait qu’à moi, il continuerait encore dix ans ! »
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