Confronté depuis le 7 avril à une grève de son service collecte des déchets qui ne se limitait pas à sa seule ville centre, l’exécutif de Saint-Etienne Métropole a, cette fois, obtenu un accord avec les représentants CGT à la suite d’un nouveau round de négociations qui s’est déroulé ce matin. La grève s’achève, a annoncé dans l’après-midi le syndicat sans que les détails de l’accord ne nous aient été donnés à l’heure de publier ces lignes. Le ramassage des poubelles grises au sein des zones de l’agglomération concernées par la gestion publique devrait donc bien reprendre.

Le nouveau round de négociations s’est joué ce matin entre l’exécutif métropolitain et les représentants CGT du service collecte. ©If Saint-Etienne / XA

Ils se disaient « confiants » tout en se gardant bien d’être affirmatifs quant à une sortie de crise. « Les représentants doivent maintenant présenter à la base nos nouvelles propositions et les faire voter. De notre point de vue, il semble que nos interlocuteurs ont constaté des avancées dans leur sens, un pas vers leurs revendications, même pour certaines d’entre elles, notre position n’a pas bougé. » A l’issue de plusieurs heures de nouvelles négociations avec les représentants CGT ce vendredi matin, nouveau round annoncé dans le nuit après l’échec de celles de début de semaine, les vice-présidents en première ligne sur le sujet – Sylvie Fayolle, 1ère vice-présidente à la tête de la collectivité par intérim ; Denis Barriol et François Driol, vice-présidents respectivement aux ressources humaines et à la gestion des déchets – ont rencontré les médias locaux pour faire un point.

La veille, l’ensemble des vice-présidents puis le bureau des maires avaient ajouté le sujet parmi d’autres au menu d’une rencontre de teneur habituelle déjà programmée dans le calendrier de la gouvernance de Saint-Etienne Métropole. Selon Sylvie Fayolle, plus de 85 % des maires se sont montrés favorables aux positions présentées à la CGT ce matin : la moitié des communes de la Métropole est concernée par cette grève lancée le 7 avril par le syndicat – seul présent au sein du service collecte des déchets – qui compte 131 agents titulaires. Les conséquences, néfastes selon la CGT à la réorganisation des collectes de déchets liés aux évolutions de leur prise en charge (tri sélectif et biodéchets conformément aux exigences législatives ; contrôle QR code d’accès) étaient au cœur de leurs griefs doublés de revendications directement liées, ou de plus longue date, sur les moyens humains, matériels, ou encore leurs rétributions.

Un conflit multi angle

Nous les avions listées et détaillées dans ce premier article il y a 12 jours. La problématique selon le syndicat est particulièrement prégnante dans les zones les plus urbanisées, les plus denses, les plus étroites où circuler. A Saint-Etienne en particulier – mais pas que – où le passage, estime-t-il de trois à deux collectes pour les ordures ménagères allié à un manque de bacs, et les restrictions en déchèterie ont fait exploser les dépôts hors des clous et les risques pour des agents qui ne sont pas censés ramasser des sacs au sol mais des bacs, et encore moins des déchets censés trouver leur place transitoire directement en déchèterie. Tout Métropole ne connaît pas la grève : la remontée de compétence des communes à l’agglomération en 2003 n’a pas mis fin aux contrats avec le privé pris préalablement par les communes. Ce qui explique, par exemple, que Saint-Chamond ou Rive-de-Gier ne soit pas touchées tout comme Le Chambon-Feugerolles.

Nous n’avons jamais nié qu’il n’y ait pas de réajustements à faire à la suite des bouleversements majeurs que nous venons de connaître, ni le fait que le métier exercé par les agents n’est pas facile.

François Driol, v.-p. aux Déchets

Et c’est justement un autre élément de conflit : le passage en régie publique du Chambon-Feugerolles devait, avec l’issue du contrat noué avec Suez, intervenir le 2 juin dans l’idée d’une continuité cohérente du service publique dans l’Ondaine, donc de La Ricamarie à Firminy. Passage qui ne s’accompagnait pas de moyens humains suffisants selon la CGT. « Nous recrutons six personnes pour cela, en « déprécarisant » des CDD – il y aura toujours besoin de plusieurs CDD – et eux pensent qu’il en faudrait huit », résumait déjà François Driol, à la presse mardi, au lendemain de l’échec des précédentes négociations. Le fait d’évoquer en préambule un possible renoncement de cette mise en régie avait été très mal ressenti par la CGT qui y voyait l’exercice d’une une pression, voire d’une menace. « Nous n’avons jamais nié qu’il n’y ait pas de réajustements à faire à la suite des bouleversements majeurs que nous venons de connaître, ni le fait que le métier exercé par les agents n’est pas facile, tenait à nuancer l’élu. Même si force est de constater que les compensations apportées à son exercice difficile doivent aider avec le constat d’un turnover extrêmement bas dans ce service confronté très rarement aux départs. »

Stations « multi flux » à venir

« Oui, les élus de la Métropole font bloc vis-à-vis de la situation malgré ce contexte de gouvernance peu évident. Mais si nous ne sommes pas d’accord avec toutes les demandes, non, il n’y a aucun mépris de notre part, absolument aucune attitude qui va dans ce sens, comme j’ai pu le lire », l’appuyait ce vendredi matin Sylvie Fayolle. Reste que « sous la pression de sa population qui a pu constater que ses rues restaient propres avec le privé » ces 12 derniers jours, Le Chambon-Feugerolles ne renonce pas définitivement à la régie mais sa concrétisation – éventuelle du coup – est repoussée d’un an (le contrat de Suez est prolongé sur cette durée par avenant). Forcément, le temps que les Municipales 2026 passent et décident… Côté déchèteries, la restriction d’accès – l’objectif affiché était d’empêcher les pros de profiter d’un service aux particuliers auquel ils n’ont pas droit, payé qu’il est par les contribuables – verra peut-être ses modalités évoluer mais sûrement pas supprimées. « Il faut plus de recul : nous attendrons septembre pour décider d’une et quelle évolution », précise François Driol.

Non, il n’y a aucun mépris de notre part, absolument aucune attitude qui va dans ce sens, comme j’ai pu le lire.

Sylvie Fayolle, 1ère vice-présidente de SEM

Côté organisation, en début de semaine, l’élu avait évoqué l’idée de créer pour les zones denses quarante à cinquante « stations multi flux » à des endroits stratégiques, plus accessibles, en grande partie à Saint-Etienne mais ailleurs aussi. Des grands points d’apports volontaires cumulant tous les types de déchets et mieux calibrés exigeant plusieurs centaines de milliers d’euros d’investissement. Il nous avait précisé qu’avec la fin du travail du samedi obtenue il y a plusieurs années et la prise en charge montante des poubelles jaunes et vertes en plus des grises, il était devenu compliqué de remodifier le rythme de collecte. Tout en ajoutant que les chiffres enregistrés sur les évolutions de volume de type de déchets déposés avec les bouleversements de 2023 et 2024 suivaient les projections attendues. Côté rémunérations – les agents réclamaient une revalorisation de la « SMAF », prime sur les travaux dangereux et insalubre à hauteur de 120 € mensuels (contre 75 actuellement), comme dans d’autres services ceux rivière par exemple.

Le « sens des responsabilités »

Problème selon l’exécutif métropolitain : modifier ces éléments rémunérateurs exige de répondre à un cadre réglementaire plus contraignant que dans le privé faisant appel à des protocoles d’accords globaux plus larges que pour un seul service. Qui plus est dans un contexte où les rémunérations des agents de Métropole ont augmenté « en moyenne de 10 % sur les 5 dernières années » alors que la collectivité prend peur à propos de l’inflation de son budget fonctionnement au regard des incertitudes nationales quant aux finances publiques. Aussi, si des propositions ont été revues en allant dans le sens des grévistes selon la Métropole, on en ignorait les tenants à l’issue de cette conférence de presse express, l’exécutif ne souhaitant pas les donner tant que la CGT ne s’était pas prononcé sur son accord. A 15 h 45, le syndicat annonçait que la « grève était levée ce jour » (il faudra bien toute la semaine prochaine pour retrouver des rues à l’aspect plus normale) avec une signature de protocole prévue pour 17 h. Ses détails devaient être communiqués plus tard. A l’heure de publier ces lignes donc, elles ne nous avaient pas encore été transmises.

©If Saint-Etienne / XA

Pour parfaire le tableau, la problématique de la gouvernance métropolitaine, voire la perspective des Municipales 2026 à Saint-Etienne, sont venues s’inviter dans le débat. Si Sylvie Fayolle n’a pas voulu en rajouter ce matin – « c’est le droit d’un maire, s’il le fait en tant que maire » -, Gaël Perdriau, président en retrait de l’agglomération, au nom de la municipalité dont il est maire avait publié hier un communiqué dans lequel il émettait quatre propositions, collant davantage que la position de l’exécutif métropolitain aux réclamations de la CGT : suspension du QR code en déchèteries, maintien du projet de régie au Chambon, retour au système de collecte antérieur, alignement de la prime de risque… Dans un communiqué cette fin d’après-midi, le groupe d’opposition stéphanois (PS et apparentés) Saint-Etienne Demain qui avait manifesté son soutien à la grève, a salué le « sens des responsabilités » des ex grévistes.

« Pour éviter le pourrissement de la situation, et son impact sur la population, les agents ont fait le choix de reprendre le chemin du travail et de permettre une sortie de crise immédiate. L’intrusion de Gaël Perdriau dans les négociations, à travers un communiqué de presse ubuesque, n’aura servi qu’à une chose : rendre inaudibles les revendications légitimes des agents, pris en étau dans un jeu politique dont ils ont été les victimes collatérales. (…) Son communiqué, défendant le contraire de ce qu’il a toujours soutenu (notamment à travers ses représentants dans les instances métropolitaines), n’aura servi qu’à mettre de l’huile sur le feu.» De leur côté, les élus d’opposition écologistes aussi, avaient fait part de leur compréhension du mouvement au regard des difficultés qu’ils constataient tout en appelant les parties à ne pas rompre le dialogue social et insistant sur le besoin de davantage de transparence sur le bilan des évolutions récentes autour de la gestion des déchets métropolitaine.