Dans un coin privatisé de la brasserie toulonnaise Chez le brasseur, place de la Liberté, vendredi 29 août. Assis autour de la même table, quatre potentiels candidats à la mairie de Toulon en 2026: l’actuelle maire Josée Massi, le sénateur LR Michel Bonnus, le député macroniste Yannick Chenevard, ainsi que le conseiller municipal Benoît Pelletier, ex-directeur de cabinet d’Hubert Falco à la Métropole TPM.

Et au centre, Hubert Falco lui-même. Bien que définitivement condamné à cinq ans d’inéligibilité pour recel de détournement de fonds publics, c’est à lui que revient l’initiative de cette « réunion de travail », sorte de G5 extraordinaire de la droite toulonnaise.

Un scénario inimaginable il y a encore quelques semaines tant les tensions étaient exacerbées entre les membres de cette famille politique éclatée. L’occasion rêvée de s’entendre sur le choix d’une tête de liste, à six mois des élections? Ou a minima, d’officialiser le principe d’une liste unique, face à la députée RN Laure Lavalette, donnée favorite avant même de faire campagne? « Vous avez vu de la fumée blanche sortir? Moi, non… », constate une adjointe de la mairie de Toulon.

« Chacun s’est écouté »

Aucune communication officielle n’a été prévue. « Nous avons bien travaillé ensemble pour Toulon « , rapporte Yannick Chenevard, comme simple commentaire. Même stratégie d’en dire le moins possible côté Josée Massi. « Il est trop tôt pour que je m’exprime publiquement sur les municipales, concède Hubert Falco. Mais nous travaillons à l’unité pour faire gagner Toulon. » Seul Michel Bonnus évoque le contenu et le ton: « On a fait le tour des sujets importants, notamment une éventuelle dissolution. Mais on a surtout discuté de Toulon, à travers la rentrée scolaire, la culture, le sport, l’endettement positif, le bilan depuis 2001 et les projets. Et tout ça, en parlant à bâtons rompus. Chacun s’est écouté. Ça a été très productif.  » Il ajoute en rigolant: « On s’est même fait la bise en partant. » Et sinon, quid du leadership? L’ancien rugbyman du RCT botte en touche.  » Pas de précipitation, tempère-t-il. Laissons les choses se faire tranquillement. »

Dernier point à retenir de ces échanges: le rôle d’Hubert Falco. « Il est très bienveillant et veut faire les choses proprement », assure le sénateur varois, qui a déjà la bénédiction de Jean-Louis Masson, président (LR) du conseil départemental du Var. Fin juin, l’ancien maire de Toulon avait, lui, apporté son soutien à Josée Massi, qui venait juste de confier ses ambitions électorales à sa majorité municipale. Un soutien officiel, bien que du bout des lèvres, toujours valable aujourd’hui? Pas si sûr. Toutes les cartes sont encore sur la table alors qu’aucun profil ne s’est révélé comme une évidence. Et pour cause.

Des ambitions brisées?

« C’est le résultat de vingt-deux années de règne sans partage d’Hubert Falco, commente Cécile Muschotti, conseillère d’opposition Union des centristes et des écologistes. Il n’a fait émerger personne de son équipe et n’a pas voulu préparer sa succession. Il en était incapable, comme l’ancien président de la Région Michel Vauzelle. Pire, quand Michel Bonnus a commencé à lui faire de l’ombre, il l’a écarté de la mairie en l’envoyant au Sénat, loin de la gestion de la ville. » Celle qui a été députée LREM enfonce le clou: « Aucun autre n’a osé avoir des ambitions tant qu’Hubert Falco était au pouvoir. On n’a, par exemple, jamais entendu la voix de certains adjoints. »

Responsable des Jeunes LR 83, avant de prendre la tête de l’Union des Droite d’Eric Ciotti dans le Var et de s’associer à Laure Lavalette, Julien Argento a un regard assez similaire: « Du temps de Falco, Toulon a été une baronnie. Le chef de clan et bon gestionnaire qu’il était a préféré la politique de la terre brûlée plutôt qu’anticiper l’après. Il aurait dû s’y mettre dès 2020. C’est son erreur. » Celui-ci cite trois noms d’adjoints « compétents, jeunes et engagés qui auraient pu prendre une autre dimension si on leur avait proposé »: Mohammed Mahali (urbanisme), Laurent Bonnet (sports) et Christophe Moreno (dynamisation commerciale). « Ils n’ont pas pu éclore, lâche Julien Argento. Or, assurer sa succession, c’est tout aussi important que bien gouverner sa ville. »

En interne, beaucoup espéraient « ne pas se retrouver dans une telle situation ». « La question de savoir qui serait l’héritier d’Hubert ne s’est jamais vraiment posée, glisse un proche de l’ancien maire. Jusqu’à son dernier recours judiciaire, il a cru à son retour. Et nous aussi. Il n’y a rien à regretter. On ne va pas refaire le match. L’heure est à l’union. Il n’est pas trop tard pour ça. » Au lendemain de la réunion au sommet de vendredi dernier, les cinq protagonistes se sont revus: en tant qu’invités au mariage de Valérie Montone (adjointe à la famille), cette fois. Avant d’autres négociations prévues ce jeudi, d’après nos informations. Le moment venu de dire oui à une candidature unique de la droite?


Deligne.