L’appel du mouvement « Bloquons Tout » à la mobilisation le 10 septembre 2025 a été entendu par plusieurs collectifs locaux qui préparent des actions nombreuses et diverses sur l’ensemble du territoire. A quelles mobilisations faut-il s’attendre ?
La tension monte à mesure que la date du 10 septembre approche. Les appels à la mobilisation du collectif « Bloquons Tout » continuent d’être diffusés et repris et des réunions préparatoires pour les différentes actions à l’échelle locale sont organisés un peu partout en France. Rassemblements, blocages, actions de sabotage… Le mouvement du mercredi 10 septembre devrait prendre plusieurs formes, dont certaines inquiètent les services de renseignements.
Les appels à la mobilisation du 10 septembre, lancés dès le mois de mai, ont été massivement repris depuis la mi-juillet, après les annonces budgétaires de François Bayrou. « Ce mouvement est né parce qu’on en a marre », pouvait-on lire sur le site internet mobilisation10septembre, désormais inaccessible. « Marre de voir Bayrou détruire ce qu’il reste de justice et de solidarité. Assez des coupes, assez des sacrifices toujours imposés aux mêmes, assez de l’austérité qui écrase les gens pendant que les puissants continuent tranquilles ». Une colère qui a reçu le soutien de plusieurs partis politique de gauche et d’une poignée de syndicats (la CGT, SUD et Confédération paysanne). De quoi renforcer le mouvement ?
La carte des mobilisations du 10 septembre 2025
Le mouvement du 10 septembre, structuré sur le site indignonsnous.fr, n’est pas sans rappeler les débuts du mouvement des Gilets jaunes né en novembre 2018 contre la hausse du prix des carburants : même logique de blocage, même appel à la mobilisation sans les structures syndicales. Mais aura-t-il la même force ? Le collectif citoyen derrière la mobilisation multiplie les idées des mobilisations sur les réseaux sociaux, sans qu’une organisation précise ne voit le jour. Une absence de leadership confirmée dans une note des services de renseignement consultée par Le Parisien.
Les actions de 10 septembre semblent principalement s’organiser par des collectifs locaux, dont « la dynamique actuelle repose principalement sur des militants associatifs, politiques, certains notamment issus de la mouvance d’ultragauche et de certaines fractions syndicales », selon les renseignements territoriaux. L’organisation des mobilisations passe essentiellement par des messageries cryptées sur Telegram ou Signal « avec des canaux distincts pour chaque section locale » tous recensés sur une carte du site Indignons-nous.
Plusieurs dizaines de mobilisations sont déjà renseignées sur une autre carte, distinguant les manifestations et rassemblements des actions de blocage. Les principales villes de France sont concernées, mais des actions se préparent « en tous points du territoire, dans les villages comme dans les grandes agglomérations » d’après les renseignements. Concernant les actions de blocages, elles semblent se concentrer sur des points stratégiques : le port du Havre, les raffineries d’Ile-de-France, les dépôts pétroliers de plusieurs régions… Si aucun blocage concernant des axes routiers n’a été évoqué pour l’heure, certaines initiatives locales pourraient opter pour ce genre d’action le 10 septembre.
Quelles sont les mobilisations prévues le 10 septembre ? Trois « modes d’actions » annoncés
« Bloquons tout, ça veut dire des manifestations, des blocages de supermarchés ou de stations-service », expliquent plusieurs internautes sur X au sujet du mouvement du 10 septembre. Mais la mobilisation risque surtout de s’exprimer à travers des blocages et des occupations de lieux, plus que par des manifestations traditionnelles sur le voie publique qui sont « peu prisées des contestataires » selon la note des renseignement territoriaux : des centres commerciaux et des entrepôts de grandes entreprises bloquées, des universités occupées, des aéroports et des gares ciblés…
A l’origine, le collectif citoyen a appelé à « un arrêt total du pays » qu’il présente comme une action « pacifique pour dénoncer les injustices et reprendre le pouvoir collectivement ». Les organisateurs ont ensuite annoncé trois « modes d’action » : le boycott, la désobéissance et la « solidarité citoyenne ». Le boycott est un appel à se détacher du système capitaliste : cesser les achats dans les grandes surfaces, retirer son argent des banques, limiter la consommation (essence, fast-fashion…) et arrêter de travailler si possible (congés, arrêts maladie…). La désobéissance, elle, doit s’exprimer par le « refus collectif de remplir certaines obligations », le ralentissement volontaire dans les services publics », mais aussi par « l’occupation pacifique de lieux symboliques » et des « blocages ciblés ». Ils appellent enfin à une solidarité citoyenne sans laquelle le mouvement ne pourra pas tenir dans la durée, une solidarité qui peut prendre la forme de caisses de grève et de soutien local, de repas partagés ou encore de création d’espaces de discussion et de coordination dans chaque quartier et village.
Les mobilisations du 10 septembre seront-elles suivies ?
Le mouvement du 10 septembre bénéficie du soutien des citoyens selon un sondage Toluna-Harris Interactive pour RTL publié vendredi 22 août : 63 % des sondés disent adhérer au mouvement (surtout les soutiens des écologistes (80%), des insoumis (79%) et de l’extrême droite (77%)). Toutefois, seuls 58 % des Français sont favorables à « bloquer le pays » le 10 septembre, 70 % préférant « des manifestations pour protester contre le budget du gouvernement ».
Pour l’heure, les renseignement estiment que « 100 000 personnes pourraient se mobiliser partout en France ». Le mouvement pourrait cependant être plus importante grâce à « la perspective de la démission du gouvernement [qui] a renforcé la détermination des contestataires ». L’ampleur de la mobilisation du 10 septembre pourrait aussi s’accroître sous l’effet d’une convergence des luttes : les renseignement ont noté la présence de militants anti-gouvernement et anti-président, des personnes se revendiquant de la lutte pro-palestinienne et des militants de la communauté LGBTQIA+.
Voilà qui remet en cause un précédent scénario jugeant la convergence des luttes empêchée par la politisation du mouvement. L’association de la gauche à la mobilisation du 10 septembre a eu pour effet de repousser d’autres mouvances militantes, notamment celles de le droite et de l’extrême droite analyse Europe 1. L’absence de soutien de l’intersyndicale peut aussi affaiblir le mouvement, malgré la participation de quelques syndicats.
Face à cette mobilisation soutenu par des mouvances hétéroclites et dénuée de « leadership clairement identifié », les autorités redoutent que « l’absence de coordination structurée » puisse « entraîner des initiatives désorganisées et difficilement anticipables ». « L’absence de canalisation majore le risque d’actions par des groupes radicaux et violents », préviennent-ils.
11:35 – 100 000 personnes mobilisées en France pour le 10 septembre
Difficile d’estimer l’ampleur du mouvement du 10 septembre. Et pour cause : il vient d’un mouvement citoyen et est soutenu par une majorité de Français, mais il n’a pas été rejoint par l’intersyndicale et plus devenir clivant pour certains du fait de la récupération politique de certains partis de gauche. De plus, les appels à la mobilisation sont surtout relayés par des collectifs locaux. Les renseignements anticipent donc, à ce stade, un mouvement pouvant rassembler 100 000 personnes partout en France selon une note consultée par Le Parisien. Un chiffre loin des records de mobilisation en partie expliquant par la forme du mouvement : la mobilisation s’oriente davantage vers des blocages que vers des manifestations. Or, les blocages attirent moins et sont moins soutenus par les Français.
02/09/25 – 20:08 – Des actes de violence à craindre lors de la journée de blocages du 10 septembre
Le Parisien a consulté une note des renseignements territoriaux (RT) et la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris alertant sur de possibles actes de violences, des sabotages et des opérations contre des secteurs stratégiques comme l’énergie, les transports et la défense. Par exemple, des dépôts pétroliers pourraient être ciblés sur la façade atlantique, dans le Morbihan et la Charente-Maritime, relate le journal. La note ajoute que « l’absence de coordination structurée et de leadership clairement identifié, ce qui pourrait entraîner des initiatives désorganisées et difficilement anticipables. L’absence de canalisation majore le risque d’actions par des groupes radicaux et violents ». De manière plus classique, les RT anticipent l’occupation d’aéroports, d’université et de gares ferroviaires.
02/09/25 – 12:53 – « Mettre à l’arrêt la Loire-Atlantique »
Dans la Loire-Atlantique, « des étudiants et lycéens particulièrement combatifs ont également proposé le blocage de leurs lycées et la tenue d’AG et d’actions sur les campus universitaires pour la rentrée. Une tentative de fédérer la mobilisation à l’intérieur des quartiers de Nantes va également voir le jour, notamment dans le quartier populaire de Malakoff », apprend-on dans les colonnes de Révolution permanente. « À nous tous, on a le pouvoir de mettre à l’arrêt la Loire-Atlantique », résumait un manifestant.
02/09/25 – 10:50 – « On ne peut pas prévoir ce qu’il va se passer » le 10 septembre
« Il n’y a pas une volonté de violence. La violence, elle vient des institutions (…) On est dans une mobilisation qui touche tout le territoire, des petits groupes discutent, se rencontrent, et je pense qu’on ne peut pas prévoir ce qu’il va se passer. En revanche, c’est sur qu’il va se passer quelque chose ce jour-là (…) Mais pour l’instant, rien n’est arrêté, de nombreuses assemblées générales se tiennent dans le Gard et c’est assez encourageant », indique ce mardi 2 septembre Elodie au micro de ICI Gard Lozère, participante au mouvement « Bloquons tout » qui s’organise dans le département, avant la date clé du 10 septembre.
02/09/25 – 10:26 – « Dire notre ras-le-bol de toute cette politique », lâche une aide-soignante
Dans les colonnes de France 3 Occitanie, une aide-soignante du Lot explique les raisons qui la poussent à soutenir et se joindre au mouvement de blocage du 10 septembre. « Ce mouvement, ça m’a parlé de suite. Parce que je connais des agriculteurs, des artisans, des personnes qui ne s’en sortent plus aujourd’hui. Moi, en tant qu’aide-soignante, c’est pareil. Aujourd’hui, quand tu fais les courses, tu as intérêt à faire attention. Tout a augmenté et on ne s’en sort plus. Par contre, on voit les ultra-riches en profiter. Et aujourd’hui, moi, je dis juste que ce mouvement, je l’entends et je suis pour », confie-t-elle. « En tant que citoyens, dire notre ras-le-bol de toute cette politique. Voilà. Stop », conclut-elle.
02/09/25 – 08:48 – Manifester oui, mais bloquer « c’est pire que tout » prévient Bruno Retailleau
Le ministre de l’Intérieur garde un oeil sur les appels à la mobilisation pour le 10 septembre et exprime quelques craintes. « On peut manifester en France, c’est la liberté constitutionnellement garantie. Mais bloquer tout, c’est pire que tout, parce qu’aujourd’hui, le pays doit avancer », a déclaré Bruno Retailleau au journal de TF1 lundi soir. « Si demain il y avait une crise, c’est toujours les plus vulnérables, les plus modestes de nos compatriotes, qui vont trinquer », a mis en garde le locataire de la place Beauvau. Reprenant des éléments déjà évoqués par un agent du renseignement auprès d’Europe 1, Bruno Retailleau a estimé que la récupération politique du « mouvement protéiforme » est « sans doute un frein » à la force de propagation de l’appel.