A croire qu’Alain Delon plaçait l’essentiel de sa confiance en sa fille Anouchka davantage qu’entre ses deux fils. En plus de léguer 50 % de sa fortune à Anouchka, ne laissant « que » 25 % à chacun de ses deux fils, la légende française du cinéma décédé en août 2024 avait prévu dans son testament de confier à sa fille le droit moral exclusif de son image et de son nom.
Une décision qui divise la famille et qu’attaque en justice Alain-Fabien Delon, le plus jeune des fils du « Guépard », qui n’envisage pas de laisser à sa seule sœur la gestion de cet héritage. Mais que recouvre précisément cette disposition spécifique du droit français ?
Un droit perpétuel, un enjeu de mémoire
La Scam, Société civile des auteurs multimédia qui gère en France les droits patrimoniaux de ses auteurs membres, le droit de représentation et le droit de reproduction, nous en donne la définition suivante :
« Le droit moral, contrairement aux droits patrimoniaux, est perpétuel, inaliénable et imprescriptible. Il peut être exercé à tout moment par l’artiste ou ses ayants droit, y compris après les 70 ans post mortem d’exercice des droits patrimoniaux. Le droit moral est incessible […] Le droit moral est aussi perpétuel ; il ne tombe pas dans le domaine public et les héritiers peuvent le revendiquer ».
Concrètement cette disposition permet un droit de regard pour tout ce qui concerne la mémoire de l’auteur. Et on imagine qu’il peut être riche au vu de l’héritage culturel et symbolique que laisse Alain Delon. Ainsi, si les droits patrimoniaux d’une durée de soixante-dix ans permettent l’exploitation, y compris financière, des œuvres du défunt, le droit moral a une portée davantage symbolique. Son détenteur est une sorte de gardien de la mémoire.
Bataille judiciaire
Anouchka peut donc revendiquer l’exercice de ce droit si elle estime qu’une des œuvres ou même l’usage de l’image de son père est dénaturée. Ce peut être le cas par exemple si un musée ou encore une comédie musicale devait être créé. Mais aussi si cela concerne une exposition, ou encore l’utilisation du nom Alain Delon pour un lieu ou une institution. Ce droit moral donne donc à Anouchka un droit de regard sur tous ces usages de la symbolique de son père et la possibilité de s’y opposer.
Un pouvoir que n’entend pas Alain-Fabien Delon laisser à sa seule sœur et qu’il conteste juridiquement, dans une audience qui se tiendra au tribunal judiciaire de Paris le 9 mars 2026, si les deux parties ne s’entendent pas d’ici là, rapporte RTL.
Le plus jeune des fils d’Alain Delon estime notamment que son père n’avait plus toutes ses capacités lorsque en novembre 2022 il a ajouté à son testament initial rédigé en 2015, cette disposition. Le « Guépard » se trouvait alors déjà sur un lit d’hôpital. Alain-Fabien Delon conteste également une donation effectuée à Anouchka en février 2023, arguant que dès 2019 son père ne disposait plus pleinement de sa capacité de discernement.