D’anciennes collaboratrices de la juriste nantaise, spécialisée dans les violences faites aux femmes, dénoncent les conditions de travail malsaines et éprouvantes vécues au sein de son cabinet 100% féminin.

Il y a un an encore, elle présentait son cabinet comme «un lieu d’accueil, un refuge». L’avocate féministe Anne Bouillon se trouve sous le feu d’une enquête déontologique interne menée par le barreau de Nantes (Loire-Atlantique), révèlent ce mardi 2 septembre les quotidiens régionaux Presse Océan et Le Courrier de l’Ouest . Une quinzaine de personnes, dont plusieurs anciennes collaboratrices de la pénaliste nantaise, ont été entendues dans le cadre des investigations. L’avocate est soupçonnée d’avoir fait régner une atmosphère de travail délétère à son cabinet, entre «management toxique» et «conditions de travail éprouvantes».

Le rapport de l’enquête interne du barreau de Nantes a été transmis, en cette fin d’été, au Conseil régional de discipline près de la Cour d’appel de Rennes. Ouverte il y a près d’un an, l’affaire devrait être réglée ces prochains mois lors d’une audience publique.


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Autoritarisme et mise en compétition

Petite-nièce de Joséphine Baker, Anne Bouillon, 53 ans, a accédé à la notoriété en 2019, après avoir été propulsée en troisième position du classement annuel des meilleurs avocats de France, présenté par le magazine GQ. Installée à Nantes depuis 2003, la juriste dirige un cabinet 100% féminin spécialisé en droit des femmes et dans les affaires de violences sexuelles et conjugales. Attentive à la parole des victimes, elle confiait en novembre 2024 au Figaro être «marquée par leur absolu courage, lorsqu’elles déposent plainte et qu’elles sautent dans le vide».

Les accusatrices d’Anne Bouillon semblent également avoir pris leur courage à deux mains. Selon nos confrères, les griefs rapportés au barreau concernent des «pratiques managériales inappropriées», banalisées par une avocate aux dérives autoritaires avec ses collaboratrices. Plusieurs témoignages indiquent une nette dégradation des conditions de travail à partir de 2019, en raison de l’afflux des dossiers favorisé par la médiatisation du cabinet. Les collaboratrices étaient mises en compétition et rudoyées jusqu’au burn-out, avec des arrêts maladie et des départs précipités devenus monnaie courante, le tout au détriment de certains dossiers défendus.

Dans un entretien accordé à Presse Océan, Anne Bouillon a reconnu une partie des faits qui lui sont reprochés, en assurant n’avoir jamais voulu «blesser quiconque» et en regrettant ne pas avoir assez «déconstruit» sa façon de travailler en équipe. «J’ai un fort tempérament. C’est une force et un défaut. Il a pu m’arriver, sur une période compliquée pour moi, de réagir avec excès. J’ai présenté des excuses, ça ne suffit pas. Pour certaines jeunes collaboratrices, cela a pu créer une souffrance au travail que je n’ai pas perçue sur le moment. Je le regrette beaucoup», a-t-elle déclaré à nos confrères. Le barreau de Nantes n’a pour le moment pas répondu aux sollicitations du Figaro.