À première vue, le Whoop 4.0 n’a rien d’un accessoire sportif traditionnel. Pas d’écran, pas de boutons, aucun GPS intégré, et pourtant, il se veut l’un des capteurs physiologiques les plus avancés du marché. Loin des montres multisports classiques, il promet de vous aider à mieux récupérer, à dormir plus efficacement et à doser finement vos efforts, avec une approche fondée sur des données scientifiques continues. Curieux et un brin sceptiques, nous l’avons porté 24/7 pendant plusieurs mois et nous avons été à la rencontre de pilotes l’ayant intégré à leur routine. Voici notre retour long format sur ce drôle de bracelet au service de la performance.
Fondée en 2012 par l’Américain Will Ahmed, Whoop est née d’une conviction : les sportifs et les athlètes de haut niveau méritent un suivi permanent de leur organisme, au-delà des performances brutes. Ingénieur à Harvard, Ahmed s’est entouré de designers et scientifiques pour créer un bracelet capable d’analyser la récupération, le sommeil et le stress via des mesures constantes de fréquence cardiaque, variabilité de fréquence cardiaque (HRV), saturation en O₂ et de température cutanée.
Whoop a rapidement conquis le monde sportif : Michael Phelps, LeBron James, Cristiano Ronaldo, et bien d’autres stars l’ont adopté… Mais c’est surtout lors de son arrivée en tant que sponsor principal de la coupe du monde de VTT que nous avons vraiment découvert la marque au sein de la rédaction. Entre curiosité personnelle et devoir professionnel, le bracelet Whoop était commandé afin de pouvoir vous en parler !
Un design qui s’efface, des capteurs qui observent
Le Whoop 4.0, c’est un bracelet sans écran, 100 % dédié à la captation de données. Pas d’interruption, pas de notifications parasites, uniquement une analyse continue des signaux physiologiques : fréquence cardiaque, variabilité de la fréquence cardiaque (HRV), température cutanée, fréquence respiratoire, saturation en oxygène.
Le module embarque cinq LED (dont des rouges et infrarouges), quatre photodiodes, et une batterie rechargeable via un petit pack magnétique étanche — un détail aussi simple qu’astucieux.
Au quotidien, on oublie littéralement qu’on le porte. Léger (28 g), compact, résistant à l’eau (IP68), il ne gêne jamais. C’est d’ailleurs ce caractère « invisible » qui m’a (personnellement) intéressé par rapport aux montres classiques. Majoritairement pour le suivi du sommeil, ne parvenant pas à porter ma montre Garmin durant la nuit, mais aussi pour toutes les fois où il faut choisir entre le suivi des données et le plaisir d’une jolie montre de ville.
On notera que la marque commercialise également une série de vêtements spécifiques « Whoop Body » (brassières, boxers, cuissard) dans lesquels le Whoop peut se glisser pour un peu plus de discrétion encore.
Petit point sur le prix car il faut le rappeler : les bracelets Whoop ne s’achètent pas comme une montre classique. Leur prix est intégré dans un modèle d’abonnement.
Trois niveaux sont proposés. L’entrée de gamme, à 199 € / an, inclut le bracelet et les fonctions essentielles (sommeil, récupération, charge d’entraînement). Le palier intermédiaire, baptisé Peak, passe à 239 € / an avec des analyses plus poussées de la santé et du stress. Enfin, la formule Life, à 359 € / an, donne accès au Whoop MG, le modèle le plus abouti avec ECG intégré, suivi de la pression artérielle (encore en phase beta) et alertes médicales. Pas de grosse dépense à l’achat, mais un engagement sur la durée qui peut vite représenter un budget conséquent.
Comprendre, anticiper, s’adapter : l’approche Whoop
Whoop structure son analyse autour de trois axes : récupération, sommeil et charge d’entraînement (strain). Chaque matin, l’appli mobile vous délivre un score de récupération (sur 100), calculé à partir de vos cycles de sommeil, de votre HRV (variabilité de la fréquence cardiaque) nocturne, de votre fréquence cardiaque au repos et d’autres variables internes.
Ce n’est pas magique, mais très utile pour adapter l’intensité de sa journée, ou repenser ses habitudes !
Ce qui frappe, c’est la cohérence globale de ces scores. Au fil des semaines, on retrouve une logique physiologique précise : une mauvaise nuit, un repas alcoolisé ou une grosse charge mentale se répercutent sur le score de récupération. À l’inverse, une nuit longue, sans stress, permet une remontée significative. Ce n’est pas magique, mais très utile pour adapter l’intensité de sa journée, ou repenser ses habitudes (café, écrans, nutrition, etc.).
À ce sujet, il est possible de se créer un journal de routine personnalisé.
Le bracelet suit aussi vos activités physiques de manière autonome : il détecte les hausses prolongées de fréquence cardiaque, les mouvements, et identifie automatiquement un effort. Vous pouvez aussi lancer une activité manuellement depuis l’appli. Pas besoin d’interagir avec le bracelet lui-même, ce qui est agréable.
En activité sportive, que vaut Whoop face à la concurrence ?Fréquence cardiaque
Graphique non exemplatifCôté précision cardiaque, nous avons comparé Whoop au duo Garmin Forerunner 955 (optique poignet) et ceinture HRM-Dual (référence en termes de fiabilité). Sur des efforts modérés (sorties longues, endurance), le Whoop 4.0 suit globalement bien, avec une latence minime et des courbes proches de ses concurrents.
Mais sur les séances explosives (fractionné, efforts courts en force, sprints), Whoop accuse un retard notable : les pics de fréquence cardiaque sont systématiquement sous-estimés, et les phases de récupération sont parfois mal détectées. La ceinture reste la référence absolue pour la précision cardio, tandis que le capteur poignet de Garmin (sur ses montres haut de gamme) s’en sort souvent mieux que le Whoop dans les efforts à forte intensité. Sur le terrain, cela signifie que Whoop est suffisant pour suivre votre état général, mais moins pertinent pour l’analyse fine d’un entraînement. Il permet de dégager des tendances, sans pour autant pouvoir donner matière à une étude détaillée.
Suivi GPS
C’est l’un des points faibles assumés du Whoop : il n’y a aucun GPS ni altimètre intégré. Le bracelet ne trace pas vos parcours, ne mesure pas vos vitesses, ne vous donne aucun retour sur le dénivelé ou la distance. Pour ça, il faut (toujours) passer par une montre ou un compteur externe.
Lorsqu’un effort est détecté, l’application Whoop l’associe à une discipline (VTT, trail, yoga, etc.) de manière automatique (même s’il est possible de la modifier en cas d’erreur). Whoop attribue une note entre 1 et 21 de « Strain », à savoir la charge cardiovasculaire de l’activité. Étant donné que les données telles que la distance ou le dénivelé ne sont pas enregistrées, le Whoop se base principalement sur le temps passé dans les différentes zones cardiaques. Bref, il s’agit là d’un véritable allié pour mesurer l’impact physiologique, plutôt que de quantifier les kilomètres à l’image d’un compteur.
Le Whoop vu par des pilotes professionnelsRémi Groslambert, marathonien
« Je l’utilise depuis août 2023, et je ne le quitte plus depuis. Je le porte 24/7. Dans l’idée globale, je l’utilise pour une idée générale de ma fraîcheur. Je le lie avec TrainingPeaks, de façon à ce que mon coach puisse récupérer et analyser les données de sommeil, de VFC (variabilité de fréquence cardiaque), de fréquence cardiaque au repos, etc.
Là où j’utilise principalement le Whoop, c’est pour la VFC. Plus celle-ci est haute, plus le corps semble être prêt à fournir un effort. C’est un facteur que je surveille attentivement. D’autant plus qu’il n’y a pas vraiment d’autres alternatives. Il y a la possibilité de faire un vrai test VFC le matin au réveil, mais c’est un protocole qui prend environ 1/4 d’heure, ce qui est beaucoup plus contraignant au quotidien en comparaison au Whoop.
Cela permet aussi d’amener une certaine rigueur pour le sommeil, avec une valeur chiffrée. Ça me permet de faire attention si j’ai besoin de plus de sommeil, mais aussi de mettre en évidence pourquoi le sommeil n’a pas été bon (heure tardive, café, …).
D’expérience, je trouve ça cohérent et ça recoupe bien mes sensations.
Rémi Groslambert
Les critiques sur la précision sont faites à juste titre, notamment sur la VFC. Selon moi, cela reste intéressant car tu le portes constamment, donc même si ce n’est pas parfaitement précis, cela permet de voir les tendances qui sont un bon indicateur à prendre en compte. D’expérience, je trouve ça cohérent et ça recoupe bien mes sensations.
Il faut aussi dire que c’est un outil pertinent pour des personnes dont le mode de vie est déjà suffisamment optimisé que pour permettre de rentrer dans le détail comme le permet le Whoop. Il faut aussi prendre beaucoup de recul par rapport à ce qu’il raconte. Par exemple, il est possible d’avoir une mauvaise nuit avant le départ d’une course et que le score de récup’ soit pourri le matin du départ. Cela peut mettre dans un mauvais état d’esprit, mais il ne faut pas se laisser affecter. C’est un indicateur interessant, mais ce n’est pas la vérité absolue ! »
Loïc Blanc, marathonien et (presque) détracteur du Whoop
Crédit photo : Tina Heinzer« Au début, j’ai eu beaucoup de mal avec le Whoop. Je bossais à 100% en Suisse, avec des journées qui démarraient à 5h15 et finissaient rarement avant 16h30… souvent avec des heures sup’ en prime. Ça voulait dire qu’une sortie vélo ne commençait jamais avant la fin d’après-midi, et que je rentrais à la maison vers 20h. Autant dire que les journées étaient bien remplies, mais paradoxalement j’avais l’impression de n’avoir rien fait. Et dans ce contexte, recevoir une notification me conseillant d’aller dormir à… 19h20, c’était plus agaçant qu’utile. Je n’avais pas besoin d’un bracelet pour me rappeler que je manquais de sommeil ! Résultat, j’ai vite lâché l’affaire et le Whoop est resté au placard pendant presque deux ans.
Aujourd’hui, mon rythme a changé. Je bosse à 60% et j’ai (même) craqué pour le Whoop 5.0. Et là, tout prend enfin son sens. Travail, entraînement, sommeil, activités annexes : j’arrive à combiner tout ça sans avoir l’impression de courir après le temps. Et c’est fou de voir à quel point le sommeil change la donne. Sur le vélo bien sûr… mais aussi dans la vie de tous les jours.
Au final, je pense que c’est un bon outil annexe à l’entrainement pour les athlètes, mais aussi de manière générale pour toutes les personnes qui désirent « juste » être en bonne santé ».
Whoop ne remplace pas une montre GPS ni une ceinture cardio de référence, mais ce n’est pas son objectif. Là où il excelle, c’est dans le suivi quotidien, la mise en évidence de tendances et la capacité à relier l’entraînement, le sommeil et la récupération. En clair, un outil qui aide à mieux se connaître, à prendre du recul, et parfois à corriger des habitudes sans même s’en rendre compte.
Il ne faut pas le considérer comme une vérité absolue : un score rouge le matin d’une course n’est pas une condamnation, et les limites en matière de précision sur les efforts explosifs sont bien réelles. Mais utilisé avec recul, le Whoop devient un allié pertinent, autant pour les compétiteurs que pour celles et ceux qui veulent simplement optimiser leur hygiène de vie.
En définitive, plus qu’un gadget, c’est un compagnon discret qui met des chiffres sur des sensations. Et rien que pour ça, il mérite d’être pris au sérieux… à condition de garder l’esprit critique, et de ne pas oublier que, parfois, écouter son corps reste le meilleur des capteurs.
Pour plus d’informations : https://www.whoop.com/fr/fr/