Alors que les finances publiques de la France sont au cœur de toutes les préoccupations, l’Agence France Trésor a emprunté sans difficulté 11 milliards d’euros sur les marchés. À des taux toutefois supérieurs à ceux qui étaient visés.

Dans la cible. Et même dans la tranche haute. Le gouvernement Bayrou est sur le point de chuter, mais les marchés en ont pris acte et cela ne se ressent que légèrement sur la dernière adjudication de dette. L’Agence France Trésor (AFT), chargée de gérer la dette de l’État, a émis ce jeudi 4 septembre pour 11 milliards d’euros d’obligations assimilables du Trésor (OAT) à long terme. Elle avait annoncé la semaine dernière, comme il est d’usage, son intention de lever entre 9,5 et 11 milliards d’euros. En tout, elle doit se procurer 300 milliards d’euros en 2025, un record.

Signe que pour le moment le paquebot de la dette française (3 345 milliards d’euros au premier trimestre) ne tangue pas, l’AFT a emprunté à dix ans au taux de 3,57 %, légèrement supérieur aux 3,5 % visés. Cela signifie que les banques qui participent à ces enchères « à la hollandaise » (celui qui propose de prêter au taux le plus faible est servi en premier) pour le compte de leurs clients ont jugé la prise de risque encore limitée. La France n’a donc encore aucune peine à placer sa dette sur les marchés, même si une petite inquiétude point dans ce léger différentiel de taux. Surtout, elle n’emprunte pas encore au même taux que l’Italie, à 5,7 %, ce qui serait un symbole puissant de déclassement de sa signature.


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La France conserve sa capacité de placement à long terme

Les taux sont en revanche plus importants à long terme. Ainsi l’OAT arrivant à terme en 2042 s’est-elle écoulée au taux de 4,04 % au lieu de 3,6 % visés, et celle de 2056 à 4,43 % au lieu de 3,75 %. Et les niveaux sont en augmentation par rapport à juillet. Mais la prime de terme a beau augmenter, ce n’est que dans des proportions relativement faibles : la France conserve sa capacité à placer sa dette sur de longues maturités. Si elle était prise à la gorge, elle ne pourrait plus emprunter que sur du court ou moyen terme, et pour moins cher.

La France reste donc pour le moment, aux yeux des marchés, un placement sécurisé, conformément à sa notation « AA- ». Les agences pourraient cependant bientôt être amenées à dégrader cette note, la faisant entrer dans la catégorie des simples « A ». Une décision qui pourrait intervenir dès le 12 septembre, quatre jours après la chute très probable du cabinet Bayrou, lorsque l’agence Fitch publiera son verdict sur l’état de la dette française. Elle acterait en effet la fin des ambitions de réduction du déficit de 44 milliards d’euros en 2026 et l’impossibilité de ramener le solde public à -3 % du PIB d’ici 2029.

Dans l’éventualité d’une dégradation, un certain nombre d’investisseurs institutionnels, comme des fonds de pension étrangers, cesseraient de prêter à la France, le pays sortant de la catégorie des placements considérés comme parfaitement sécurisés. Une baisse de la demande qui compliquerait la tâche de l’AFT lors de ses futures émissions de dette, les taux augmentant mécaniquement. La dette française conserve son « caractère explosif », signale une note du think tank BSI Economics. « L’adoption de mesures d’économies n’apparaît pas comme un choix de confort, mais comme une nécessité pour éviter une divergence durable et le risque d’une crise de la dette. »