La mort d’un policier de l’Office antistupéfiants, dont le corps a été retrouvé cagoulé et entravé au pied d’une falaise, suscite de vives spéculations.
C’est une histoire qui intrigue autant qu’elle heurte l’entendement. Mercredi 3 septembre, dans l’anse Magaud, une petite baie située à l’est de Toulon (Var), un policier de l’Office antistupéfiants de Nanterre a été retrouvé sans vie, le visage recouvert d’une cagoule, les mains et les pieds entravés. Originaire de l’aire toulonnaise, il séjournait dans la région auprès de sa famille. Son corps a été découvert flottant dans l’eau, à proximité du rivage où plusieurs de ses affaires personnelles ont été abandonnées sur la falaise qui surplombe l’anse. Une macabre découverte qui, au premier regard, évoque un crime. Pourtant, le parquet de Toulon privilégie la thèse du suicide.
Le procureur de la République de Toulon, Sylvain Finielz, insiste : «Même si la découverte peut laisser croire à un crime, les éléments recueillis orientent plutôt vers un suicide.»
Un récit exacerbé sur les réseaux sociaux
À peine l’annonce connue, les réseaux sociaux ont été saturés de messages complotistes, théories alternatives et soupçons d’assassinat. «C’est impossible, à moins qu’on ait commandité son suicide», s’indigne un internaute. Un autre rappelle que ce policier appartenait à l’Office antistupéfiants, secoué récemment par la mise en examen de plusieurs fonctionnaires marseillais après la découverte de 350 kilos de cocaïne.
Pourtant, les constatations réalisées sur place et notamment la découverte du sac du policier en haut de la falaise contenant ses effets personnels et «des notes écrites», orientent les enquêteurs vers un geste volontaire.
Des indices en faveur d’un geste désespéré
Reste l’étrangeté de la mise en scène : un homme cagoulé, les pieds et mains entravés. «Ce n’est pas courant, mais il ne faut pas sous-estimer jusqu’où peut aller la détresse humaine», répond le procureur avant de continuer : «Les fonctionnaires de police connaissent parfaitement les procédés pour s’entraver eux-mêmes.» Autrement dit, les menottes et liens retrouvés ne constituent pas en soi la preuve d’une intervention extérieure selon lui. La médecin légiste Caroline Rambaud abonde : «Ce n’est pas inhabituel, on retrouve souvent ce cas de figure chez les pendus, qui, pour être sûr de ne pas détacher la corde, s’attachent les mains.»
De plus, «il y a des éléments familiaux personnels qui renforcent cette hypothèse. Il a pu volontairement se jeter de la falaise», détaille le procureur. Selon Var-Matin, l’homme était dans une dans une procédure de divorce.
Sylvain Filniez précise cependant : «l’enquête est en cours et n’écarte aucune piste, y compris celle criminelle.» «Dans le cadre d’une noyade, plusieurs scénarios sont possibles», ajoute Caroline Rambaud avant de détailler : «Il existe des zones de tensions typiques : bras; nuque, qui, lorsqu’elles présentent des traces, oriente vers un contact appuyé ou une empoignade. Mais une simple poussée, par exemple, peut ne laisser aucune trace. » Cette dernière est donc catégorique : «En présence de lésions de violences (ecchymoses, griffures, …), on peut soupçonner une intervention extérieure. En revanche, en l’absence de marques, il est impossible de différencier un suicide d’un homicide par poussée. Ce sont les éléments de l’enquête qui doivent compléter l’analyse.» Autre point qui peut perturber les investigations : «Le noircissement du corps en cas de séjour très prolongé dans l’eau.» A cela s’ajoute l’ADN qui peut subir une altération importante de son profil génétique sous l’eau. Néanmoins, certaines traces peuvent persister, notamment celles relevées sous les ongles, qui peuvent s’avérer capitales.
En toutes circonstances, l’enquête, confiée à la Direction interdépartementale de la police nationale du Var, devra démêler les certitudes judiciaires des spéculations numériques.
Mais pour Caroline Rambaud, une chose est sûre : «le suicide est toujours d’un acte très violent, pour la personne comme pour son entourage. Souvent accompagner d’un message qui n’est pas toujours simple à interpréter.»