Le 18 juillet, la sous-préfète Cécile Rackette a fait le déplacement en personne rue du Rempart, à Strasbourg, accompagnée de policiers, de douaniers, d’un inspecteur du travail. Un précédent épisode en 2024 avait conduit à une enquête de police et mis le Wagon dans le collimateur des autorités.
Depuis le 2 septembre, une fermeture administrative de quatre mois a été notifiée au président de l’association Mohamed Zahi. Le motif premier de cet arrêté est la vente d’alcools forts sans la licence 4 qui permettrait cette commercialisation.
Par ailleurs, l’arrêté de fermeture relève un cas de travail dissimulé ainsi qu’une infraction pour l’emploi d’une personne étrangère sans autorisation de travail. Enfin, les forces de l’ordre ont saisi sur place du tabac à narguilé sans justificatif d’autorisation pour en commercialiser.
Deux plaintes contre le président
En marge de cette décision administrative, l’association vit une crise de gouvernance qui s’est emballée dans la deuxième quinzaine d’août. Des désaccords du président avec une intervenante artistique qui a organisé plusieurs événements au Wagon ainsi que la directrice artistique (membre fondatrice de l’association) du Wagon Souk se sont envenimés au point que les deux femmes ont chacune déposé plainte contre Mohamed Zahi.
« J’ai été harcelée durant trois mois par messages privés, puis harcelée et diffamée de manière publique sur les réseaux sociaux », affirme l’artiste intervenante extérieure (*) qui a documenté ces violentes attaques contre sa personne par de nombreuses captures d’écran. « Je suis devenue le bouc émissaire de cet homme, qui fait ainsi diversion sur ses propres défaillances », poursuit la plaignante. « Mais je sais que je ne suis pas la seule victime de ses agissements. » « J’ai déposé plainte le 22 août pour libérer la parole et également parce que je ne pouvais laisser passer des mises en cause de mon sérieux sur le plan professionnel. »
Cette crise va entraîner des conséquences lourdes pour l’avenir du tiers-lieu. Mettant en avant l’intérêt d’un projet « convivial, militant et (favorisant les) rencontres culturelles », la municipalité strasbourgeoise s’était engagée en juin 2025 à construire avec l’équipe du Wagon Souk un programme architectural pour une réhabilitation et mise aux normes du bâtiment. Ce, dans l’optique d’une occupation possible des locaux par le public usager du lieu. Des travaux avaient été annoncés à l’horizon 2027.
Le partenariat avec la Ville gelé
« Les dépôts de plainte dont nous avons été informés dénoncent des violences au sein de la structure », réagissait le premier adjoint à la maire Syamak Agha Babaei en début de semaine. « C’est évidemment à la justice de trancher sur le fond, mais ces accusations atteignent l’association dans son fonctionnement ». D’où la décision, exprimée officiellement dans un communiqué du 29 août, de geler le partenariat de la Ville avec l’association. « Une gouvernance apaisée et différente sera la condition de reprise du projet de réhabilitation », indique encore l’élu.
Contacté jeudi soir par nos soins, Mohamed Zahi s’estime « victime d’une vaste campagne de lynchage ». Il aurait déposé lui-même, dit-il, trois plaintes à l’encontre de chacune des femmes qui l’incriminent ainsi que de « Mme la maire et son cabinet ».
Entre-temps, le parquet a retenu à son encontre les faits d’envoi de messages malveillants par voie de communication électronique pour une des plaignantes, de tentative de troubler la tranquillité, de porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la seconde, en l’identifiant clairement sur les réseaux sociaux par « sa photographie accompagnée d’un message dénigrant ». Ces faits font l’objet d’une proposition de composition pénale. Le dispositif judiciaire en question permet de sanctionner rapidement l’auteur d’une infraction reconnaissant sa culpabilité, lui évitant un procès stricto sensu.
(*) Notre interlocutrice a souhaité rester anonyme.