Audouin-Rouzeau analyse le déni de la guerre et la stupeur qu’elle engendre chez nous qui vivons aujourd’hui dans des « sociétés à haut niveau de pacification ».
Pour rester au XXe siècle, ce déni remonte au carnage de la Première Guerre mondiale quand, à l’heure de l’armistice de 1918, on pouvait lire dans un journal : « La guerre est morte et c’est nous qui l’avons tuée. » De cette conviction d’avoir tué la guerre, on sait ce qu’il advint avec la Seconde Guerre mondiale. L’Europe s’est ensuite reconstruite autour d’une croyance : « si nous ne désignons aucun ennemi, nulle action de guerre n’est susceptible de nous menacer. » Erreur fondamentale, selon Audouin-Rouzeau : les ennemis n’ont pas besoin qu’on les désigne pour se manifester — l’historien pointe la Russie de Vladimir Poutine.
Le déni garde toute sa puissance même quand nous avons la guerre sous les yeux
Espérer une guerre courte en Ukraine, parier sur d’improbables pourparlers, c’est encore nier l’évidence de la guerre. Sombre conclusion : « il reste à nous convaincre nous-mêmes de l’importance centrale de la guerre : car nous tromper (…) sur notre propre société, c’est nous tromper nous-mêmes. »