Il avait baptisé ses projets d’attentats « retour de flammes » ou « œil pour œil, dent pour dent ». Selon nos informations, un adolescent de 17 ans soupçonné de préparer des actions djihadistes de grande ampleur a été placé en garde à vue lundi par les policiers de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet national antiterroriste (PNAT) pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle ». Domicilié dans la Sarthe, le mineur a tenté de prendre la fuite lors de son interpellation qui a nécessité le renfort des forces d’élite du Raid.
Selon les renseignements obtenus par la DGSI, ce jeune homme de nationalité française se serait radicalisé de manière violente sur Internet en visionnant des vidéos de propagande de l’organisation État islamique (EI). Un serment d’allégeance à l’émir du groupe extrémiste sunnite a été retrouvé lors de la perquisition de son domicile, signé de son nom de guerre – « Abou Jannah Al Faransi » (Abou Jannah le Français). Dans ce texte belliqueux, le jeune homme annonce son intention de tuer des « mécréants » et évoque notamment la situation à Gaza.
Plus inquiétant encore, des investigations laissent penser que l’intéressé a pu être en contact virtuel avec des membres de l’État islamique au Khorasan (EI-K), la branche de l’organisation terroriste implantée en Afghanistan et au Pakistan. Bien qu’affaibli depuis 2018 avec la perte territoriale de son califat autoproclamé entre la Syrie et l’Irak, Daech a retrouvé de la vigueur à travers sa filiale au Khorasan, responsable notamment de l’attentat meurtrier de Moscou en 2024 (137 morts). La DGSI a d’ailleurs récemment placé la menace terroriste émanant de l’EI-K « en tête des priorités ». Surtout, sa propagande continue de susciter des vocations terroristes en France, en particulier chez les plus jeunes et fragiles.
Une liste d’établissements scolaires
D’après les premières investigations, l’adolescent de la Sarthe envisageait plusieurs projets d’attentats contre des institutions à Paris : ambassades d’Israël ou des États-Unis par exemple, mais aussi l’Élysée, rue du Faubourg Saint-Honoré, ou le ministère de l’Intérieur, place Beauvau. Des écrits exhumés en perquisition laissent également penser qu’il s’intéressait au siège de grands médias parisiens audiovisuels. Ces derniers jours, le mineur semblait toutefois avoir réorienté ses plans terroristes vers un commissariat et, surtout, vers des établissements scolaires de la Sarthe, notamment le lycée où il était inscrit.
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Il aurait notamment imaginé de brûler des écoles, symboles à ses yeux du système occidental qu’il exècre, avec de l’essence. D’où le nom de code « retour de flammes ». Les policiers ont retrouvé sur son téléphone une liste d’établissements scolaires, des notes relatives à des produits chimiques et la fabrication d’explosifs ainsi que des recherches sur des stations essence de la région et des repérages de cibles sur Google Maps.
L’enquête doit désormais déterminer plus précisément le degré d’avancement et la matérialité des projets djihadistes reprochés au suspect. À l’issue de quatre jours de garde à vue dans les locaux de la DGSI à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), le mineur doit être présenté ce vendredi devant un juge antiterroriste à Paris en vue d’une mise en examen et l’ouverture d’une information judiciaire. Sollicité ce vendredi après-midi, l’avocat de l’adolescent, Me Dylan Slama, n’a pas souhaité s’exprimer à ce stade.
Cette affaire illustre la vigilance toujours accrue des services antiterroristes face à une menace djihadiste restant élevée et de plus en plus juvénile. Au moins 12 mineurs ont déjà été mis en examen depuis le début de l’année dans le cadre d’enquêtes liées au terrorisme islamiste, une hausse spectaculaire qui ne se constate pas seulement en France mais aussi dans d’autres pays européens. Un phénomène qui s’explique notamment par la réceptivité de ces adolescents en construction, très souvent en proie à des mal-être ou des carences sociales, à la propagande toujours active des organisations djihadistes sur Internet et à leurs discours anti-Occident.
Le 1er août encore, deux mineurs de 15 et 17 ans ont été interpellés dans la région parisienne alors qu’ils projetaient de s’en prendre à des synagogues et à la Tour Eiffel.