Par

Amandine Vachez

Publié le

4 sept. 2025 à 17h48

C’est une affaire qui a marqué les esprits, dans le Nord et bien au-delà. Le 18 septembre 2019, une panthère noire a été aperçue sur les toits d’habitations, rue de l’Avenir à Armentières. Elle est sortie de la fenêtre d’une habitation de la rue, dans laquelle vivait un couple. Six ans plus tard, l’homme, propriétaire de la maison, et son épouse de l’époque, sont passés devant le juge à Lille.

Une affaire riche en rebondissements

L’histoire initiale est déjà surprenante ; les rebondissements lui ont donné des allures de feuilleton. Car la panthère, capturée le jour de sa fuite, avait été hébergée au zoo de Maubeuge. Elle a été volée sur place, et a été retrouvée bien plus tard à l’étranger. Elle est aujourd’hui hébergée dans un sanctuaire pour félins aux Pays-Bas.

Suite à son évasion le 18 septembre 2019, les résidents dd l’habitation de laquelle elle est sortie à Armentières, sont restés quelque temps introuvables. Elle était en Algérie, lui était là le jour des faits, mais avoue ne pas avoir osé se manifester. « Il y avait la police, les pompiers, et surtout les journalistes. J’avais pas envie de faire la Une des journaux », a confié le prévenu au tribunal.

Déjà jugé pour des faits similaires : « Vous êtes parfaitement informé »

Dans la salle d’audience ce jeudi, un homme et une femme de 41 ans. Pour elle, la première convocation devant un tribunal. Pour lui, une nouvelle affaire, dans un parcours qui compose un casier judiciaire « un peu chargé », a rapidement mis en contexte la présidente. Pour l’audience initiale prévue en janvier, il était d’ailleurs en garde à vue. Violences, vol aggravé, recel de vol, trafic de stupéfiants… L’homme a multiplié les démêlés avec la justice depuis 2006, avec huit condamnations. En 2021, il a notamment été condamné pour détention d’animal non domestique. « Un singe », déclare-t-il. « Donc vous êtes parfaitement informé à ce sujet », souligne la présidente, qui rappelle malgré tout dès le début de l’audience : « La panthère est une espèce non domestique, et protégée ».

« J’en ai pris soin », « il l’appelait son bébé »

Au-delà de la question de la simple détention de l’animal, celle sous-jacente du trafic d’animaux a pris une grande place dans cette audience. Un événement qui a accueilli une forte couverture médiatique et a réuni de nombreuses parties civiles, dont la LPA et One Voice, ayant tenu un rôle dans cette affaire.

Du côté des prévenus, le discours est bien rodé. D’ailleurs, la procureure le mettra bien en avant : le duo a été cohérent depuis sa première audition, en octobre 2019. « Ils reconnaissent les faits, restent cohérents et tentent d’expliquer leurs actes. » Lui évoque un lien particulier avec l’animal, dont il a eu à cœur de prendre soin. « Elle était en bonne santé, quand elle a été récupérée. Je l’ai emmenée voir le véto, j’en ai pris soin, j’ai payé pour. »

« Je ne l’ai pas achetée pour faire du trafic. J’ai tenté de lui trouver une place mais c’était impossible. »

Le prévenu, lors de l’audience du 4 septembre 2025 à Lille.

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La panthère a résidé dans son habitation à lui, à Armentières, de mars à septembre 2019. Fin mars, il a été rejoint par son épouse de l’époque. Il lui a présenté comme « un chat » la panthère qu’il a, indique-t-il, trouvé dans un camp des gens du voyage, et payé 2 500 euros. La prévenue avoue non sans mal à la barre qu’elle avait vu qu’il s’agissait d’un félin. « Au départ j’étais contre. Mais j’ai vite vu qu’il y avait un réel attachement entre les deux. Il l’appelait mon bébé. À force, je pense qu’on a occulté le danger. »

« On n’achète pas une panthère pour la garder »

« On n’achète pas une panthère 2 500 euros (‘pas cher’, pour reprendre les mots de monsieur), pour la garder. Une panthère grandit, et c’est l’un des animaux sauvages les plus dangereux… » a souligné l’avocat représentant l’association 30 Millions d’amis.

Le prévenu nie toute volonté de revendre l’animal. Il compte malgré tout parmi ses proches de nombreuses personnes connues de la justice, notamment pour ce type de faits. « Nous sommes aujourd’hui dans une réalité, celle du trafic d’animal. Ce dossier est à sa manière l’illustration de la difficulté à démanteler ce type de réseau » a souligné la procureure. C’est six ans d’enquête, de la police française, avec le concours des autorités belges et néerlandaises. Ce sont de nombreuses investigations qui semblent mettre en valeur des liens avec l’entourage du prévenu, mais qui ont du mal à aboutir.

« Son procès, monsieur l’a déjà eu »

L’avocat de la défense, représentant le prévenu, souligne l’importance de rester concentré sur les faits : « Son procès, monsieur l’a déjà eu, pas en justice mais dans les médias, avec tout ce que cela implique. » Il pointe du doigt les mots « trafic » et « réseau » cités de nombreuses fois au cours de l’audience : « Ce sont des mots forts, vendeurs, il faut bien colorer ce dossier. » Il a souligné l’importance de rappeler que l’animal était, au moment de sa capture, en bonne santé.

18 mois d’emprisonnement et 5 ans sans détenir d’animal

Le prévenu a été condamné à 18 mois d’emprisonnement, entièrement assortis d’un sursis probatoire. Il a diverses obligations et ne pourra pas, pendant 2 ans, détenir un animal. Il devra faire un stage anti-maltraitance animale et devra payer une amende de 10 000 euros.

Son ex-épouse a été déclarée coupable du surplus et écope à ce titre de 4 mois d’emprisonnement, assortis d’un sursis. Elle ne pourra pas détenir d’animal pendant 2 ans. Tous deux doivent reverser des indemnités aux parties civiles. Ils ont la possibilité de faire appel de cette décision.

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