Par
Gil Martin
Publié le
6 sept. 2025 à 11h43
Désigné en juin dernier par LFI comme l’un de ses quatre chefs de file pour les municipales, Rhany Slimane ne partira pas en vacances avec Michaël Delafosse… Le maire de Montpellier est régulièrement critiqué par le candidat Insoumis qui dénonce « la politique macroniste mise en place par l’élu socialiste depuis 2020 ». D’où la volonté affichée de constituer un « front anti-Delafosse » pour les municipales « afin de proposer une autre politique aux Montpelliérains : des actions discutées et décidées avec les habitants et pas seulement prises au 8ème étage de l’Hôtel de Ville ». Cette volonté de mobiliser contre l’édile actuel, LFI la partage avec le Printemps montpelliérain. Peut-être une ligne commune sur laquelle les deux forces pourront tirer pour se rapprocher ?
On vous a quitté au début de l’été sur la nomination de 4 chefs de file… En cette rentrée 2025, l’objectif de LFI a-t-il changé ?
Rhany Slimane : « Non, la priorité est toujours de constituer un bloc de rupture pour mettre fin à 50 ans de main-mise sur la ville d’un véritable clan. Même si nous sommes devant sur Montpellier, il faut discuter avec Cause Commune d’Alenka Doulain et le Printemps montpelliérain. Nous le ferons en temps voulu : l’actualité en ce moment, c’est le lundi 8 septembre et le vote de confiance ou non à François Bayrou, et la journée de mobilisation populaire du 10 septembre que nous soutenons, sans volonté de récupération ».
Il y aura donc, après, un moment pour le dialogue…
RS : « Bien sûr, mais la priorité pour LFI est de co-construire notre programme dans le détail avec les habitants. Nous avons un avant-projet qu’il faut enrichir pour faire en sorte qu’il réponde aux besoins de la population dans tous les quartiers, dont les quartiers populaires, les grands oubliés de la politique de Michaël Delafosse ».
« Michaël Delafosse n’est pas le maire de Montpellier, c’est le maire de la Comédie »
Rhany Slimane
La France Insoumise
Vous souhaitez porter -entre autre- une politique forte en faveur de ces quartiers. Vous n’êtes pas satisfait des la politique locale ?
RS : « Ecoutez, j’habite la cité Saint Martin, un quartier où la Ville n’a rien fait en 6 ans. Quand je dis rien, c’est rien… et elle n’a pas fait mieux dans les autres quartiers. Et cette situation remonte à plusieurs mandatures. Ce n’est pas admissible : plus 20% des habitants de Montpellier vivent dans ces quartiers dont ne peut pas décemment dire qu’ils aient concentré l’attention de la majorité municipale actuelle. Même le réaménagement de la Mosson (dans le cadre de l’ANRU) ne répond pas vraiment aux besoins de la population, malgré les grandes annonces. On a construit une école-usine ? Oui, mais en fermant des écoles de proximité… On refait la piscine olympique ? Elle est fermée depuis plusieurs années et cet été, en pleine canicule, les habitants de la Mosson n’ont pas pu en profiter. Nous proposerons d’ailleurs une mesure spécifique si nous sommes élus : à Montpellier, les piscines seront ouvertes et gratuites pendant les canicules. Bref, le compte n’y est pas pour 1/5ème de la population. En revanche, il n’a échappé à personne que les travaux ont fleuri dans le centre-ville ».
Vidéos : en ce moment sur Actu
A Montpellier, LFI a désigne 4 chef de file : Antoine Bertrand, Livia Jampy, Rhany Slimane et Nathalie Oziol (©CN/Métropolitain)
Un coeur de ville plus beau, réaménagé, étendu, c’est aussi important pour la vitalité de la 7ème ville de France, non ?
RS : « Vous êtes sûrs, compte-tenu de la situation des Montpelliérains, dont près de 20% sont dans une grande précarité, que ces travaux avaient un caractère si urgent que cela ? Le maire a dépensé sans compter pour planter des arbres sur la Comédie, refaire l’Esplanade, la place de la Préfecture, le kiosque Bosc, le tram et l’extension de la ligne 1 vers la gare, etc… C’est à mettre en miroir face à ce qui a été fait pour les quartiers… Je le dis : Michaël Delafosse n’est pas le maire de Montpellier, c’est le maire de la Comédie ».
Votre région, votre actu !
Recevez chaque jour les infos qui comptent pour vous.
Cliquez ici pour visualiser le contenu
Un maire qui pourrait toutefois être réélu en mars 2026. Pensez-vous que son action ne soit pas reconnue par la population?
RS : « Je pense que Michaël Delafosse vit ses derniers mois à la tête de la municipalité. Il est de plus en plus isolé et manque de soutien pour continuer sa politique macroniste. Sa propre majorité a d’ailleurs explosé en cours de route, faut-il le rappeler ? Il y a 6 ans, il a fait l’union avec EELV mais ça n’a pas tenu, les écologistes sont partis, en désaccord profond sur la politique antiécologique du parti socialiste marquée par l’échec de la politique 0 déchets, la bétonisation à outrance, avec les projets du parc Malbosc ou actuellement la Cité Bergère, le COM, et maintenant l’incinérateur ».
« Montpellier a besoin d’un maire ou une mairesse qui s’occupe de tous les habitants, et pas seulement d’embellir ll’Ecusson pour en faire une ville instagrammable »
Rhany Slimane
Accuser Michaël Delafosse de mener une politique macroniste, n’est-ce pas un peu exagéré ?
RS : Non, c’est la réalité. Notre ville est sur le point de s’effondrer, financièrement déjà, avec une dette qui n’a jamais été aussi élevée mais aussi socialement avec une population qui s’appauvrie et dont on se désintéresse. C’est le sillon tracé en France par le macronisme, à coup de décisions décidées par les élites pour les élites. Et on voit bien que Michaël Delafosse a la même attitude de mépris : il impose des décisions prises en petits comités et n’hésite pas à passer en force. Les riverains des 4 Boulevards peuvent en témoigner, eux qu’il a traité de connards… Il doit aussi son isolement à l’absence de dialogue et de prise en compte de la parole des habitants ».
En janvier dernier, victime d’injures racistes suite à une interview, Rhany Slimane a porté plainte (©CN/Métropolitain)
De nombreux projets réalisés par l’actualité municipalité ont été plutôt bien reçus par les Montpelliérains…
RS : « Ceux du centre-ville, peut-être, et encore… je crois surtout que la ville a besoin d’un maire ou une mairesse qui s’occupe de tous les habitants, et pas seulement d’embellir le centre-ville pour en faire une ville instagrammable. Non, l’heure est grave : il faut un changement de méthode ».
C’est quand même beau, une ville instagrammable ?
RS : « Qu’est-ce que ça veut dire, une ville instagrammable ? Qu’on continue à semer des rochers pour chasser les SDF ? Il vaut mieux une ville vivable pour tous les habitants. Ce sera d’ailleurs la colonne vertébrale de notre programme : nous allons faire en sorte que les actions de la ville profitent avant-tout à ses habitants, et pas uniquement aux touristes, ou aux investisseurs, ou aux riches… Une ville doit être attractive, et Montpellier l’est déjà. La 7ème ville de France a surtout besoin maintenant, urgemment, d’une politique sociale forte et équilibrée, d’un vrai programme de transition écologique et énergétique et d’une véritable démocratie populaire, participative. Soit le contraire de ce que fait Michaël Delafosse qui biberonne au macronisme. Lorsque François Bayrou a été nommé 1er Ministre, il a acquiescé. Il a dit dans la presse que ça pouvait aider ».
« Ici, les maires sont fiers de dire qu’ils créent des Folies architecturales comme l’Arbre Blanc à plus de 5000 € le m2 mais il n’y a pas assez de logements accessibles pour les étudiants et les jeunes »
Rhany Slimane
Le changement de société et de méthode demandé par LFI pour la France peut-il être « dupliquer » sur une ville ?
RS : « Les Français sont excédés par des politiques toujours plus favorables aux ultrariches. Ce qu’il faut dans ce pays, c’est un autre projet de société. C’est aussi le cas à Montpellier où les citoyens ne sont pas soutenus dans leur quotidien par les politiques élitistes… Ici comme partout en France, LFI veut s’occuper des citoyens qui se lèvent pour aller bosser, qui oeuvrent à la solidarité, on veut s’occuper des jeunes, des quartiers, et des étudiants. On parle finalement assez peu de ces derniers mais rappelons qu’une grande partie d’entre-eux vivent aujourd’hui dans des conditions très précaires. Un étudiant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté en France, 33 % sautent des repas, soit plus de 38 000 étudiants à Montpellier ».
Cette situation touche aussi d’autres villes étudiantes…
RS : « Bien sûr, mais cette situation locale très forte à Montpellier illustre bien une politique profondément macroniste : on veut bien avoir des étudiants par dizaine de milliers, mais sans rien faire pour eux. On veut bien prendre le peu qu’ils ont, ou l’argent de leur famille qui font ses sacrifices, et qu’ils se démerdent ! A peine 10% d’entre-eux ont accès à un logement étudiant et on voit des files d’attente interminables aux distributions alimentaires. Or, ici, les maires sont fiers de dire qu’ils créent des Folies architecturales comme l’Arbre Blanc à plus de 5000 € le m2, tout en ayant conscience qu’il n’y a pas assez de logements accessibles pour les étudiants et les jeunes qui se lancent dans la vie… C’est quand même hallucinant, non ? Cette contradiction assumée sans complexe, l’acception de la précarité sans mettre les moyens pour la combattre, c’est du macronisme pur jus ».
LFI s’engage à faire plus et à faire mieux ?
RS : « En tout cas, c’est une promesse forte que nous faisons aux Montpelliéraines et aux Montpelliérains : si nous sommes élus, nous nous occuperons enfin de toutes celles et ceux que la Ville a pris l’habitude d’ignorer. J’insiste : la grande question qu’il faut se poser, c’est quel projet de ville et de vie ou veut pour Montpellier ? Il y a des leviers pour agir, encore faut-il vouloir sans saisir. Moi je resterai fidèle dans cette campagne à une conviction : on ne peut gérer la ville sans parler à ses habitants ».
Personnalisez votre actualité en ajoutant vos villes et médias en favori avec Mon Actu.