À 220 mètres d’altitude, sous une immense bâche, la doreuse Cyrielle d’Antoni applique de fines feuilles d’or sur la main de l’enfant de la Bonne Mère. Un travail minutieux qui marque l’une des dernières étapes de la rénovation de ce symbole de Marseille.

Décoiffée de sa couronne en août, la statue de la Vierge à l’enfant protec­trice de la cité phocéenne est depuis mercredi recou­verte de 30.000 à 40.000 feuilles d’or. Objectif : lui redonner l’éclat terni par le mistral, l’air marin et la pollution.

Perchée au sommet de la basilique de Notre-​Dame de la Garde, Cyrielle, cheveux poudrés d’or, utilise sa palette et une légère électricité statique pour attraper les feuilles, avant de les déposer délica­tement. Elle les lisse ensuite à l’aide d’une brosse et d’une eau gélatinée pour fixer la dorure. Munie d’un coussin à dorer fabriqué elle-​même, elle récupère chaque particule précieuse.

Un chantier unique pour la statue de la Bonne Mère

Après la main de l’enfant Jésus, les artisans s’attelleront au visage, aux cheveux, au cou et au reste du corps de la statue. Le chantier, rythmé par le souffle du vent sous les bâches, devrait durer environ un mois. « C’est un honneur et un plaisir de travailler sur un site aussi symbo­lique », confie Mme d’Antoni, origi­naire de la région.

La statue, haute d’une dizaine de mètres, sera redorée sur plus de 100 m² avec à peine 500 grammes d’or. L’échafaudage a été entiè­rement recouvert pour protéger l’ouvrage du vent et de la chaleur, offrant un véritable atelier suspendu.

Une dorure qui devrait durer 50 ans

Selon Xavier David, archi­tecte en charge des travaux, ce chantier est « histo­rique » : l’emballage intégral n’avait jamais été utilisé auparavant. Il permet de travailler hors pollution et d’éviter que la statue n’absorbe le sel de la mer, comme lors des restau­ra­tions passées. Grâce à ce dessa­lement, la dorure pourrait tenir jusqu’à 50 ans, contre 25 à 30 habituellement.

« Je suis saisi person­nel­lement, mais encore plus touché par l’émerveillement de tous : visiteurs, mécènes, ouvriers », souligne l’architecte. Pour financer l’opération, le diocèse avait lancé une campagne de dons, invitant les parti­cu­liers à parrainer une feuille d’or.

Des mécènes mobilisés pour la rénovation

Le chantier global, qui inclut aussi le piédestal, les anges et les façades, repré­sente un budget de 2,8 millions d’euros, dont 2,2 millions pour la dorure seule. Outre les dons des fidèles, plusieurs grands mécènes comme CMA CGM, l’Olympique de Marseille et Pernod Ricard ont contribué au financement.

« Quand la Bonne Mère a été cachée par cette bâche blanche, certains Marseillais s’en sont inquiétés », confie l’architecte. Pour les faire patienter, des spots lumineux ont été installés « à la façon d’un cœur qui bat ». La statue devrait réappa­raître dans toute sa splendeur début décembre.

Avec AFP