Le film « Furcy, né libre », dévoilé lors du Festival du film francophone à Angoulême la semaine dernière sortira dans les Outre-mer en décembre avant sa sortie nationale en janvier prochain. L’occasion pour le podcast « L’Oreille est hardie » de faire sa rentrée avec Abd Al Malik, réalisateur conscient de toute l’ampleur de ce sujet de l’esclavage…

C’est le deuxième long mĂ©trage rĂ©alisĂ© par Abd al Malik, poète – comme il se prĂ©sente lui-mĂŞme -, touche-Ă -tout Ă  la fois rappeur, slameur, Ă©crivain et… cinĂ©aste donc. Furcy, nĂ© libre, c’est aussi le deuxième film de cette envergure – après l’an dernier Ni chaĂ®ne, ni maĂ®tre de Simon MoutaĂŻrou – traitant de front la question de l’esclavage historique et de ses abolitions en France, ce qui suffit dĂ©jĂ  Ă  en faire un film remarquĂ© si ce n’est remarquable. 

Romain Duris et Makita Samba dans « Furcy, nĂ© libre » d’Abd al Malik
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©DR

À travers l’histoire exceptionnelle de l’esclave Furcy qui, au 19ème siècle à La Réunion, s’est battu vingt-sept ans durant pour faire reconnaître, par le droit, sa liberté, Abd Al Malik réalise ainsi non pas un « film d’esclavage » mais construit un récit autour des principes mêmes de liberté et d’affranchissement par soi-même, une œuvre sur le combat d’un individu, construite pour le mieux collectif. 

Le film s’appuie sur le livre L’affaire de l’esclave Furcy de Mohamed Aïssaoui ; livre dont l’adaptation sur grand écran est signée Etienne Comar et Abd Al Malik. Ce dernier nous raconte tout dans ce nouvel épisode du podcast L’Oreille est hardie :

Pourquoi ce titre ? PrĂ©cisĂ©ment parce que Furcy est nĂ© libre, c’est prĂ©cisĂ©ment l’histoire de ce film ! 19eme siècle, Ă®le de La RĂ©union (dĂ©nommĂ©e Ă®le Bourbon Ă  l’époque), Furcy, esclave sur une plantation, qui a appris Ă  lire en cachette, dĂ©couvre dans les affaires de sa mère dĂ©cĂ©dĂ©e des documents prouvant qu’elle avait Ă©tĂ© affranchie et que donc par voie de fait, lui, son fils, est nĂ© libre. Dès lors, son combat sera celui de la libertĂ© – ou plutĂ´t de se battre pour prouver qu’il est nĂ© libre et non esclave – et qu’il n’aurait jamais dĂ» ĂŞtre asservi. 

« Furcy, nĂ© libre » d’Abd al Malik sortira en dĂ©cembre sur les Ă©crans des Outre-mer
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©DR

C’est ce combat qui a fascinĂ© Abd Al Malik Ă  qui on avait proposĂ© il y a dix ans, lors d’un passage Ă  la RĂ©union pour un concert, d’adapter au théâtre le livre de Mohamed AĂŻssaoui, L’affaire de l’esclave Furcy (prix Renaudot de l’essai et prix RFO, 2010). De son propre aveu, Abd Al Malik n’était pas encore prĂŞt pour traiter ce vaste sujet qu’est l’esclavage.

Abd al Malik et Etienne Comar ont adaptĂ© le livre de Mohamed AĂŻssaoui « L’affaire de l’esclave Furcy »
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©DR

Puis au cours des dix annĂ©es qui ont suivi, après avoir tournĂ© abordĂ© le sujet d’abord en faisant la voix française d’un esclave pour un film amĂ©ricain (The birth of a nation – Nate Parker, 2016) puis en travaillant autour de l’une position le modèle noir au musĂ©e d’Orsay ; enfin, en accompagnant le mĂ©morial de Nantes pour la mĂ©moire de l’esclavage et de ses abolitions, les choses et le regard changent : le scĂ©nariste Étienne Cormar en quĂŞte d’un rĂ©alisateur pour tourner l’adaptation de L’affaire de l’esclave Furcy fait appel Ă  Abd Al Malik qui cette fois est prĂŞt ! Il rĂ©alisera ainsi son deuxième long mĂ©trage après Qu’Allah bĂ©nisse la France. Il n’y a pas de hasard dans les destinĂ©es…

Abd Al Malik en tournage à La Réunion
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©Outre-mer la 1ère

Et d’autres vibrations liées cette fois à ses visites à la Réunion achèveront de convaincre le poète-rappeur-écrivain-realisateur qu’un tel projet est à sa portée. Dans L’Oreille est hardie, Abd Al Malik raconte comment il se sent investi d’une sorte de mission en réalisant Furcy, né libre.

D’abord, il faut le dire : si le film d’esclavage est devenu presqu’un genre en soi aux Etats-Unis, force est de constater qu’il est rare en France. Après Ni chaĂ®nes, ni maĂ®tre de Simon MoutaĂŻrou l’an dernier, le seul autre film d’envergure – par sa rĂ©alisation et sa sortie – sera bel et bien ce Furcy, nĂ© libre qui s’est dĂ©voilĂ© lors du Festival du film francophone d’AngoulĂŞme oĂą L’Oreille… a rencontrĂ© Abd Al Malik.

Abd al Malik, Vincent Macaigne et Makita Samba au Festival du film francophone d’AngoulĂŞme
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©Duchilli

Adb Al Malik a voulu faire un film de cinĂ©ma – l’artiste est un grand cinĂ©phile et le 7ème art conjugu et convoque, selon lui, toutes les disciplines artistiques – et dire aussi qu’un film pouvait ĂŞtre pĂ©dagogique mais aussi et surtout un objet de rĂ©conciliation. RĂ©conciliation ? On part d’une histoire singulière, l’esclavage, mais, dit-il en substance, c’est de l’humanitĂ© toute entière dont il s’agit, comme un Ă©cho d’hier Ă  la situation d’aujourd’hui.  

Ana Girardot et Makita Samba, lors du tournage de « Furcy… » Ă  La RĂ©union
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©Jean-Marc Collienne

Sans parler donc de ce vide à combler dans le cinéma français qui a bien du mal à regarder en face son passé esclavagiste et colonial. Tout cela par le canal de la fiction mise service d’une vérité historique à embrasser collectivement. Pour avancer ensemble, pour faire peuple, souligne Abd Al Malik.

Makita Samba et Ana Girardot
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©Jean-Marc Collienne

Et plongez dans l’univers d’Abd Al Malik, artiste indéniablement convaincant et convaincu qui tisse et tire à chaque projet un fil empreint de cohérence, de désir de cohésion, de sens… avec derrière chaque mot dit une pensée claire et des opinions affirmées. Tout cela transpire et transparaît dans l’échange que vous pouvez entendre dans le podcast tout autant que cela se voit dans son film Furcy, né libre. Un propos clair, sans détour sur l’horreur de l’esclavage et sur toute la lumière qui peut naître par ceux qui l’ont combattu d’une façon ou d’une autre.

Abd al Malik, réalisateur de « Furcy, né libre »
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©La1ere

Le film est tout Ă  la fois fort et sensible, ouvert Ă  la rĂ©flexion, nuancĂ© dans l’interprĂ©tation des personnages pour Ă©viter tout manichĂ©isme inutilement lourd – mention spĂ©ciale au rĂ´le principal Makita Samba qui incarne sur vingt-sept ans, tout au long de son combat, un Furcy en proie tout Ă  tour Ă  l’optimisme, au doute, Ă  la rĂ©signation, Ă  la colère, Ă  la dĂ©termination et Ă  Vincent Macaine qui joue le rĂ´le du propriĂ©taire de la plantation.
L’Oreille… et La1ere vous reparleront de ce long métrage à ne surtout pas manquer, à l’approche de sa sortie en décembre dans les Outre-mer et le 14 janvier 2026, sur tous les écrans de France. 

Retrouvez Abd Al Malik dans L’Oreille est hardie, c’est par ICI !

Ou par là : 

« Furcy, né libre », film d’Abd Al Malik avec Makita Samba, Romain Duris, Vincent Macaigne, Ana Girardot…

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