Le Premier ministre japonais a annoncé dimanche sa démission. Une décision prise après la débâcle de son parti aux élections au parlement cet été. Shigeru Ishiba a longtemps fait figure d’outsider dans la politique nippone avant de devenir impopulaire. Agé de 68 ans, il avait pris en septembre 2024, à sa cinquième tentative, la tête du PLD, une formation au pouvoir quasiment sans interruption dans l’archipel depuis les années 1950. Il est ainsi devenu de facto le chef du gouvernement.
Ex-ministre de la Défense et de l’Agriculture, il séduisait alors le public : connu pour sa maîtrise des questions militaires, il se revendique amateur de cigarettes et de trains, d’idoles de la pop des années 1970, et de fabrication de maquettes.
Une popularité en chute
A peine élu, Shigeru Ishiba avait convoqué dès octobre des élections législatives anticipées, espérant asseoir son pouvoir. Mais il avait finalement récolté le pire résultat de son parti en 15 ans : la coalition PLD-Komeito a perdu sa majorité absolue à la chambre basse du Parlement, se voyant contrainte de négocier avec l’opposition.
Sa popularité a chuté, sur fond de flambée inflationniste et de doublement des prix du riz. Un sondage publié début juin par la télévision NHK indiquait que seuls 39 % des Japonais approuvaient l’action du gouvernement.
Finalement, « Ishiba s’est vu acculé dans ses retranchements, ne promettant qu’un soutien financier tardif et timide qui ne contribuera guère à améliorer les perspectives de la demande », estime Stefan Angrick, analyste de Moody’s Analytics.
Faux pas
Fils d’un gouverneur régional et issu de la petite minorité chrétienne de l’archipel, Shigeru Ishiba s’était engagé à « créer un nouveau Japon », à revitaliser les régions rurales et à répondre à « l’urgence silencieuse » du déclin démographique.
Père de deux filles, ce grand fumeur n’a nommé que deux femmes à son cabinet, contre cinq sous son prédécesseur Fumio Kishida. Son image politique s’est rapidement ternie et il a été fustigé pour ses faux pas : costume mal ajusté lors d’une cérémonie, sieste en pleine séance au Parlement, le fait de ne pas s’être levé pour saluer d’autres dirigeants lors d’un sommet au Pérou.
Paradoxe
Cette démission, si elle est confirmée, se fait dans un contexte paradoxal puisque Shigeru Ishiba était en pleine remontée dans les sondages, notamment après l’accord commercial avec les Etats-Unis. La cote de popularité de son gouvernement a connu un rebond surprise fin août atteignant 39 % d’opinions favorables, soit une hausse record de 17 points par rapport à juillet, selon un sondage publié par le quotidien Yomiuri.
Le journal attribue cette remontée notamment à l’accord commercial conclu fin juillet avec les Etats-Unis (deux jours après les élections au Japon) qui a réduit les droits de douane américains de 25 % à 15 %. Mais cet accord intervient après une longue période d’enlisement des négociations commerciales face à Donald Trump, qui ont fait craindre une absence totale de compromis.
Par contraste, Shinzo Abe, Premier ministre japonais à l’époque du premier mandat de Donald Trump, était pour sa part devenu proche du président américain, dont il était réputé avoir l’oreille. Shinzo Abe, qui avait offert à Donald Trump un club de golf doré, avait obtenu de rapides résultats dans la guerre commerciale menée alors par les Etats-Unis, parvenant à protéger le Japon de toute surtaxe douanière américaine. « Il n’y en aura jamais un autre comme lui », avait déclaré Donald Trump après la mort de Shinzo Abe, assassiné en 2022.