Imaginez devoir débourser près de 80 euros chaque mois pour un médicament essentiel à votre santé. C’est la réalité qui attend, dans quelques semaines, des centaines de milliers de Français jusqu’ici protégés par le remboursement. Pourtant, ce changement ne tombe pas du ciel : il est le résultat d’un phénomène inquiétant… et d’une décision radicale de l’Assurance maladie.
Un médicament incontournable pour 700 000 patients
Chaque semaine, ils sont des milliers à franchir le pas de la pharmacie pour obtenir leur traitement. Pour certains, sans ce médicament, rien ne va plus : la glycémie s’envole, la prise de poids s’emballe, et les risques cardiovasculaires s’accumulent. Il s’agit du sémaglutide, commercialisé sous le nom d’Ozempic®, un produit devenu indispensable pour près de 700 000 Français atteints de diabète.
Le sémaglutide appartient à la famille des analogues du GLP-1, une hormone qui régule la glycémie. Ces traitements, comme Trulicity® (dulaglutide), Victoza® (liraglutide) et Byetta® (exenatide), sont strictement réservés aux diabétiques. Pourtant, leur succès ne s’explique pas uniquement par leur efficacité contre le diabète…
Depuis quelques années, un nouvel usage détourne ces médicaments de leur vocation première : la quête de la minceur. Beaucoup de Français non diabétiques les sollicitent en espérant perdre du poids rapidement…
L’effet minceur qui fait débat
Ce n’est un secret pour personne : les analogues du GLP-1 ont un effet secondaire très recherché. Ils diminuent l’appétit, rassasient vite, et peuvent entraîner une perte de 3 à 5 kilos sur plusieurs mois. Mais cet usage “minceur” n’est pas reconnu par les autorités sanitaires françaises.
Les médecins ne sont pas autorisés à prescrire Ozempic® ou ses équivalents dans le seul but de faire maigrir. Pourtant, les demandes explosent, et certains professionnels cèdent à la pression de patients désireux de voir la balance pencher du bon côté…
Attention : utiliser ces médicaments sans indication médicale expose à des risques sérieux. Parmi les effets indésirables possibles : troubles digestifs sévères, pancréatites, voire des complications cardiovasculaires. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) tire la sonnette d’alarme.
Une décision radicale de l’Assurance maladie
Face à cet engouement hors cadre, l’Assurance maladie a décidé de durcir le ton. Depuis le 1er juin, il est déjà nécessaire de présenter un justificatif pour obtenir le remboursement du médicament auprès du pharmacien. Mais jusqu’au 31 août, un remboursement a posteriori restait possible, même après avoir avancé les frais.
À partir du 1er septembre, tout change : plus aucun remboursement ne sera accepté sans justificatif. Impossible donc d’espérer un remboursement après coup. Seuls les patients remplissant scrupuleusement les conditions de prescription — c’est-à-dire les diabétiques — pourront bénéficier d’une prise en charge.
Comment ça va se passer concrètement ?
- Le médecin devra remplir un formulaire officiel lors de la prescription.
- Ce formulaire, remis au patient avec l’ordonnance, prouvera que le médicament est prescrit dans le cadre de l’AMM (autorisation de mise sur le marché).
- Le pharmacien vérifiera ce justificatif avant de délivrer le traitement tout en assurant le remboursement immédiat.
- En cas de prescription hors AMM, le médecin devra indiquer la mention « non remboursable » ou « NR » sur l’ordonnance et prévenir le patient.
Pourquoi une telle mesure ?
Le but principal est de préserver la disponibilité des traitements pour les patients qui en ont réellement besoin. En effet, la multiplication des prescriptions pour la perte de poids a mis en tension les stocks, au risque de fragiliser les personnes diabétiques dépendantes de ces médicaments pour leur équilibre de vie.
Bon à savoir : Les médicaments analogues du GLP-1 autorisés contre l’obésité, comme Wegovy® (sémaglutide), Mounjaro® (tirzépatide) ou Saxenda® (liraglutide), ne sont pas concernés par ce nouveau dispositif. Ils ne sont pas remboursés et coûtent environ 300 euros la boîte, à la charge intégrale du patient.
Qui est concerné par la fin du remboursement ?
En clair, toute personne qui n’est pas diabétique — ou dont la prescription ne respecte pas l’autorisation de mise sur le marché — devra payer le plein tarif, soit environ 80 euros par boîte d’Ozempic® (et des prix similaires pour les autres anti-diabétiques de la même famille).
Pour les patients diabétiques, aucune inquiétude à avoir… à condition de se conformer à la nouvelle procédure. Pour les autres, la tentation du « médicament miracle » se heurtera à une réalité bien plus coûteuse.
« Ozempic a changé ma vie, mais je ne pourrais pas me permettre de l’acheter sans remboursement », confie Jean, diabétique depuis 15 ans. « J’espère que les vrais malades continueront d’y avoir accès, malgré les abus ».
Un bouleversement pour des milliers de Français
La décision de l’Assurance maladie ne concerne pas qu’une poignée de personnes. Selon l’ANSM, près de 700 000 patients sont directement touchés par ce changement de procédure. Pour eux, la vigilance sera de mise dès la rentrée. Pour tous les autres, il s’agira de repenser leurs stratégies de perte de poids et, peut-être, de se tourner vers d’autres solutions moins risquées.
Ce qui est certain, c’est que la chasse aux prescriptions détournées vient de commencer. Et que, pour de nombreux Français, le 1er septembre marquera la fin d’une ère… et le début d’un nouveau parcours de soins.