M6 capture d’écran
Dans « L’Amour est dans le pré » sur M6, une photo nue reçue par Géraldine choque les téléspectateurs.
CONSENTEMENT – La scène a choqué les spectateurs de L’amour est dans le pré. Dans l’épisode diffusé le lundi 8 septembre sur M6, Géraldine, éleveuse d’alpage, a vécu devant la caméra une (très) mauvaise surprise : recevoir une photo de nu non sollicitée, et non consentie.
En ouvrant la lettre d’un de ses prétendants, elle est en effet tombée nez à nez avec la photo d’un homme nu, sous sa douche, cachant simplement ses parties intimes avec ses mains. « Là, non, ce n’est pas possible », déclare alors Géraldine à la caméra. Avec un rire gêné, elle remet rapidement la photo dans l’enveloppe pour ne plus la voir.
Même si ce n’est techniquement pas une « dick pic », la séquence rappelle un malaise qu’ont déjà vécu de nombreuses femmes. D’après un sondage YouGov, en 2017, une femme de la génération Y sur deux avait déjà reçu une photo d’homme nu qu’elle ne voulait pas, une exhibition désormais punie par la loi. Pour Le HuffPost, la spécialiste de l’éducation affective et sexuelle et présidente de l’organisme de formation COMITYS Maëlle Challan Belval revient sur les bases des échanges d’images de soi respectueux.
Le HuffPost. Que vous a inspiré la séquence de cette agricultrice exposée à une photo de nu à la télévision ?
Maëlle Challan Belval. C’est a minima maladroit, voire violent. L’espace public organise les choses pour que personne n’ait à se montrer nu sous le regard de l’autre dans la rue, parce que ça peut être source de gêne ou de malaise. Pourquoi les espaces d’interaction entre personnes, qui ne sont pas consentantes, ne seraient pas soumis à la même réserve ?
Est-ce une question que vous abordez dans le cadre de l’éducation à la vie affective et sexuelle ?
Ça m’a beaucoup fait penser à un thème qu’on travaille avec les jeunes que nous accompagnons. On sait que les « nudes » les intéressent beaucoup, et au sens plus large, à la question de la pudeur : ce qui gêne, ce qui ne gêne pas.
Nous les invitons à se poser les questions suivantes : qu’est-ce que la séduction ? Est-ce qu’envoyer une photo de moi nu, c’est une manière de séduire, ou est-ce qu’il y a d’autres façons de faire ? Est-ce qu’il faut directement passer par l’exhibition, ou est-ce qu’il y a d’autres manières d’entrer en relation, y compris pour cultiver la sensualité ?
Il y a une manière d’entrée en relation qui est parfois « pornographiée » : en te déballant ma camelote, je vais t’emballer, ce n’est pas possible que tu ne craques pas. C’est une méconnaissance crasse de la relation, y compris du désir sexuel, si on parle sexualité. S’il suffisait de montrer des pénis pour que les gens soient directement excités, ça se saurait ! J’ai une formation de conseillère conjugale et de thérapeute, je sais bien à quel point il ne suffit pas d’afficher un sexe pour faire naître un désir intime. C’est violent, mais c’est aussi inefficace.
Est-ce que ce cadre est le même quelle que soit la relation entre les deux personnes qui échangent, si elles sont en couple par exemple ?
Ce n’est pas la même chose entre deux personnes qui auraient consenti à échanger ce qu’ils souhaitent. Et dans le cadre d’un couple, on est sur une question de respect de l’autre, de son corps, de son intimité. Dans une relation amoureuse, toutes ces notions ne sont pas forcément cadrées, mais c’est important de demander à l’autre : « Qu’est-ce qui te va, qu’est-ce qui te convient ? »
Il faut prendre en compte ce qu’elle souhaite. « Est-ce que c’est le bon moment ? Est-ce que tu en as envie ? », quelle que soit la nature d’une relation, ce sont des questions importantes. L’envie de voir ou de ne pas voir, de montrer ou de ne pas montrer, au-delà du cadre légal, ça n’est même pas nécessairement une question de sexualité. Ça concerne tout le monde : dans les structures de soins entre patients et soignants, avec les enfants…