En quelques jours, l’information fait le tour de la planète. Prenant sa source dans l’un des médias les plus respectés, le Financial Times, elle fait réagir jusqu’au président américain, Donald Trump : la Russie est à n’en pas douter derrière le brouillage du signal GPS d’un avion transportant la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Le 31 août, l’appareil ayant décollé de Varsovie, en Pologne, aurait eu toutes les peines du monde à se poser, au niveau de l’aéroport de Plovdiv, en Bulgarie. Au point de tourner en rond une heure durant et de contraindre les pilotes à employer de bonnes vieilles cartes en papier. L’incident est plausible… Mais bidon.
C’est le site internet de suivi du trafic aérien Flight Radar qui a soulevé le lièvre, données techniques à l’appui. Premier constat au vu de la trajectoire de l’avion : s’il n’a en effet pas pu utiliser de signal GPS pour se poser, se reposant alors sur le système ILS, l’appareil n’a dû prolonger son approche à l’atterrissage que de quelques minutes. Surtout, l’engin n’a pas été victime d’un brouillage de son signal GPS.
Les données prouvent une absence de brouillage GPS
Pas de «spoofing» en vue, qui leurre le positionnement, comme l’atteste les données ADS-B émises par l’avion, ni même de «jamming», technique de brouillage plus basique. Pour le démontrer, Flight Radar s’est appuyé sur les données dites NIC, pour «Navigation integrity category», qui encodent la qualité et la cohérence des données de navigation reçues par l’avion. Le site a également épluché le paramètre dit NACp, indiquant le niveau de précision de la position GPS. Résultat ? L’avion n’a pas été victime d’une attaque visant à brouiller son signal GPS.
La cause de l’incapacité des pilotes à pouvoir utiliser le signal GPS pour atterrir reste donc pour l’heure inconnue. S’agit-il d’un simple problème technique de l’appareil ? Une enquête est en cours. Seule certitude : la première version de l’incident par les autorités européennes ne correspond pas aux faits, et a sans doute été émise par intérêt politique. Ces accusations précipitées envers la Russie ont conduit à un rétropédalage brouillon au niveau notamment des autorités bulgares, comme le site Politico s’en est fait l’écho. Peut-être s’expliquent-elles par le fait que la veille, le même appareil avait bel et bien subi des interférences de son signal GPS, au-dessus de l’Estonie, près du golfe de Riga. Sans que la source en soit toutefois connue.
Pour autant, le brouillage GPS demeure une vraie problématique pour le transport aérien. Des Pays Baltes jusqu’au Proche-Orient, en passant par la mer Noire, plusieurs pays ou groupuscules protègent leurs frontières à grands renforts de brouilleurs, pour empêcher drones et autres missiles d’atteindre leurs cibles. Un écran de fumée électromagnétique dont l’usage a explosé ces dernières années et qui perturbent bel et bien l’aviation commerciale. Les pilotes sont formés et les industriels planchent sur des mesures de protection.
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