« C’est pas vraiment le genre d’endroit où on a l’habitude de me voir, n’est-ce pas ? » lance Kendji Girac depuis une bibliothèque, donnant le ton de cette soirée particulière. L’émission suit le parcours de sept personnalités âgées de 20 à 70 ans qui, accompagnées par Aurore la formatrice, se sont lancées dans un défi de huit semaines pour réapprendre les bases de la lecture et de l’écriture. Le gagnant de l’édition 2014 de The Voice, endosse le rôle de parrain bienveillant, apportant son soutien à ces adultes courageux qui ont décidé de ne plus subir l’illettrisme.
« J’ai quitté l’école parce que je me sentais pas bien »
Face caméra, Kendji Girac livre un témoignage poignant sur son parcours scolaire chaotique. « On m’a mis dans une classe de gitans et j’apprenais pas beaucoup », confie-t-il avec sincérité. Le chanteur évoque cette période douloureuse où « j’ai commencé à sentir ce sentiment de honte » et explique avoir « quitté l’école parce que je me sentais pas bien ». Cette honte l’a poussé à abandonner précocement ses études pour rejoindre son père dans le monde du travail, loin des bancs d’école qui lui rappelaient ses difficultés quotidiennes.
Sept parcours, une même détermination
Les participants de l’émission présentent des profils variés mais partagent tous la même volonté de s’en sortir. Patrick, 63 ans, assume avec franchise : « j’ai le niveau à peu près d’un enfant de 8 ans » et raconte comment « quand j’étais petit, l’écriture et la lecture étaient trop compliqués pour moi, on me mettait de côté. » Malgré ces blessures, il affirme être « fier de me prendre en main ».
La première épreuve révèle toute la complexité du quotidien : faire ses courses au supermarché avec une liste écrite. Ce qui paraît simple devient un véritable parcours d’obstacles quand on ne maîtrise pas la lecture. Aurore, la formatrice, demande à chaque participant de revenir avec des produits spécifiques : du riz basmati, du chocolat praliné, des œufs bio ou encore du vinaigre de Xérès. Face à ces étiquettes indéchiffrables, chacun déploie ses propres stratégies.
Patrick dévoile son astuce avec malice : « Au lieu d’écrire des mots sur ma liste de courses, je fais des dessins. » Pour identifier les œufs bio, sa logique touche par sa simplicité : « S’il y a la photo de quelqu’un sur la boîte, c’est que c’est lui qui les a récoltés et qu’ils sont bio, non ? » Ces participants font habituellement leurs achats « à l’aveugle », ne sachant pas toujours ce qu’ils mettent dans leur panier.
Moment particulièrement émouvant, Mario, 45 ans, s’applique à écrire les prénoms de ses cinq enfants sous les encouragements d’Aurore. « Je ne veux pas qu’un de mes enfants soit dans le même cas que le mien. Ils savent lire et écrire, je suis fier d’eux », déclare-t-il, la voix chargée d’émotion.
« Maman, tu vas pouvoir connaître ton fils »
Au-delà de l’émission, Kendji Girac a franchi une étape supplémentaire en écrivant son autobiographie. C’est surtout la version audio qu’il a enregistrée qui révèle sa démarche personnelle. « Je vais lire les 300 pages, enregistrer ma voix. Je l’ai surtout fait pour ma mère, je veux qu’elle écoute l’histoire de son fils pour en savoir plus sur moi », explique-t-il. Cette démarche prend une dimension particulièrement touchante quand il s’adresse directement à sa mère, elle aussi confrontée à l’illettrisme : « On est pudiques à la maison, ce que j’ai dit dans ce livre, je l’ai jamais dit à ma mère. Je lui ai dit ‘Maman, je l’ai enregistré en audio comme ça tu vas pouvoir connaître ton fils comme jamais tu l’as entendu », confie-t-il, visiblement ému. Son livre « Mi Vida » retrace son parcours depuis l’enfance jusqu’à sa notoriété actuelle, offrant un témoignage authentique sur les obstacles surmontés et les victoires remportées dans son combat contre l’illettrisme.