Par

Léa Pippinato

Publié le

10 sept. 2025 à 12h30

Quinze ans déjà. Le 8 septembre 2010, l’Arena de Montpellier ouvrait ses portes avec un concert d’Indochine. Depuis, plus de 3 millions de spectateurs ont franchi ses portes, et la salle a accueilli plus de 300 événements : concerts, compétitions sportives, congrès, expositions. Aujourd’hui baptisée Sud de France Arena, implantée dans la commune de Pérols, elle reste la plus grande salle de spectacle d’Occitanie et l’un des équipements majeurs du sud de la France.

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Construite à Pérols, dans la continuité du Parc des Expositions, l’Arena a marqué un tournant pour le territoire. À l’époque, elle n’avait aucun équivalent. Elle fut la première grande salle multimodale en région, pensée dès l’origine pour conjuguer trois univers : la culture, le sport et l’événementiel économique. Quinze ans plus tard, ce pari semble gagné. Depuis 2019, la SPL Occitanie Events investit dans ses espaces et génère une rentabilité d’exploitation qui soutient le développement du territoire.

De Shakira à Sting, de l’EuroBasket aux championnats du monde de patinage artistique, en passant par les finales européennes de League of Legends, l’Arena a multiplié les rendez-vous mémorables. Son rôle a aussi évolué : le marché du spectacle a changé, les usages ont muté, l’événementiel professionnel s’est imposé. Désormais gérée par la SPL Occitanie Events, présidée par Marie-Thérèse Mercier, conseillère régionale de la Région Occitanie, et dirigée par Cédric Fiolet, la salle poursuit sa mue. Interview.

Quinze ans après son inauguration, que représente l’Arena pour vous ?

Cédric Fiolet : C’est un symbole. Quand elle a ouvert, en 2010, c’était la deuxième Arena de France et la première en région. Une salle multimodale, pensée pour accueillir des concerts, du sport et des événements professionnels. Personne n’y croyait vraiment. Beaucoup estimaient qu’une ville comme Montpellier n’avait pas la capacité d’attirer assez d’artistes et de compétitions pour la faire vivre. Quinze ans plus tard, nous avons prouvé l’inverse. L’Arena a trouvé sa place dans le paysage national et elle a contribué à renforcer l’image de la métropole.

Marie-Thérèse Mercier : C’est un outil qui a mûri avec élégance. Il faut rappeler l’audace visionnaire de Georges Frêche. C’est lui qui a voulu doter Montpellier de cette salle pionnière, à une époque où peu de villes y croyaient. Sans son ambition et sa capacité à anticiper, l’Arena n’aurait pas vu le jour. Elle reste moderne, modulable, adaptée à tous les formats. Et surtout, elle a accompagné l’évolution des pratiques culturelles et sportives. Nous avons vu se succéder des générations de publics : les fans de variétés, de rock, de rap, les amateurs de sport, les jeunes passionnés d’e-sport, les congressistes venus du monde entier.

Vidéos : en ce moment sur ActuLe marché du spectacle a beaucoup évolué.

Cédric Fiolet : En 2010, les grandes stars internationales passaient encore par des salles de 14 000 places. Shakira, Rihanna, Beyoncé pouvaient venir à Montpellier. Aujourd’hui, c’est terminé. Les tournées mondiales nécessitent des jauges de 50 000 ou 60 000 spectateurs. Elles vont dans les stades ou dans les festivals. Cela a profondément changé notre programmation. Nous continuons d’accueillir des artistes internationaux, mais sur des jauges intermédiaires : 8 000 à 13 000 places. Sting, le Cirque du Soleil ou 50 Cent, par exemple. Et nous travaillons beaucoup plus avec la scène française, qui est en plein essor. L’urbain a pris une importance considérable. C’est la musique la plus écoutée en France aujourd’hui. Des artistes comme SDM ou Ninho remplissent l’Arena en quelques semaines, avec parfois deux dates à la suite. En parallèle, les artistes de variétés restent très demandés. Les 4 dates d’Indochine en mars ont affiché complet. Nous devons composer avec cette diversité. C’est une force : l’Arena n’a jamais été cantonnée à un seul genre. Elle accueille du rock, du classique, du rap, de la variété, de l’électro. Et c’est cette pluralité qui la rend vivante.

Concerts, compétitions sportives, congrès, expositions : plus de 300 événements se sont déroulés dans cette salle multimodale.
Concerts, compétitions sportives, congrès, expositions : plus de 300 événements se sont déroulés dans cette salle multimodale. (©Mario Sinistaj)

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L’Arena, c’est aussi une salle de sport.

Marie-Thérèse Mercier : C’est près de 40 % de notre activité. Nous avons accueilli presque tous les sports indoor possibles : handball, basket, tennis, gymnastique, judo, patinage, e-sport. La seule discipline que nous n’avons pas encore organisée est la natation. Pourtant, la salle a été aussi conçue pour ça : les fondations peuvent supporter un bassin olympique temporaire. Mais le coût est énorme, souvent plus d’un million d’euros pour un seul événement. Ce n’est viable qu’à l’échelle des Jeux Olympiques. Le sport a aussi une dimension politique et symbolique. Quand l’Arena accueille un championnat international retransmis en direct, ce sont des millions de téléspectateurs qui voient Montpellier et l’Occitanie. Cela dépasse l’événement en lui-même. C’est une vitrine, une façon de montrer que notre territoire est capable d’organiser des rendez-vous de dimension mondiale.

Depuis quelques années, l’e-sport a trouvé sa place à Montpellier. Pourquoi ce choix ?

Marie-Thérèse Mercier : C’était une volonté assumée. Nous voulions capter un public jeune, qui n’allait pas forcément dans les salles de concert ou aux matchs de handball. L’e-sport est un phénomène culturel mondial. Accueillir les finales européennes de League of Legends a été un tournant. L’Arena était pleine, l’ambiance incroyable. Les parents découvraient que ce n’était pas seulement du jeu vidéo, mais une discipline compétitive, avec un vrai public et des enjeux économiques. 

Cédric Fiolet : Nous avons montré que l’e-sport avait toute sa place dans un grand équipement comme celui-ci. Mais nous devons rester vigilants. Tous les jeux ne sont pas adaptés. Certains sont trop violents. League of Legends est parfait : univers fictif, ambiance bon enfant, compétition saine. Pour nous, l’e-sport est une diversification précieuse. Il apporte de nouveaux publics, de nouvelles opportunités et une image moderne. C’est un axe que nous allons continuer à développer.

Au fil des années, les congrès et événements professionnels ont pris une place importante. Comment avez-vous conquis ce marché ?

Cédric Fiolet : C’est un des volets le moins visible pour le grand public, mais il est décisif dans l’équilibre économique de l’Arena. Au départ, convaincre un organisateur de congrès de venir dans une salle de spectacle relevait presque de l’utopie. Les grandes institutions choisissaient des palais des congrès classiques, avec des auditoriums et des espaces modulables. Mais le marché a évolué. Les congrès ont grandi, certains nécessitent désormais des milliers de mètres carrés, des zones d’exposition, de restauration, de circulation. Et c’est là que l’Arena s’est imposée comme un outil unique, en complément du Parc des Expositions voisin. Nous pouvons accueillir une plénière de 7 000 personnes dans l’Arena, organiser à côté une exposition avec des stands, des ateliers, et loger la logistique dans les halls du parc. Cela a convaincu de très grands congrès de venir, comme celui des notaires, celui des experts-comptables ou encore l’Union sociale pour l’habitat. Aujourd’hui, Montpellier est identifiée au niveau national comme une destination capable de recevoir des congrès parmi les plus importants de France.

Marie-Thérèse Mercier : Ce succès tient aussi à l’évolution de l’offre hôtelière. Il y a quinze ans, Montpellier ne disposait ni de la quantité ni de la qualité d’hôtels nécessaires pour accueillir 5 000 congressistes dans de bonnes conditions. Désormais, nous avons des établissements haut de gamme, qui répondent aux standards internationaux. Les participants ne viennent pas seuls, ils sont souvent accompagnés, et ils cherchent une destination attractive. L’atout méditerranéen, la qualité de vie de la région, la mer, le soleil, les possibilités touristiques… tout cela compte énormément.

Cette complémentarité avec le Parc des Expositions est-elle un atout décisif ?

Cédric Fiolet : Absolument. L’Arena et le Parc Expo ne sont pas deux équipements séparés. Ils forment un même outil, un complexe événementiel. Pour un congrès de grande ampleur, nous avons besoin de cette articulation. L’Arena accueille la grande séance plénière, les halls du Parc Expo hébergent les stands, les zones de restauration, les espaces de networking. Pour l’Open Occitanie, par exemple, le tournoi se joue dans l’Arena, mais le village officiel et toutes les animations partenaires s’installent au Parc Expo. Même chose pour le crossfit, qui a eu besoin de plusieurs halls pour déployer ses installations. Sans cette complémentarité, nous ne serions pas capables d’accueillir des événements de cette taille.

Pour Marie-Thérèse Mercier, l’Arena reste un héritage visionnaire de Georges Frêche et un équipement moderne.
Pour Marie-Thérèse Mercier, l’Arena reste un héritage visionnaire de Georges Frêche et un équipement moderne. (©Mario Sinistaj)Le nom de l’Arena a changé plusieurs fois. Que représente aujourd’hui le naming « Sud de France » ?

Marie-Thérèse Mercier : C’est bien plus qu’un simple logo sur une façade. Le naming, c’est une visibilité à l’international. Quand l’Arena accueille une compétition sportive retransmise en direct dans des dizaines de pays, la marque « Sud de France » apparaît partout. C’est de la communication en temps réel pour la région et ses produits. À l’époque de Park & Suites, c’était un partenariat privé, un contrat de visibilité pour une chaîne hôtelière. Depuis 2017, avec « Sud de France », nous sommes revenus à un naming ancré dans le territoire. C’est important politiquement, car l’Arena appartient à 100 % à la Région Occitanie. Associer le nom de la salle à la marque régionale, c’était logique et cohérent.

Cédric Fiolet : Et cela dépasse la communication. Nous travaillons aussi sur l’expérience proposée aux spectateurs. Dans les loges VIP, dans les bars, nous mettons en avant les produits Sud de France, les vins, les spécialités locales. Ce n’est pas cosmétique, c’est un fil rouge. Cela renforce l’identité du lieu et donne une cohérence entre le nom, le contenu et l’expérience vécue.

On parle beaucoup de développement durable et de RSE. Comment l’Arena s’inscrit-elle dans cette démarche ?

Cédric Fiolet : En 2019, la SPL Occitanie Events a été créée pour reprendre la gestion de l’Arena et du Parc Expo. C’était l’occasion de redéfinir nos valeurs d’entreprise. Nous avons choisi trois mots : accueillante, créative et engagée. « Engagée », cela voulait dire mettre en œuvre une vraie politique RSE. Depuis, nous avons obtenu la certification ISO 20121, qui est la référence européenne pour le management responsable des activités événementielles. C’est une norme exigeante, qui nous oblige à progresser en permanence. Concrètement, cela veut dire que nous avons investi plusieurs millions d’euros dans le tri des déchets, l’éclairage, l’efficacité énergétique. En 2019, seuls 35 % de nos déchets étaient recyclés ou valorisés au niveau du complexe événementiel. En 2024, nous étions à 55 %. Nous avons aussi installé des fontaines à eau, créé une salle de repos auditif, un jardin et désimperméabilisé le sol au cœur du complexe…Nous travaillons actuellement avec une association spécialisée pour mieux accueillir les personnes atteintes de handicaps invisibles. En plus, l’Arena ne partait pas de rien, elle a notamment été dotée dès le départ de 11 000 m2 de panneaux solaires en toiture à sa construction.

Marie-Thérèse Mercier : Il faut aussi rappeler que nous avons entraîné tout un écosystème derrière nous. Les traiteurs, les prestataires son et lumière, les installateurs techniques… Beaucoup se sont mis à leur tour dans une démarche de certification RSE. Quand nous répondons à un appel d’offres pour un grand congrès, la partie « développement durable » peut représenter plusieurs pages du cahier des charges. Si nous n’étions pas engagés dans cette dynamique, nous perdrions ces  événements. La RSE est devenue un critère décisif. C’est un travail collectif qui va bien au-delà de la salle.

Quels travaux ou aménagements imaginez-vous pour l’avenir de l’Arena ?

Marie-Thérèse Mercier : Nous travaillons sur les questions énergétiques. L’installation de panneaux photovoltaïques sur les parkings est une piste, tout comme l’amélioration de l’isolation et de la climatisation dans les halls du Parc des Expositions. Avec le réchauffement climatique, il faut qu’ils soient utilisables l’été. Nous avons déjà investi 8 millions d’euros en 2021, mais il reste encore beaucoup à faire. La prochaine délégation de service public, qui débutera en 2027, sera l’occasion de poser ces choix. Et bien sûr, nous avançons en cohérence avec la Région et sa présidente Carole Delga, qui soutient pleinement cette vision d’un équipement durable. Nous réfléchissons aussi à une meilleure ouverture sur l’extérieur. Pourquoi ne pas imaginer, à terme, des espaces de restauration accessibles en permanence, ou des animations qui incitent les spectateurs à rester plus longtemps après un match ou un concert ? L’Arena ne doit pas être un lieu fermé, mais un espace vivant au service du territoire.

Le 12 septembre, vous organisez une soirée anniversaire. Pourquoi ce choix de fêter les 15 ans de cette façon ?

Cédric Fiolet : Nous voulions un événement grand public, accessible à tous. Pas seulement une réception institutionnelle pour les élus et les partenaires. Nous avons donc choisi d’organiser une grande soirée électro. Joachim Pastor, Agoria BtB Notre Dame, Kungs et les Cosmics Boys s’enchaineront aux platines pour cette soirée festive. Le tarif est symbolique : 15 euros. L’idée est claire : permettre au plus grand nombre de célébrer ces 15 ans, de venir découvrir ou redécouvrir la salle. Évidemment, il y aura aussi un moment plus institutionnel, avec une table ronde où des usagers de l’Arena – producteurs, clubs et organisateurs de congrès – témoigneront de ce que représente cet équipement. Mais la fête, ce sera pour tout le monde.

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