Par
Hugo Hancewicz
Publié le
20 avr. 2025 à 6h16
« C’est un coupe-gorge, je n’y mets plus les pieds. » Le constat de Fès est sans appel. Comme beaucoup d’habitués du quartier Montparnasse (15e), il évite désormais le centre commercial Maine-Montparnasse, situé au pied de la célèbre tour de 210 mètres de haut. Jadis animé, l’espace semble aujourd’hui écrasé par la masse du gratte-ciel, déserté par les enseignes, abandonné par ses visiteurs. Stratégiquement placé à la frontière des 6e, 14e et 15e arrondissements, le centre aurait pu rayonner. Mais en réalité, il se vide inexorablement, victime d’un enlisement urbanistique. Depuis plusieurs années, de nombreux projets se sont succédé, mais sans succès. En cause : des blocages et des désaccords politiques. Mais dernièrement, les discussions se sont accélérées et un nouveau projet pourrait bel et bien voir le jour.
De nombreuses fermetures à la chaîne
Avant même de franchir les portes de la galerie, le ton est donné. Une rapide recherche sur Google suffit à refroidir les plus téméraires : « Lieu d’urbex ? », « En quasi-faillite », « Tristounet », « Totalement à l’abandon ». Une mise en bouche peu engageante… et sur place, la réalité ne fait que confirmer ces impressions. Rideaux baissés, vitrines vides, allées sombres : près de 90 % des commerces ont tiré le rideau au cours des cinq dernières années. Une lente agonie, accompagnée d’odeurs persistantes et d’un éclairage défaillant.
Sur place, les commerçants préfèrent rester discrets. « On réfléchit à fermer dans les prochains mois, confie un employé d’un magasin de textile, le lieu est mort, on a de moins en moins de clients ». Même le maire du 15e arrondissement, Philippe Goujon (LR), le reconnaît : « C’est très glauque ». Depuis plusieurs, il tire la sonnette d’alarme sur la situation du centre commercial.
Depuis cinq ans, environ 90 % des commerces du centre commercial ont fermé. (©HH/actu Paris)Aux alentours, des galeries plus attractives
Malgré tout, quelques rares enseignes résistent, à l’image du C&A, dont les rayons, bien garnis, semblent tenir bon au milieu du vide. Mais pour beaucoup, la messe est dite. Anouk, croisée au pied de la tour, ne voit plus l’intérêt d’y mettre les pieds. « Quand je fais les magasins, je vais aux Ateliers Gaîté », explique cette trentenaire parisienne. Ouvert en 2022 à deux pas de là, ce centre flambant neuf attire désormais l’essentiel de la clientèle du quartier avec une offre moderne et variée. Une rude concurrence qui n’a pas été dans le sens du centre commercial sous la tour.
« La galerie de la gare est aussi bien plus attrayante, ajoute-t-elle. L’offre y est plus dynamique, complémentaire avec celle des Ateliers Gaîté. » Pour elle, pas question de s’aventurer dans les allées lugubres et désertes de Maine-Montparnasse. Et elle n’est visiblement pas la seule à avoir tourné la page. Fès aussi opte plutôt pour des commerces alentour ou préfère même se déplacer « dans un endroit quartier de Paris ».
Le cas de Maine-Montparnasse n’est pas isolé. À Paris, d’autres quartiers voient leur tissu commercial se déliter. À la Porte Maillot (16e), la fréquentation des lieux est en berne. Sur le boulevard Saint-Michel, dans les 5e et 6e arrondissements, les rideaux tombent les uns après les autres. Une lente érosion qui inquiète élus et riverains.
Vers un projet concret ?
Mais alors que la maire du 14e arrondissement, Carine Petit (EELV) – qui n’a pas répondu à nos sollicitations – était accusée de bloquer les projets depuis plusieurs années, la mairie centrale a finalement tranché. Un nouveau projet devrait voir le jour dans le quartier, et notamment sur la partie du centre commercial. Alors que les précédents projets prévoyaient de le détruire, il devrait être maintenu et considérablement modifié. « C’est dans l’intérêt public », assure Philippe Goujon. D’autant plus que la Ville de Paris n’aura quasiment rien à investir.
Mais des questions juridiques doivent encore être réglées pour enclencher la marche avant. « Il va y avoir une étude pour savoir si le PLU doit être modifié », glisse l’édile du 15e. Dans le cas contraire, le certificat d’urbanisme qui court jusqu’à la fin de l’année serait suffisant pour démarrer le projet. Côté calendrier : une réponse devrait être apportée dans les mois à venir. « C’est un projet qui s’annonce gigantesque », prévient l’élu.
Suivez toute l’actualité de vos villes et médias favoris en vous inscrivant à Mon Actu.