Se lancer en politique ? À peu près tout son entourage a tenté de l’en dissuader. À commencer par sa mère, Cécilia Attias. « Elle connaît mieux que personne les sacrifices et la violence de l’exercice. Mais je suis vacciné aux insultes depuis que je suis né », confie le fiston, 28 ans. Depuis toujours, deux choses passionnent Louis Sarkozy : la guerre et la politique. « C’est tout ce que je suis, ce que je lis, ce que je regarde. D’ailleurs, ma femme m’a fait remarquer qu’on n’a jamais vu un film drôle depuis qu’on est ensemble. » Le Franco-Américain, qui a fait l’académie militaire de Valley Forge en Pennsylvanie, rêvait de porter l’uniforme des marines. Jusqu’à ce que l’administration américaine l’informe sans ambages que ses liens familiaux seraient un frein irréversible à sa carrière. Oubliés le cliquetis des armes et l’adrénaline des combats, ce sera donc la politique, une guerre d’un autre genre. Et ce sera pour la France. Ce printemps, le plus jeune des fils Sarkozy a ainsi quitté la banlieue de Washington où il était installé avec son épouse croate, Natali Husic.

Son premier fait d’armes, Louis Sarkozy a prévu de le réaliser à Menton. Une ville des Alpes-Maritimes où il n’a fait que passer mais que connaît bien Natali, dont la soeur a vécu à Beausoleil, à quelques kilomètres de là, aux portes de Monaco. L’objectif : s’emparer de la mairie. Un secret de Polichinelle récemment dévoilé via une vidéo sur Instagram et une lettre à ses habitants. En attendant d’en faire son fief, le couple loue déjà dans la ville une maison d’une centaine de mètres carrés, dans le quartier familial du Haut Borrigo. On n’y voit pas la Grande Bleue, mais le café du matin se boit en rêvassant face à la montagne, où sont perchés les villages de Sainte-Agnès et de Castellar. Dans leurs bagages, ceux que le jeune ambitieux a surnommés « mon fils » et « ma fille », à savoir Hitch, un golden retriever de 7 ans, et Phasma, un shiba inu.

Louis Sarkozy et Natali avec leurs deux chiens, Phasma, un shiba inu, et Hitch, un golden retriever. Natali et Louis Sarkozy sont mariés depuis 2022.

Louis Sarkozy et Natali avec leurs deux chiens, Phasma, un shiba inu, et Hitch, un golden retriever. Natali et Louis Sarkozy sont mariés depuis 2022.

Paris Match
/
© Nathan Laine

« Je ne me suis pas caché sur une liste, dit-il. Je me soumets au suffrage. Il faut prendre des risques »

« Paris, c’est une horreur. Et Nice, c’est Paris au soleil, explique le nouvel arrivant. Nous voulions vivre et élever notre enfant en bord de mer, dans une ville moyenne où les prix ne sont pas exorbitants. Et n’être qu’à une heure et demie d’un aéroport international pour aller voir mes parents et ceux de Natali, qui habitent à Kinshasa depuis quarante ans. » Natali accouchera tout de même à Paris, où le couple a conservé un pied-à-terre, avec le médecin, un ami, qui la suit depuis toujours. Sous sa casquette d’essayiste, Louis continue de passer ses vendredis et samedis dans la capitale pour assurer ses chroniques sur LCI, lui qui intervient aussi sur RMC et dans l’hebdomadaire « Valeurs actuelles ».

Louis Sarkozy avec Natali, qui s’amuse : « Le bébé bouge beaucoup. Il fait du jujitsu brésilien ! » Le sport de combat préféré de son mari.

Louis Sarkozy avec Natali, qui s’amuse : « Le bébé bouge beaucoup. Il fait du jujitsu brésilien ! » Le sport de combat préféré de son mari.

Paris Match
/
© Nathan Laine

Louis Sarkozy avec Natali, sa première auditrice, il répète sa chronique pour RMC au petit déjeuner. Chez eux, à Menton, où un studio d’enregistrement a été improvisé.

Louis Sarkozy avec Natali, sa première auditrice, il répète sa chronique pour RMC au petit déjeuner. Chez eux, à Menton, où un studio d’enregistrement a été improvisé.

Paris Match
/
© Nathan Laine

Évidemment, le choix de Menton ne tient pas qu’au soleil et à ses citrons. Empêtré dans une affaire autour de la gestion des ports, son maire Les Républicains, Yves Juhel, 80 ans, ne se représentera pas. Solidement implantée, la députée RN Alexandra Masson, elle, s’y voit déjà. Un espace reste vacant dans lequel Louis Sarkozy a vu l’opportunité d’exister politiquement. On lui reproche à raison d’être « parachuté ». « Il n’y a pas eu un seul maire originaire de Menton depuis la Libération », balaie-t-il d’un revers de main. Son programme est encore en gestation. Le jeune candidat dit vouloir axer sa campagne sur la nouveauté, le rassemblement dans cette ville d’un peu plus de 30 000 habitants marquée par des « querelles de clocher ». L’insécurité le préoccupe : « Il y a dix ans, il y avait trente SDF que tout le monde connaissait et qui se comportaient bien, argumente-t-il. Aujourd’hui, il y en a plus de cent, que personne ne connaît et qui se comportent très mal. » Le candidat mise sur la détermination. « Si on croit en quelque chose, il faut y aller à fond. Je ne me suis pas caché sur une liste. Je ne me suis pas non plus fait nommer ‘sous-secrétaire aux choux-fleurs’ par Les Républicains. J’arrive dans une ville où je ne suis pas né, où le Rassemblement national est bien assis, et je me soumets au suffrage. C’est mon nom, ma crédibilité et celle de ma famille qui sont sur la table. Il faut prendre des risques. Les Américains ont cette expression ‘skin in the game’, mettre de la peau dans le jeu. Moi j’ai mis de la peau. Moi je vais jouer ! »

Adolescent en surpoids, il a « détesté être gros ». « Toute sa vie, mon fils me verra faire du sport », assure-t-il

Longtemps pourtant, le benjamin Sarkozy a semblé se chercher. Sa première apparition officielle s’est faite sous les dorures de l’Élysée, le jour de l’investiture paternelle le 16 mai 2007. Le petit garçon émerveillé par le decorum de la cérémonie a longuement observé le grand collier de la Légion d’honneur et lu sur chaque médaille le nom d’un président, jusqu’à y trouver celui de son père. La fierté a laissé place à la blessure, celle du divorce parental, et à l’épreuve de l’exil à New York, où il a grandi avec sa mère et son beau-père, Richard Attias. En 2014, il a la fougue d’un jeune homme de 17 ans et la presse s’amuse de ses échanges de tweets, aussi vindicatifs que truffés de fautes, avec Léonard, fils de la première dame Valérie Trierweiler. L’année suivante, c’est sa romance, riche en rebondissements, avec Capucine Anav, ex-star de la téléréalité, qui défraie la chronique. En 2019, le voilà qui lance, en partenariat avec la marque de mocassins Boonper, « The Enigma Collection by Louis Sarkozy », donnant à chaque création le nom d’un esprit influent tel Marie Curie, Sigmund Freud ou Thomas Jefferson… Il a étudié la philosophie et l’histoire à l’université de New York, travaillé dans le privé, mais aussi pour la banque interaméricaine de développement et à l’ambassade de France à Washington.

La suite après cette publicité

Louis Sarkozy à 3 mois dans les bras de son père, avec sa mère, Cécilia, à Benerville-sur-Mer, en août 1997.

Louis Sarkozy à 3 mois dans les bras de son père, avec sa mère, Cécilia, à Benerville-sur-Mer, en août 1997.

Paris Match
/
© Thierry Esch

L’émotion en famille à l’Élysée. Louis, avec Pierre et Jean, les deux fils aînés de Nicolas Sarkozy, et Judith et Jeanne-Marie, les filles que Cécilia a eues avec Jacques Martin

L’émotion en famille à l’Élysée. Louis, avec Pierre et Jean, les deux fils aînés de Nicolas Sarkozy, et Judith et Jeanne-Marie, les filles que Cécilia a eues avec Jacques Martin

AFP
/
© STF

Louis Sarkozy alors qu’il fête son diplôme de l’académie de Valley Forge avec ses compagnons, en 2014.

Louis Sarkozy alors qu’il fête son diplôme de l’académie de Valley Forge avec ses compagnons, en 2014.

© Instagram

À la rentrée 2024, c’est un Louis Sarkozy nouveau, présenté comme spécialiste des États-Unis, qui apparaît à l’antenne de LCI. Passionné de tir, d’armes, d’échecs et d’arts martiaux, le barbu de 1,90 mètre n’hésite pas à sortir le bazooka, comme lorsqu’il lance à propos du Hezbollah et du Hamas : « Qu’ils crèvent tous ! Israël fait le travail de l’humanité. » Il s’avère plus posé lors de la promotion de son premier ouvrage, « Napoléon Bonaparte, l’empire des livres » (aux éditions Passés / Composés). Le premier empereur français reste un modèle pour Sarkozy fils. On retrouve sa présence aussi bien sur les mugs du petit déjeuner qu’à la petite salle de sport improvisée à l’extérieur au-dessus de laquelle flotte le drapeau du 1er régiment des grenadiers de la Garde impériale. « Quand on pense qu’on souffre, on se rappelle ce que ces hommes ont vécu, ça rend humble », dit-il en souriant.

Ses douleurs à lui sont avant tout physiques. Sur son banc de musculation et dans sa cage à squat, il repousse ses limites cinq à sept fois par semaine et consigne méticuleusement tous ses entraînements sur un carnet pour « traquer les progrès ». Sa femme s’amuse à y laisser dessins et doux mots d’encouragement. En politique comme dans la vie, Louis Sarkozy croit aux vertus de la testostérone. Il prend de la créatine, surveille de près ses apports en protéines, entre 200 et 220 grammes par jour, et complète sa routine avec du vélo d’appartement et du jujitsu brésilien, sa passion depuis quatre ans. Le gaillard de 91 kilos, ancien adolescent en surpoids, affirme « avoir détesté être gros » et a opéré un changement radical quand il était en école militaire aux États-Unis, loin de sa famille, selon une méthode spartiate. « J’ai passé un an et demi à faire du sport et à m’affamer. Je bouffais une salade César le midi et un yaourt à la pêche le soir. J’ai perdu dix kilos. Je ne les ai pas repris et je ne les reprendrai jamais. » Il promet : « Toute sa vie, mon fils me verra faire du sport. Les enfants écoutent ce que vous dites mais font ce que vous faites. »

L’entraînement du fan d’arts martiaux à l’USC de Menton, situé à quelques pas seulement de… la mairie. Séance de « Luta livre » avec Jérémie Falsone, un habitué.

L’entraînement du fan d’arts martiaux à l’USC de Menton, situé à quelques pas seulement de… la mairie. Séance de « Luta livre » avec Jérémie Falsone, un habitué.

Paris Match
/
© Nathan Laine

Louis Sarkozy lors d’un sparing avec Alice Michalkiewicz, à son club USC de Menton.

Louis Sarkozy lors d’un sparing avec Alice Michalkiewicz, à son club USC de Menton.

Paris Match
/
© Nathan Laine

Natali ne fait pas de politique, ne lit pas les commentaires sur son époux et passe assez inaperçue dans les rues de Menton

Ce fils à venir naîtra fin octobre. Ses parents, ensemble depuis 2017 et mariés cinq ans plus tard dans le Vaucluse, se sont enfin accordés sur un prénom. Les conditions étaient strictes : celui-ci ne devait pas être commun mais romain, avoir une connotation slave et africaine – hommage à l’enfance de Natali – et ne pas excéder deux syllabes afin d’éviter les surnoms. « Marcus » a tenu la corde les six premiers mois de la grossesse mais c’est finalement « Sylla » qui a été élu. En slave, cela signifie « force ». Petit hic tout de même, souligne le futur père féru d’histoire : « Sylla est vu comme un dictateur romain qui a pris le pouvoir et massacré ses ennemis politiques. » La chambre du bébé n’est pas encore prête. Il en faut plus pour que Natali panique. Douce et délicate, la future mère ne réalise pas encore le chamboulement qui les attend. Elle franchit les étapes les unes après les autres sans jamais se départir de son sang-froid. « Je ne suis pas la première, je ne serai pas la dernière. Si autant de personnes l’ont fait avant moi, je peux le faire aussi », dit-elle avec un délicieux accent.

L’année a été dense pour la trentenaire. Pianiste de formation, elle a terminé un master ultrasélectif dans le développement international, tout en travaillant à temps plein en parallèle pour un think tank saoudien et une entreprise de développement international. Elle a démissionné au moment de rejoindre la France, puis est tombée enceinte. Timing parfait ! La Croate se donne jusqu’à janvier avant de reprendre une activité. Pas question de rester au foyer pour celle qui a grandi avec une mère, pianiste également, fondatrice de plusieurs écoles de musique et orphelinats en Afrique, toujours en activité à presque 70 ans. Natali ne fait pas de politique, ne lit pas les commentaires sur son époux et passe assez inaperçue dans les rues de Menton. Plus pour longtemps. « Il y a cinq mois, on était risibles. Il y a trois mois, on est devenu sérieux. Aujourd’hui, on fait peur à tout le monde. On a foutu le bordel », analyse celui qui ignore encore s’il se présentera sous la bannière Les Républicains ou sans étiquette. Il faut dire que ses détracteurs lui en collent déjà à foison… « Parisien », « fils de », « New-yorkais », « libéral », « trop à droite »… Ses années américaines passées loin de l’Hexagone ?

Louis Sarkozy avec Natali, 34 ans ce mois-ci, sur la plage des Sablettes à Menton (Alpes-Maritimes), le 3 septembre. Tatoué sur son bras droit: «Ki ore irat od Loovis ». Référence à un chant de croisade du XIIe siècle : «Qui désormais ira avec Louis ne redoutera plus jamais l’enfer. »

Louis Sarkozy avec Natali, 34 ans ce mois-ci, sur la plage des Sablettes à Menton (Alpes-Maritimes), le 3 septembre. Tatoué sur son bras droit: «Ki ore irat od Loovis ». Référence à un chant de croisade du XIIe siècle : «Qui désormais ira avec Louis ne redoutera plus jamais l’enfer. »

Paris Match
/
© Nathan Laine

Comme un parfum de campagne. Louis Sarkozy en visite à l’Huilerie Saint-Michel à Menton, avec Karim Djekhar, le directeur, le 2 septembre.

Comme un parfum de campagne. Louis Sarkozy en visite à l’Huilerie Saint-Michel à Menton, avec Karim Djekhar, le directeur, le 2 septembre.

Paris Match
/
© Nathan Laine

« Son père, Nicolas Sarkozy, l’a averti : ‘Tu es jeune, c’est très bien. Les gens votent pour des jeunes. Mais ils doivent rassurer deux fois plus’ »

« C’est surtout un frein pour les bobos parisiens. J’ai vécu mes douze premières années en France, je suis français et fils d’un président de la République. Avoir grandi aux États-Unis laisse une marque indiscutable que j’assume. C’est une richesse d’avoir pu comparer les systèmes et les philosophies de deux cultures. » En matière de définition, les actes parlent parfois mieux que les mots. Ainsi, le 3 septembre, le politicien en herbe réalisait ce qu’il estime être un joli coup médiatique : une interview du président argentin, Javier Milei, diffusée via son podcast « En toute liberté ». Flirter avec le chef d’État populiste à la tronçonneuse ne le dérange nullement, au contraire. « Milei a réduit la pauvreté dans son pays, détruit l’inflation, dérégulé les marchés de l’immobilier, ce qui a généré un boom dans le secteur. Je m’associe sans aucun problème ! » assume celui qui a été invité à l’investiture de Trump. À la diffusion de l’entretien, Pascal Obispo lui a envoyé ces quelques mots : « Le jeune loup a faim. » « C’est joli comme message, non ? » sourit Louis à sa lecture.

Un jeune loup… qui écoute religieusement les conseils d’un vieux sage. Nicolas Sarkozy lui prodigue ainsi des conseils personnalisés. « Il m’a dit : ‘Tu es jeune, c’est très bien. Les gens votent pour des jeunes. Mais ils doivent rassurer deux fois plus.’» Malin, il lui a aussi conseillé de maintenir son annonce de candidature au 8 septembre, jour de la chute du Premier ministre, François Bayrou. « Je voulais décaler. Il m’a dit : ‘Tu es complètement con, maintiens, tu seras le seul. Tout le monde t’accuse d’être le candidat national. Mais toi, tu parles à Menton, tu te fiches de ce qu’il se passe à Paris !’ C’est le genre de truc qu’il sort en un claquement de doigts et dont tu te dis ‘Pourquoi je n’y ai pas pensé !’ » En mars 2026, lors des élections municipales, Louis aura encore 28 ans. L’âge auquel son père a été élu à la tête de Neuilly-sur-Seine. « L’idée d’être maire au même âge que mon père, je peux vous assurer que c’est une bonne motivation. Ça aide à se lever le matin ! »