Les chats, c’est sa passion. Et en même temps, son désespoir. Eric Desbois vient en aide à tous les chats du quartier. Les esseulés, les cabossés, les blessés, les malades. Un engagement à propos duquel ce riverain de Saint-Roch se sent bien seul. Pour ne pas dire abandonné. À l’image de ces félins livrés à eux-mêmes dès la naissance, qu’il nourrit, abreuve, soigne comme il peut. Chez lui, il y en a cinq, dont trois petits et leur mère, récupérés il y a peu, en piteux état. Et qui commencent à savourer leur nouvelle vie entre coussins moelleux et litières propres. Choyés par Eric et son épouse. Mais dehors, boulevard Pape Jean-XXIII et dans les environs, entre clos de boules et école des Orangers, des zones boisées, envahies de ronces et de déchets en tous genres, sont les habitations de fortune et à ciel ouvert des chats en survie.
Croquettes et pâtés à ses frais
Eric Desbois raconte: « On avait une voisine qui aidait les chats. Cela remonte à 4 ans. Je lui donnais un coup de main. Elle est décédée cette année, alors, j’ai repris le relais. Je nourris les chats en difficulté dans le secteur. Avec des croquettes, de la pâtée que j’achète. Je leur donne à boire aussi. Le jour, on les voit peu. Ils sortent le soir. Il y en a une vingtaine. Des mâles, des femelles, des petits qui naissent à intervalles réguliers. »
Des animaux mal nés: « J’ai vu des chats déchiqueter des sacs-poubelles ou dévorer des croûtons de pain! » Des affamés. Portant parfois des entailles, des plaies à la tête, sur le corps. « Il y a 2 ans, j’ai trouvé un chat avec un œil ouvert. Une bénévole d’une association de défense féline a tenté de le capturer. En vain. J’y suis finalement parvenu. J’ai même fait d’autres captures. En tout, trois chats. Soignés par un vétérinaire et stérilisés grâce à la Fondation 30 Millions d’Amis qui finance des bons de stérilisation. C’est en mettant le pied dans cet univers de détresse, de chattes enceintes, de chatons en péril, difficiles à approcher, que j’ai pris conscience de l’ampleur du problème. C’est à ce moment-là que j’ai voulu prendre contact, cet été, avec le service municipal du bien-être animal. »
» Je n’ai pas ressenti d’empathie »
Deux chatons survivent grâce aux gamelles régulières, mais restent vulnérables.
Photo Ch.R.
Selon Eric Desbois, les choses ne se sont pas très bien passées: « Je n’ai pas ressenti d’empathie, dès l’accueil téléphonique. J’ai aussi le sentiment que c’est un service fantôme, qui ne fait rien. Or, on est en droit d’attendre qu’il soigne les chats blessés ou à l’agonie. J’ai vu des petits chats mourir sur place… Le Code rural impose aux municipalités la gestion des chats errants… »
D’autre part, ce riverain de Saint-Roch affirme avoir multiplié les démarches auprès de refuges et d’associations de protection animale. En vain selon lui: « Tous disent être débordés, ne pas disposer de matériel et on dirait que les chatons ne les intéressent pas, car on ne peut pas encore les stériliser. » Il en faut plus pour décourager cet ami des matous: « J’ai envoyé un courrier au préfet, il y a trois semaines. Je n’ai toujours pas de réponse. J’ai en outre signalé l’inaction du service bien-être animal au département juridique de la Fondation Brigitte Bardot… »
Henry-Jean Servat, l’adjoint à qui le maire de Nice a retiré sa délégation pour la protection des animaux, en juin 2023, pour avoir critiqué sa politique culturelle, est lui aussi sur le coup. Le journaliste people ami des stars, toujours élu à Nice, a conseillé à l’habitant de Saint-Roch de reprendre attache avec la Fondation Brigitte Bardot « pour savoir exactement ce que nous pouvons demander comme aide à la Ville ».
La Ville soutient les actions associatives
Concernant l’aide de la Ville, Richard Chemla, adjoint délégué à la Protection animale, apporte une réponse tout en applaudissant l’action d’Eric Desbois: « 2 reprises, j’ai eu ce monsieur au téléphone et je lui ai dit bravo pour sa très bonne initiative. Seulement, je lui ai suggéré de rejoindre une association ou d’en créer une, car nous, Ville de Nice, nous ne pouvons pas aider les particuliers. On a déjà cinq ou six associations qu’on subventionne. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi ce monsieur continue d’agir seul. »
À propos des chats de Saint-Roch: « Notre délégation est allée plus de sept fois dans ce quartier pour faire le point avec diverses associations. Nous ne travaillons qu’avec des associations agréées. »
Quant aux stérilisations de félins, Richard Chemla les évalue, pour toute la ville, « entre 350 et 400 par an ». Une action à laquelle participe une autre structure: « La Ville de Nice donne entre 20 et 30.000 euros annuels. La Fondation 30 Millions d’amis en amène autant. »
Un manque de bénévoles
L’investissement d’Eric Desbois est également salué par l’association Assistochat, qui veut quand même recadrer un peu les choses. Corinne, bénévole depuis 10 ans, témoigne: « Ce monsieur, très volontaire, très investi, je l’aide depuis 2 ans pour les captures et pour trouver des familles d’accueil. C’est vrai, la situation est compliquée, mais il ne faut pas décrier le travail des associations. C’est du bénévolat en plus de notre métier, très tôt le matin, très tard le soir. »
Un manque de bénévoles? Probablement. Stéphanie, autre membre d’Assistochat confirme: « Trois capteurs pour deux associations sur la ville, ce n’est pas beaucoup et il y a des îlots de chats errants partout. Les cages de captures sont achetées par les bénévoles. Depuis 2023, nous sommes toujours venues lorsque Monsieur Desbois nous a appelées. On fait ce qu’on peut. Les élus ne donnent pas les moyens nécessaires pour réduire ces foyers de détresse et il y a peut-être un tour de table à envisager pour améliorer les choses… »