Paris, Lyon et Marseille pourraient bientôt rentrer dans le rang. Les députés ont voté en commission la réforme du scrutin municipal dans ces trois villes. Depuis 1982, les électeurs des trois villes les plus peuplées de France n’élisent pas le conseil municipal comme ailleurs.
Ils votent par arrondissement ou par secteur (regroupement d’arrondissements) afin d’élire les conseillers municipaux. Le nombre de conseillers d’arrondissement (ou de secteur) accédant au conseil municipal est proportionnel au nombre d’habitants de l’arrondissement. À Lyon par exemple, le 1er arrondissement ne « rapporte » ainsi que 4 conseillers municipaux, quand le 3e en amène 12. Le maire est ensuite élu par le conseil municipal comme dans les autres villes, c’est la loi PLM.
Hidalgo élue en ayant perdu l’élection dans son arrondissement
Conséquence de cette loi, le maire peut être élu sans avoir la majorité des voix. Par exemple, Bertrand Delanoë (PS) a remporté la mairie de Paris en 2001 alors que la droite était majoritaire en nombre de voix. La même année, Gérard Collomb (PS) a été élu dans les mêmes conditions à Lyon.
Autre incongruité due à cette loi, un maire peut être élu en ayant été battu dans son arrondissement. C’est par exemple le cas d’Anne Hidalgo, battue au second tour dans le XVe arrondissement de Paris en 2014 mais élue par le Conseil de Paris.
Les macronistes opposés à la loi PLM
Autant de cas à part qui expliquent les critiques subies par cette loi depuis plusieurs années, ses détracteurs voulant y appliquer le même mode de scrutin qu’ailleurs dans le pays où les électeurs votent directement pour leur maire.
Du côté des pourfendeurs de cette loi PLM, on retrouve de nombreux macronistes, la proposition de loi votée en commission est d’ailleurs présentée par deux d’entre eux, les députés parisiens Renaissance Sylvain Maillard et David Amiel, mais aussi Rachida Dati, qui vise une candidature dans la capitale sous une bannière commune LR – Renaissance.
La ministre de la Culture estime qu’il s’agit d’une « réforme très attendue par les Parisiens ». Le Premier ministre François Bayrou soutient également le texte.
Hidalgo dénonce un « incroyable bidouillage électoral »
Mais pour Anne Hidalgo, il y a d’autres urgences à gérer. Pour elle, François Bayrou mène cette réforme « pour des raisons de circonscription dans laquelle il pourrait faire élire une de ses proches. Les autres arguments ne tiennent pas », assurait-elle en mars dernier sur France Inter, n’hésitant pas à dénoncer un « incroyable bidouillage électoral ».
Car derrière ce soutien du Premier ministre à un texte dont l’urgence ne saute pas aux yeux, certains y voient l’ombre de Rachida Dati. Juste avant de rentrer au gouvernement à la surprise générale, l’élue LR elle avait elle-même parlé d’un « deal » passé avec Emmanuel Macron, qui se serait engagé à la soutenir lors des élections municipales de 2026.
Quelques jours plus tard, Emmanuel Macron avait annoncé en conférence de presse son intention de réviser la loi électorale Paris-Lyon-Marseille. De quoi laisser imaginer à certains qu’Emmanuel Macron a mis la pression à son Premier ministre de soutenir cette loi.
La gauche et la droite divisées
À droite comme à gauche, le texte divise. Anne Hidalgo y est donc opposée, le maire de Marseille Benoît Payan est lui favorable tout comme l’Insoumis Manuel Bompard, et l’écologiste lyonnais Grégory Doucet réclame davantage de temps pour cette réforme.
À droite, Rachida Dati soutient la réforme, mais Bruno Retailleau et ses soutiens y sont opposés, comme plusieurs élus parisiens de droite. Renaud Muselier, ancien LR désormais Renaissance, signait en février dernier une tribune pour s’opposer à cette réforme, aux côtés d’élus de droite à Marseille. Signe que même chez les soutiens d’Emmanuel Macron, la réforme est loin de faire l’unanimité.
En 2020, cela n’aurait rien changé
Du côté des électeurs, selon un sondage Ifop-Fiducial commandé par le journal Lyon Capitale le 3 février dernier, 81 % des Lyonnais souhaitent élire leur maire directement. Mais concrètement, comme le rappelle Le Progrès, le résultat de 2020 n’aurait pas été différent dans les communes concernées, loi PLM ou non.
Si cette loi aboutit, l’électeur aura deux bulletins en main en mars 2026 : celui du maire de secteur ou d’arrondissement et celui de la mairie centrale. De quoi complexifier un peu plus l’organisation du scrutin à Paris, Lyon et Marseille.
Prochaine étape, un examen le 7 avril en séance publique, et un texte qui semble loin de pouvoir aboutir, notamment sans les voix du Rassemblement national qui a d’autres préoccupations en tête.