Le chef étoilé Yannick Alléno et son association Antoine Alléno, du nom de son fils tué par un chauffard, s’est uni à l’artiste JR pour une oeuvre éphémère réunissant 1.330 portraits de proches de victimes de la route, sur le pont d’Iéna à Paris, visible toute la journée de samedi.

Vendredi, une centaine de bénévoles a procédé au collage sur le pont d’Iéna, long de 173 mètres et situé au pied de la Tour Eiffel, des portraits en noir et blanc de parents, frères ou soeurs de victimes décédées après avoir été fauchées par des automobilistes.

« Ce qu’on voulait symboliser avec cette oeuvre d’art, c’est déjà la quantité, c’est impressionnant. Je crois que l’immensité du mal, de la peine est là, devant nos yeux. C’est bien de la matérialiser », a expliqué à l’AFP Yannick Alléno, dont le fils Antoine a été tué en mai 2022, percuté tout à côté du pont d’Iéna par un conducteur alcoolisé ayant pris la fuite.

« Il faut comprendre qu’après un drame pareil, c’est de la violence permanente. L’institut médico-légal, vous allez voir votre gamin, la violence administrative, etc. Et la violence pour les enfants qui restent, qui ont la double peine. Ils perdent un frère, une sœur, et en plus ils perdent leurs parents, qui sont complètement désemparés », souligne-t-il.

« Donc c’est pour ça que nous voulons alerter, montrer en fait ce dégât », poursuit le chef cuisinier, dont le projet s’intitule Alive, « parce qu’il faut que ceux qui restent aient l’envie de rester vivants ».

L’artiste JR, qui a livré son concept pour cette oeuvre, est venu en visiteur vendredi lors du montage et du collage de l’oeuvre, qui sera démontée samedi soir après une mise en scène de plusieurs tableaux et d’un scintillement exceptionnel de la Tour Eiffel durant deux minutes.

« C’est extrêmement touchant de les voir tous oeuvrer, coller, parce que tout ça vient d’eux, c’est leur idée entièrement. C’est quelque chose de très beau parce que je vois la partie la plus importante de mon travail qui est l’impact social, le lien qui est créé entre les gens, et en même temps, ce n’est plus mon projet, c’est le leur », explique JR à l’AFP.

« C’est cette humanité de voir des familles qui ne se sont jamais rencontrées, qui traversent la même peine et qui se retrouvent aujourd’hui ici. Le pont rouvrira et les gens remarcheront, mais on n’oubliera jamais qu’à un moment ces images ont été collées là », projette JR.

Le projet a reçu le soutien vendredi de Brigitte Macron, venue à titre amical pour la famille Alléno, ainsi que de la maire de Paris Anne Hidalgo.

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