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Mathilde Carnet

Publié le

12 sept. 2025 à 17h06

Cet après-midi d’août 2025, la valise de Vanessa Fontaine n’aura pas voyagé bien loin : une quarantaine de kilomètres depuis Autheuil-Authouillet pour rejoindre le studio photo de Stéphanie Barillier, à La Saussaye (Eure).

Une valise préparée minutieusement, accompagnée d’une liste de chansons et aussi, forcément, d’un peu d’appréhension. À 39 ans, Vanessa, accompagnante périnatale et mère de deux enfants, s’apprête à participer, pour la première fois, à une séance de photothérapie.

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Des photos, mais aussi beaucoup de discussion entre la photographe et sa cliente. ©Mathilde CarnetLe pouvoir de la photographie

Stéphanie Barillier, photographe professionnelle depuis un an et demi, est aux manettes… ou plutôt à l’objectif. Cette ancienne infirmière en psychiatrie mêle, dans ses séances de photothérapie, ses deux passions : la photo, et « l’humain ». « Ces séances, je les appelle ‘être une femme’. Pendant trois heures, on travaille sur l’estime de soi : s’accepter tel que l’on est », explique la photographe. Son rôle, c’est d’amener ses clientes à porter leur regard sur leurs atouts plutôt que sur leurs défauts. « Avec la photographie, on peut jouer sur les lumières, accentuer certains traits, en masquer d’autres », précise-t-elle.

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Stéphanie Barillier danse et s’amuse avec Vanessa, pour la mettre à l’aise. ©Mathilde CarnetMaladie, vieillesse, complexes…

Des adolescentes aux femmes âgées, Stéphanie fait des séances de photothérapie avec tous types de femmes : après un cancer, pour accepter de vieillir, pour assumer ses complexes… « Les clientes viennent toutes chercher quelque chose, en photothérapie. » Il faut compter 210 euros la séance de trois heures, sans le tirage des photos.

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De prime abord, la photographie n’est pas l’alliée de Vanessa. « Je ne suis pas très à l’aise dans mon corps, pas du genre à me prendre en selfie », annonce-t-elle. Pourtant, en rencontrant Stéphanie dans d’autres circonstances, la jeune maman a eu envie de s’offrir un moment pour elle et, peut-être, d’enfin se trouver jolie. « J’ai envie de retrouver de la bienveillance envers mon corps », ajoute-t-elle.

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La robe interdite

Pour la séance, Vanessa a dû apporter plusieurs tenues : celles de tous les jours, dans lesquelles elle est à l’aise : ce sera une jupe longue rose et un haut simple noir ; une tenue qu’elle aime, mais qu’elle n’ose pas mettre : la longue robe rose, serrée à la taille, qu’elle a tant hésité à mettre pour le mariage de son frère… avant de ne pas réussir, au dernier moment ; et enfin une tenue plus sexy, de la lingerie, pour la dernière partie de la séance, si Vanessa le souhaite.

Avant de passer devant l’objectif, Vanessa passe sous les pinceaux d’Audrey Lecomte, maquilleuse et associée de Stéphanie. Elle qui ne se maquille pratiquement pas reçoit les conseils de la professionnelle, tout en restant, comme elle le souhaite, « naturelle ».

Les problèmes de poids engendrent une charge mentale énorme.

Vanessa Fontaine, cliente

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La cliente revient quelques jours après la séance pour découvrir les photos, et choisir celles qu’elle veut garder. ©Stéphanie Barillier

Vient ensuite un moment d’échanges entre la cliente et la photographe. Stéphanie lui pose une série de questions. « Quelle est ta plus grande qualité ? – La générosité. – Envers toi-même ou envers les autres ? -… » Touché. « Quel sentiment aimerais-tu éprouver à ton égard ? – Être fière de mon corps. » Vanessa explique avoir pris beaucoup de poids et essayé, depuis plusieurs années, de s’assumer. « Les problèmes de poids engendrent une charge mentale énorme. Pour le mariage de mon frère, je me suis pris la tête pendant trois mois. À chaque repas, c’est un casse-tête… »

Plus que l’aspect physique, Vanessa en a aussi « voulu à son corps » lorsqu’elle a eu du mal à avoir des enfants. « Que tu n’aimes pas ton ventre, ce n’est pas anodin », avance Stéphanie. Vanessa parle aussi de ce qu’elle aime : ses yeux, ses cheveux, ses jambes, ses mains, et de ce qu’elle attend de la séance : « Je veux redevenir amie avec mon corps. »

Lâcher prise sous l’objectif

Vanessa enfile sa première tenue. Sous l’objectif de Stéphanie, elle a dû mal à se lâcher, à savoir comment se positionner, à être naturelle. Pour l’aider, la photographe danse avec elle, lance la playlist de musiques choisies par la cliente, et l’encourage à oublier sa présence et à lâcher prise. Au fil des musiques, Vanessa se laisse emporter par l’atmosphère bienveillante qui règne et se met à danser.

Vient ensuite la partie plus intense de la séance. Vanessa doit enfiler la robe qu’elle n’ose pas mettre. Le fond passe du blanc au noir, la lumière est plus tamisée. Vanessa est invitée à extérioriser ses émotions négatives, à s’en débarrasser. Les mains posées sur ce ventre qu’elle n’aime pas, les yeux fermés, Stéphanie lui demande de lâcher prise, par un cri. Habituée au contrôle et à la retenue, Vanessa n’ose pas vraiment puis, lorsque Stéphanie lui prend la main, elle fond en larmes. « Ça fait remonter des choses : ce qui fait que je suis dans cette situation, ce qui ne me plaît pas chez moi… » explique-t-elle après coup.

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« J’ai réalisé que je pouvais me trouver jolie. Je ne pensais pas en être capable. » ©Stéphanie Barillier« J’ai réalisé que je pouvais me trouver jolie »

La troisième partie de la séance vise à ce que la cliente devienne ce qu’elle voudrait être. En lingerie -certaines clientes terminent même le shooting nues-, Vanessa doit aller au-delà de ses complexes, porter son regard sur ses atouts.

En sortant de la séance, la jeune maman est ravie. Quelque temps plus tard, elle retourne au studio pour voir le résultat et choisir les photos qu’elle souhaite garder. « En termes d’ego, ça m’a boostée. J’ai réalisé que je pouvais me trouver jolie. Je ne pensais pas en être capable. »

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