La mauvaise note était attendue, mais elle arrive dans une séquence particulièrement tendue pour la France avec la chute du gouvernement Bayrou, la nomination de Sébastien Lecornu et les manifestations durant le mouvement « Bloquons tout ». Depuis vendredi soir, le pays a en effet été rétrogradé dans le club des simples A pour sa dette publique.
En la plaçant à A+, Fitch a donc abaissé cette note souveraine. Ouvrant le bal des revues d’automne des agences de notation, Fitch dresse un constat sévère de la situation des finances publiques dans la deuxième économie de la zone euro.
Premières réactions politiques
Pointant la « fragmentation et la polarisation croissante » de la politique, l’agence estime que « cette instabilité affaiblit la capacité du système politique à mettre en œuvre une consolidation budgétaire d’ampleur ». Elle juge ainsi improbable de ramener le déficit public sous 3 % du PIB en 2029 comme l’ambitionnait le gouvernement sortant pour remettre la France dans les clous européens.
Les réactions politiques n’ont pas tardé. Le ministre sortant de l’Economie, Éric Lombard dit prendre « acte ». Pour François Bayrou, qui a dénoncé à l’envi la colossale dette française, « un pays que ses « élites » conduisent à refuser la vérité est condamné à en payer le prix ». A l’opposé, Éric Coquerel, président LFI de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, voit dans cette dégradation le résultat de « deux mois (d’)un discours catastrophiste sur la situation financière du pays ».
Le spectre d’une hausse des taux
Nommé mardi à Matignon, Sébastien Lecornu est engagé dans une course contre la montre pour présenter dans les temps un budget 2026 qui puisse échapper à la censure des oppositions, notamment celle du PS qui réclame de revenir sur la réforme des retraites et de mettre en place une taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines. Il a également commencé à consulter les partenaires sociaux, dans un climat social tendu qui se traduira par une journée intersyndicale de mobilisation le 18 septembre. Mais pour Fitch, ces discussions sur le budget 2026 devraient réduire l’ampleur de l’effort budgétaire, voulu à 44 milliards d’euros par François Bayrou. De quoi compromettre l’objectif d’un déficit projeté à 4,6 % l’an prochain : l’agence de notation le voit rester supérieur à 5 % en 2026 et 2027.
La dégradation de la note, qui mesure la capacité de la France à rembourser sa dette, marque un tournant, même si elle devrait entraîner peu de conséquences immédiates pour Paris. Lui attribuant l’équivalent d’un 16/20, Fitch la fait en effet basculer dans la catégorie inférieure, de qualité « moyenne supérieure », contre « bonne ou haute » jusqu’ici, ce qui pourrait conduire des investisseurs à vendre leurs titres de dette pour des placements moins risqués et entraîner des hausses de taux. Cela alourdirait encore plus les intérêts payés par la France pour rembourser sa dette, estimés à environ 55 milliards d’euros en 2025.