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Rédaction Lille

Publié le

13 sept. 2025 à 9h02

La juge des référés du tribunal administratif de Lille a donné raison à un automobiliste de Douai (Nord) qui avait été privé de son permis de conduire le 17 juin 2025 par le préfet du Pas-de-Calais après avoir fait l’objet d’un « faux positif » à la cocaïne, selon lui. Détails.

Un homme contrôlé positif à la cocaïne récupère son permis au tribunal

Le requérant avait en fait été contrôlé le 29 mai 2025 par les gendarmes à Corbehem (Pas-de-Calais), juste de l’autre côté de la frontière entre les départements du Nord et du Pas-de-Calais.

Son permis de conduire lui avait alors été immédiatement retiré « au motif qu’il aurait consommé de la cocaïne« , relate le juge des référés du tribunal administratif de Lille dans une ordonnance en date du 7 août 2025 qui vient d’être rendue publique. Le même permis avait par la suite été suspendu par les services de l’Etat pour une durée de six mois.

L’intéressé avait donc saisi la justice administrative dans le cadre d’une procédure d’urgence : la décision du préfet du Pas-de-Calais « ne lui permet plus de se rendre à son travail » à Beauvais (Oise), expliquait son avocat, puisque celui-ci est « distant de 166 km ». « Il ne peut s’y rendre en train dès lors qu’il doit être sur site à 7h45« , ajoutait l’avocat lillois. « L’utilisation de son véhicule est indispensable pour accompagner sa compagne dans la vie quotidienne et pour ses rendez-vous médicaux, ainsi que pour ceux de son fils, âgé de 6 ans. »

Sur le fond du dossier, son client soutenait qu’il avait « sollicité spontanément » une contre-expertise sanguine auprès des gendarmes qui lui avaient fait passer un test salivaire lors du contrôle routier, mais que ces derniers avaient « refusé d’y faire droit » au motif qu’ils n’étaient « pas en mesure d’assurer son retour depuis le centre hospitalier d’Arras« . « En tout état de cause, le résultat du test salivaire sera nécessairement confirmé », lui auraient également dit les militaires de la gendarmerie.

Une « menace pour la sécurité publique »

Seulement voilà : un « rapport toxicologique » réalisé « dans un laboratoire » le 31 mai 2025, soit deux jours après son contrôle positif à Corbehem, avait conclu que l’automobilise n’avait « pas pris de produits stupéfiants ». « Le résultat positif du test et du prélèvement salivaires réalisés par les forces de l’ordre constitue « un faux positif » résultant de la prise de certains médicaments (…) à base de lidocaïne », en déduisait l’avocat du père de famille.

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« Un test salivaire ne permet la détection de cocaïne que six à dix heures après la prise de ce produit, alors qu’un test urinaire comme celui qu’il a effectué permet de détecter ce produit entre deux et quatre jours », rappelait encore l’avocat du requérant. « Le test urinaire effectué 30 heures après le contrôle aurait donc nécessairement dû être positif. »

Le préfet du Pas-de-Calais, pour sa part, maintenait que cet automobiliste représentait « une menace pour la sécurité publique » ; il n’y avait en tout état de cause pas « urgence » à suspendre sa propre décision puisque le requérant « ne démontre pas être dans l’impossibilité de solliciter l’aide d’une personne tierce ou d’une voiture sans permis (…) pour aider sa compagne ». De la même façon il n’était pas prouvé que cette femme handicapée était « dans l’impossibilité d’utiliser les transports en commun ».

« Aucun élément ne corrobore le fait que le requérant (…) aurait été dissuadé (…) par les forces de l’ordre de réaliser une contre-expertise », considérait enfin le représentant de l’Etat. Au demeurant, le nouveau contrat à durée indéterminée (CDI) de l’intéressé à Beauvais avait été signé « postérieurement à la notification » de sa suspension de permis, faisait-il observer.

Sa compagne est atteinte d’une « maladie très invalidante »

« Le préfet soutient (…) que les informations [sur le droit de solliciter une contre-expertise sanguine, ndlr] ont été communiquées (…) par le biais d’un formulaire, et que l’intéressé, dûment informé, a refusé de réaliser un prélèvement sanguin« , résume donc la juge des référés du tribunal administratif de Lille.

« Toutefois, (…) l’avis de rétention du permis (…) ne fait pas référence à un tel formulaire », constate la magistrate, qui a donc un « doute sérieux » sur la légalité de la procédure. « Le préfet (…) ne produit aucune autre pièce de nature à établir qu’une telle information aurait été donnée. »

Il y avait par ailleurs bel et bien « urgence » à suspendre cette décision puisque le requérant « soutient sans être contesté » que son activité professionnelle est « essentielle pour subvenir à ses besoins, à ceux de sa compagne atteinte d’une maladie très invalidante et de son fils (…) de 6 ans ».

Le permis de conduire a donc été restitué à l’intéressé jusqu’à ce même tribunal administratif de Lille réexamine la légalité de l’arrêté par le biais d’une formation collégiale de trois juges, d’ici dix-huit mois à deux ans. S’il venait à être annulé et que le préfet ne faisait pas appel, alors le requérant serait en droit de demander des dédommagements à l’Etat pour les « préjudices » qu’il a subis pendant ces sept semaines où il a été privé de son permis. Dans l’immédiat, l’Etat devra lui verser 1.000 € pour ses frais de justice.

GF (PressPepper)

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